Aujourd'hui débute à l'Assemblée nationale l'examen du budget de l'État pour 2025. Celui-ci prévoit 60 milliards d'euros d'économies, dont 5 milliards pour les collectivités locales, qui haussent le ton aujourd'hui. Une colère latente depuis des mois s'est intensifiée mi-septembre, lorsque l'ancien ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a accusé les collectivités locales d'être responsables de 16 milliards d'euros de dérapages dans les comptes publics. Décryptage de la situation avec Murielle Fabre, maire de Lampertheim en Alsace et vice-présidente des maires de France.
Les relations entre le gouvernement et les collectivités se sont dégradées le 2 octobre, après la publication d'un rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales, qui recommande une réduction de 100 000 emplois, soit 5,5 % en 6 ans. Désormais, le gouvernement exige 5 milliards d'euros d'économies supplémentaires.
Sur les 5 milliards d’euros d’économies demandés par le gouvernement aux collectivités locales, le principal levier est la création d’un fonds d’épargne imposé, qui devrait permettre de réaliser 2,8 milliards d’économies. Cet effort se concentre sur 450 collectivités. Ce budget reste difficile à accepter pour Murielle Fabre : "Il a un effet récessif. Avoir finalement une mainmise de près de 5 milliards sur nos recettes, certes 3 milliards concernent les plus grandes collectivités, mais de nombreuses annulations de crédits auront des conséquences négatives pour les services publics au quotidien et pour l’investissement." L’ensemble des maires se disent très inquiets de la situation, ajoute la vice-présidente de l'Association des maires de France.
Nous participons à près de 70 % de l’investissement public. Nous demander de faire des économies en rationalisant nos recettes n'est pas la bonne solution.
Murielle Fabre souligne que l'État et les comptes de la nation sont instables, et il est infondé de mettre en cause les collectivités territoriales. "Nous participons à près de 70 % de l’investissement public. Nous demander de faire des économies en rationalisant nos recettes n'est pas la bonne solution." Elle explique qu’il est d'abord nécessaire d'identifier les recettes des collectivités locales et de simplifier les démarches administratives, avant de procéder à des coupes budgétaires. "Faire des coupes sans concertation ni collaboration avec les collectivités est le principal défaut de cette loi de finances." Murielle Fabre souligne qu'il ne faut pas réduire les budgets, par exemple pour le fonds vert, qui permet de financer la transition écologique, ou pour le fonds de compensation de la TVA.
Le principal problème du gouvernement, selon Murielle Fabre, est sa méconnaissance du rôle des collectivités. "Les collectivités ont une dette stable et continuent à augmenter leurs investissements. Il ne faut pas confondre le déficit public de l'État avec la part des collectivités, qui est minime par rapport aux 60 milliards d'économies demandées." Pour elle, la décentralisation est l’une des solutions. Lorsqu'il existe des doublons entre les collectivités et les services de l'État, il faut se demander quel échelon est le plus pertinent. "Il faut répartir les compétences en vue d'une meilleure performance et efficacité de l’action publique. Il y a un besoin de simplification au niveau de l'État, alors que les collectivités sont en première ligne."
Il faut d'abord définir ce qui est essentiel au niveau local, puis remonter vers les départements, les régions et enfin l'État.
Les collectivités locales sont réparties sur trois échelons : communes, départements et régions, qui ont des rôles spécifiques et doivent agir en complémentarité, explique la maire. Selon Murielle Fabre, la répartition des compétences doit être ascendante plutôt que descendante. "Il faut d'abord définir ce qui est essentiel au niveau local, puis remonter vers les départements, les régions et enfin l'État." Elle ajoute que les recettes des collectivités ont été fortement réduites ces dernières années, notamment avec la baisse de la dotation globale de fonctionnement et la suppression de la taxe d’habitation. "Il y a eu une compensation, mais cette enveloppe ne correspond plus à une véritable responsabilité fiscale. Les collectivités ne peuvent plus décider si elles ont besoin d'activer le levier fiscal." La réduction de leur budget a entraîné une baisse de l’investissement dans la rénovation et l’entretien des infrastructures.
Les deux quinquennats d'Emmanuel Macron se sont traduits par une forte recentralisation des décisions prises par les collectivités locales. "Il y a une recentralisation à la fois financière et normative. Ce n'est pas la bonne solution. Nos concitoyens ont besoin d'une action publique efficace, réalisée au plus près d’eux." Murielle Fabre ajoute que l'Association des maires de France travaille avec les sénateurs et les députés pour proposer des amendements aux projets de loi du gouvernement. "Nous demandons des concessions de la part de l'État. L'Association des maires de France a présenté de nombreuses propositions, que ce soit pour soutenir les activités périscolaires, le fonds vert, ou le fonds de compensation de la TVA, qui est l'un des piliers essentiels pour l'investissement."
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