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Coupe du monde : le Qatar, si petit, si influent ?

Un article rédigé par Jeanne d'Anglejan, Melchior Gormand - RCF, le 19 octobre 2022 - Modifié le 21 octobre 2022
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À un mois du lancement de la coupe du monde de football, le Qatar est sous les projecteurs. S’il est à peine plus grand que la Corse, le poids qu’il pèse à l’international est majeur. Influent et puissant, riche et paradoxal, nous ne connaissons pourtant que très peu ce pays qui a connu un développement hors-normes en une décennie. 

© ekrem de Pixabay © ekrem de Pixabay

Le Qatar en quelques mots

 

Privilégié par la présence d'hydrocarbures, le développement du Qatar s’est acté de manière extrêmement rapide. Le désert s’est ainsi transformé en une zone d'activité très riche. Situé en pleine péninsule arabique et entouré de puissants voisins, le pays compte environ 3 millions d’habitants. Parmi eux, 85% sont des étrangers venus de 63 pays différents. Le sex-ratio est très déséquilibré : on compte trois hommes pour une femme. Christian Chesnot est grand reporter à la rédaction internationale de Radio France. Spécialiste du Moyen-Orient, il est l’auteur de "Qatar, les secrets d'une influence planétaire en 100 questions”, aux éditions Tallandier. Il relate que les Qataris se caractérisent et se reconnaissent par leurs tenues : les hommes portent des grandes robes blanches avec des foulards, les femmes des voiles noirs. "Si les Qatariens enlèvent leur habit, ils disparaissent du paysage public. C’est une question de survie et d’existence de leur identité", explique le journaliste.

 

Depuis 10 ans, le pays a fait venir 10 millions de travailleurs étrangers pour les travaux de la coupe du monde. S’y ajoutent les femmes qui viennent des Philippines ou du sous-continent indien. Elles travaillent comme employées de maison dans les familles aisées. La capitale, Doha ("la baie"), est construite en arc-de-cercle, sans "gigantisme des constructions", souligne Brigitte Dumortier, géographe et maîtresse de conférences en géographie humaine à l'Université Paris-Sorbonne. Elle est l’auteure de "Atlas des pays du Golfe" édité par les Presses de l'université Paris Sorbonne.

 

Une ascension fulgurante, entre traditions et modernité 

 

À l’origine de cette ville, il y a justement les pêcheurs de perles et les traditions bédouines d’hospitalité, les courses de dromadaires et la chasse au faucon. Christian Chesnot est témoin du changement sociétal fulgurant qui opère depuis 20 ans. Longtemps "endormi" et "à l’ombre de l’Arabie Saoudite", le coup de modernisation accéléré a poussé le pays sur le devant de la scène mondiale. Face à cette modernisation, il existe un malaise, dû à un sentiment de perte des traditions. Élevés par des nannies Philippines, les jeunes parlent davantage anglais et vont étudier dans de prestigieuses universités à l’étranger. Le régime alimentaire diffère, le diabète prend de l’importance.

 

Et tout cela s’accompagne de nombreux paradoxes. Le pays est ouvert sur l’international mais reste traditionaliste pour sa propre société. "C’est un village, un micro-État dans lequel tout le monde se connaît", explique Christian Chesnot. Ce qui prime est le lien du sang, héritier de la tradition des tribus et du poids de la généalogie. La polygamie persiste : l’émir a deux épouses. Malgré les richesses économiques du Qatar, des fragilités existent notamment au niveau de l’eau, de l’agriculture ou de l’indépendance alimentaire. Brigitte Dumortier pointe du doigt cette "dépendance très forte vis-à-vis de la désalinisation de l’eau de mer" et des pays voisins, mise en exergue pendant le blocus de 2017 à 2021.

 

De l'argent au pouvoir

 

Le pays est marqué par un avant et un après. Le Qatar a la troisième réserve de gaz du monde. Il cumule ainsi l’argent qui rend possible l’indépendance vis-à-vis des pays voisins. L’idée est de diversifier les placements financiers : rachat du PSG, investissements en Allemagne ou à la City de Londres. Le soft power passe aussi par l'influence de Qatar Airways. La monarchie, elle, repose sur la légitimité tribale. Il est facile pour les qataris d’accéder à leur souverain. 


Le Qatar a soutenu les frères musulmans pour favoriser l’émergence d’un islam alternatif au salafisme saoudien, et pour tenter de supplanter l’Arabie Saoudite dans son rôle de gardien de l’Islam. Le pays a d’ailleurs rejoint la coalition internationale conduite par Washington qui a mené la guerre contre les djihadistes de l’État islamique.

 

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