Vatican
Première ovation à Dubaï seulement quelques heures après l’ouverture de la COP 28. Le rendez-vous a démarré avec une première avancée majeure : la concrétisation du fonds destiné à financer les “pertes et dommages” climatiques des pays vulnérables. Voté à la COP 27, c’était un point essentiel, très attendu par les pays du sud. Son opérationnalisation constitue donc une victoire, mais la question et les défis restent nombreux pour avoir une véritable justice climatique.
"Nous avons écrit une page d'histoire” et “la rapidité avec laquelle nous l'avons fait est inédite, phénoménale et historique" s’est réjouit Sultan Al Jaber, le président émirati de cette COP28. Cette décision était inespérée pour celui qui est également le dirigeant de la compagnie pétrolière nationale et qui suscitait jusqu’ici beaucoup de défiance.
Cette première avancée majeure de la COP28, est un pas positif pour espérer dégripper les tensions financières entre le Nord et le Sud. Surtout, elle vient concrétiser le principal résultat de la COP27 en Égypte l'an dernier, où ce fonds avait été approuvé sur le principe mais dont les contours, très débattus, n'avaient pas encore été définis.
Un fonds vide ne peut pas aider nos citoyens
“Il a fallu 30 ans de lutte acharnée par les pays en développement pour obtenir enfin la promesse de ce fonds lors de la précédente COP” rappelle l’ONG Care qui se réjouit d’une étape clé. De son côté, Madeleine Diouf Sarr, présidente du groupe des pays les moins avancés, qui représente 46 des nations les plus pauvres, a salué une décision d'une "signification énorme pour la justice climatique".
Mais il reste “plusieurs lacunes” dans le texte souligne Care. Dans les négociations, les pays en développement ont dû accepter que les contributions financières des pays riches soient basées sur le volontariat. “Un fonds vide ne peut pas aider nos citoyens” s’est inquiétée Madeleine Diouf Sarr.
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Les premières promesses ont commencé à affluer : 225 millions d'euros pour l'Union européenne (dont 100 millions de dollars annoncés par l'Allemagne), 100 millions de dollars pour les Émirats, 10 millions de dollars pour le Japon, 17,5 millions pour les Etats-Unis, jusqu'à 40 millions de livres (environ 50 millions de dollars) pour le Royaume-Uni.
Néanmoins, si la barre des 200 millions d’euros nécessaires pour faire fonctionner le fonds est largement dépassée, les besoins réels sont estimés entre 265 et 530 milliards d’euros par an pour les pays du Sud d’ici à 2030. “Il ne s’agit que du strict nécessaire pour rendre le Fonds opérationnel” alerte Care. "Le travail est loin d'être achevé", a aussi réagi l'alliance des petits Etats insulaires (Aosis). "On ne sera pas tranquilles tant que ce fonds ne sera pas financé convenablement et commencera à alléger le fardeau des communautés vulnérables".
Il faut absolument trouver des moyens de stimuler l’investissement privé
“Il y a des gros enjeux d’investissement et de dette, car les États, les gouvernements ont peu de liquidités à mettre sur la table” diagnostique François Gemenne professeur à HEC, auteur du 6e rapport du GIEC. “Il faut absolument trouver des moyens de stimuler également l’investissement privé si on veut réussir cette transition énergétique, notamment dans les pays du sud” alerte-t-il.
Les pays en développement ont notamment accepté que le fonds ne soit pas indépendant, mais hébergé pendant quatre ans par la Banque mondiale. C’était un point important d’achoppement des négociations. “La Banque mondiale finance les énergies fossiles” s’indigne la chercheuse Yamina Saheb, également experte du GIEC.
Faire passer ce fond par la Banque mondiale revient à le tuer
De plus, cette institution fait “des prêts qui coûtent très cher aux pays en développement, car dans notre système de gouvernance mondiale actuelle, ils sont considérés comme des pays à risque” , ajoute-t-elle. L’ONG Care s’émeut également d’un fond placé sous la responsabilité “d’un secrétariat hébergé par la Banque mondiale régulièrement critiquée pour ses pratiques”. Yamina Saheb va plus loin et estime que “faire passer ce fond par la Banque mondiale revient à le tuer”.
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