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Décryptage des erreurs de gestion budgétaire du gouvernement avec Claude Raynal, président de la Commission des finances au Sénat

Un article rédigé par Philomène Dubois - RCF, le 26 novembre 2024 - Modifié le 26 novembre 2024
L'Invité de la MatinaleClaude Raynal, sénateur socialiste et Président de la commission des Finances

Depuis le début de la semaine, le Premier ministre consulte les différents groupes d’opposition. Pendant ce temps, le projet de loi de finances est examiné au Sénat. Les nombreux amendements proposés par les députés et adoptés par l’opposition pour détricoter la copie du gouvernement n’ont pas été retenus, et le texte a été transmis à la chambre haute dans sa version initiale, celle du gouvernement. Claude Raynal, président de la commission des finances au Sénat et sénateur socialiste, apporte ce matin des éclaircissements sur la situation.

Claude Raynal, sénateur socialiste © Pierre-Hugues Dubois - RCFClaude Raynal, sénateur socialiste © Pierre-Hugues Dubois - RCF

L’hypothèse d’une motion de censure, qui pourrait faire tomber le gouvernement avant Noël, prend désormais une tournure très sérieuse. À l’issue de sa discussion avec Michel Barnier, Marine Le Pen a déclaré que le Rassemblement national (RN) voterait la motion de censure si le Premier ministre restait "campé sur ses positions."

Des recettes mal anticipées

La dette française atteignait en septembre 2024 plus de 3 200 milliards d’euros. Claude Raynal questionne la décision d’Emmanuel Macron de se priver de certains revenus fiscaux depuis 2018. La Cour des Comptes a ainsi estimé les baisses d’impôts réalisées durant les deux quinquennats d’Emmanuel Macron à 62 milliards d'euros par an. Ces réductions se traduisent notamment par la suppression de la taxe d’habitation, la diminution du taux d’imposition des entreprises de 33 % à 25 %  et la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). "Ces 62 milliards ont été financés par la dette. L’idée principale était de réduire les impôts pour stimuler la consommation, mais c’est totalement raté. Nous avons aujourd’hui un taux d’épargne de 17 % chez les Français," observe Claude Raynal. Selon le sénateur, les Français n’ont pas une culture de la surconsommation : l’argent dont ils n’ont pas besoin pour vivre, ils le mettent de côté.

L’idée principale était de réduire les impôts pour stimuler la consommation, mais c’est totalement raté. Nous avons aujourd’hui un taux d’épargne de 17 % chez les Français.

La raison technique du dérapage budgétaire réside dans des recettes qui n’ont pas été au rendez-vous, explique-t-il. Lorsqu’un système est perturbé par des crises, on peut observer une forte hausse des recettes à court terme, suivie d’un retour à des niveaux plus faibles à mesure que le système se stabilise, explique le sénateur. "Sur le long terme, les recettes fiscales liées à la croissance sont en moyenne équivalentes à 1. Si vous atteignez un taux de 1,4 sur une période, cela signifie que les années suivantes, vous serez à 0,5 ou 0,4. Cela a manifestement été mal appréhendé." Le deuxième problème soulevé par Claude Raynal est qu’aucun mécanisme de blocage des dépenses n’a été mis en place lorsque les recettes ont fléchi. "La question centrale depuis septembre reste l’équilibre entre recettes et dépenses," conclut le président de la commission des finances.

La responsabilité revient à celui qui gouverne

"La responsabilité, de principe, revient toujours à celui qui gouverne," affirme Claude Raynal. "C’est le politique qui valide, décide et assume les conséquences." Le sénateur retrace les erreurs de gestion budgétaire du gouvernement. En décembre 2023, Élisabeth Borne aurait pu décider de freiner le dérapage budgétaire, mais elle a préféré attendre la fin des fêtes de fin d’année, en janvier. Le 7 janvier, elle démissionne. Le ministre de l’Économie propose alors un projet de loi de finances rectificative au nouveau Premier ministre, mais celui-ci est retardé, se traduisant finalement par un décret d’annulation plafonné à 10 milliards d’euros. Or, le montant à corriger s’élève à 30 milliards, insiste Claude Raynal. Au moment d’aller plus loin, les élections européennes se profilent, et le gouvernement choisit de ne pas annoncer de mauvaises nouvelles, explique le sénateur. "Puis survient la dissolution, laissant le pays sans véritable gouvernement. Cela fait six mois de perdus. Quand, pendant ces six mois, vous ne contrôlez pas l’équilibre budgétaire, le dérapage devient inévitable."

C’est le politique qui valide, décide et assume les conséquences.

Les effets de cette dissolution se font sentir aujourd’hui à l’Assemblée, où des blocs politiques refusent de coopérer. Selon Claude Raynal, cette situation est due à la complexité du système électoral. "Les députés sont élus sur la base de programmes souvent incompatibles. Former des alliances demande du temps et des solutions techniques adaptées." Il rappelle qu’en temps normal, c’est à l’Assemblée nationale de voter le budget.

Il faut contrôler le budget tout en investissant pour l’avenir

Pour Claude Raynal, il reste impératif de continuer à financer les projets d’avenir. "Le dernier budget équilibré remonte à 1974. Mais nous ne sommes plus dans les années 70 : la question de l’équilibre budgétaire ne se pose plus de la même manière." Ce qu’il faut analyser, selon lui, c’est la capacité du pays à produire de la richesse et à développer des investissements stratégiques. "Ce n’est pas une simple question d’équilibre comptable, mais une réflexion sur la vision de l’avenir."

 

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