Dans l'évangile de ce dimanche, Jésus change l'eau en vin au cours d'une noce, à Cana. Un épisode célèbre de l'évangile de Jean maintes fois représenté et commenté. La théologienne Sylvaine Landrivon nous montre en quoi cet acte de Jésus n'est pas un miracle mais un signe.
Le troisième jour, il y eut un mariage à Cana de Galilée. La mère de Jésus était là. Jésus aussi avait été invité au mariage avec ses disciples. Or, on manqua de vin. La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. » Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Sa mère dit à ceux qui servaient : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. »*
Or, il y avait là six jarres de pierre pour les purifications rituelles des Juifs ; chacune contenait deux à trois mesures, (c’est-à-dire environ cent litres). Jésus dit à ceux qui servaient : « Remplissez d’eau les jarres. » Et ils les remplirent jusqu’au bord. Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent. Et celui-ci goûta l’eau changée en vin. Il ne savait pas d’où venait ce vin, mais ceux qui servaient le savaient bien, eux qui avaient puisé l’eau.
Alors le maître du repas appelle le marié et lui dit : « Tout le monde sert le bon vin en premier et, lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant. » Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana de Galilée. Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui.
Source : AELF
L’évangile de la semaine dernière relatait le baptême de jésus dans le Jourdain, ce moment où l’Esprit saint descend sur le "Fils bien-aimé". Cet épisode ouvre l’existence de Jésus à sa dimension publique, lui qui a passé 30 ans de vie caché à Nazareth. Cette semaine, nous retrouvons Jésus à un mariage, dans le village de Cana.
C’est l’évangéliste Jean qui raconte cette scène dans laquelle pour la première fois le Fils de Dieu se jette à l’eau pour une histoire de vin, les mariés ayant frôlés la catastrophe à cause d’une pénurie de bouteilles.
L’évangile de Jean est un évangile à part, il a été écrit plus tard que ceux de Marc, Matthieu et Luc, les synoptiques. Il a été rédigé après la Résurrection, et probablement vers le Ier siècle. Mais "ce n’est pas un individu qui a écrit une seule bonne nouvelle" : on parle d’école johannique. C’est aussi un texte énormément travaillé, où la symbolique est partout, il fourmille de doubles sens et de jeux de mots… En bref, tout doit y être interprété. "On ne peut pas lire absolument un texte de l’évangile de Jean comme si c’était une anecdote et qu’on la prenne au premier degré." Aussi, quand on écoute ce texte, au temple ou à l’église, il faut bien avoir en tête que c’est une interprétation.
A priori on pense qu’il est question d’un événement festif, joyeux, qui raconte une scène où un miracle a lieu. Mais "avec Jean il faut tout de suite aller au-delà", prévient Sylvaine Landrivon. Pour la théologienne, c’est un véritable "cours de christologie" qui est donné ici. "Il va nous dire la double nature du Christ, qui est la fois le Jésus de l’histoire et le Christ de la foi, il va nous montrer comment on met en lien la première alliance avec la nouvelle alliance. Et ça on va le trouver dans tous les passages."
Contrairement aux trois synoptiques, Luc, Marc et Matthieu, on parle chez Jean de signes, et non de miracles. Là où Luc, Marc et Matthieu emploient le mot grec dýnamis, qui évoque l’idée de puissance et d’autorité, chez Jean, le terme utilisé est sêmeîon. "Ce qui est mis en premier, ça va être l’amour, ça va être le service, nous dit Sylvain Landrivon, pour justement montrer que Jésus se donne et que sa messianité ne va pas être celle d’un type royal tel qu’on l’attendait, il va subvertir sa messianité pour se faire serviteur. Et quand il sera élevé, son trône, ce sera la croix…"
Peu de nos contemporains connaissent les Évangiles. Ils n'y sont pas hostiles mais ils n'ont plus d'occasion d'y avoir accès. C'est partant de ce constat que, avec l'éclairage d'un bibliste, Béatrice Soltner propose chaque semaine un texte d'Évangile pour qu'il soit entendu (ou réentendu), pour en savourer la nouveauté et faire l'expérience que - si incroyable que ce soit à l'heure de l'instantanéité - cette parole écrite il y a plus de 2.000 ans nous rejoint toujours au plus profond.
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