Cet été, les Jeux Paralympiques ont profité de l’engouement des Jeux Olympiques de Paris quelques semaines plus tôt. Aujourd’hui en France, 12 millions de personnes sont en situation de handicap, soit 1 Français sur 6. Même si 90 % d’entre eux pensent qu'il est essentiel d'exercer une activité physique, ils sont moins d’une personne sur deux à en pratiquer.
Alors que la flamme s’est éteinte, la pratique sportive a-t-elle repris le flambeau ? Peut-on déjà mesurer une sorte d'« d’effet Jeux Paralympiques » ?
"Il est peut-être un peu tôt pour faire un bilan des paralympiques, non ?". Dans les couloirs du siège de la Métropole, les représentants des clubs sport lyonnais ne veulent pas trop s'avancer. Présents au forum des Activités Physique Adaptés, que la Métropole organise, une cinquantaine de clubs et structures médicaux-sociales se rencontrent pour la troisième année consécutive. L'idée de l'évènement, mettre en liens ces deux acteurs pour développer le sport pour les personnes atteintes de handicap physique ou mentaux.
Si certains sont sceptiques quant à l'héritage des Jeux, d'autres sont enthousiastes : "Je suis très content. Il y a eu une effervescence exceptionnelle, c'est un grand pas vers l'inclusion, une inclusion globale" souligne Philippe Martin membre d'Handisport lyonnais.
Ce grand pas ne pourra se faire si et seulement si les créneaux se libèrent dans les gymnases, pour permettre à tous de pratiquer un sport : "la ville et la métropole nous aide financièrement, mais trouver un créneau, c'est le parcours du combattant" poursuit Philippe Martin.
Pour cette édition 2024, le forum met en lumière le métier de professeur d'APA (Activité Physique Adaptée). C'est le métier de Fabienne Savapeloss, à la JAAC de Caluire qui accueille notamment des jeunes enfants de 8 à 10 ans atteints de déficiences mentales légères d'un IME (Institut Médicaux Educatif) pour des cours d'handigym : "Ils viennent ici pour sortir de leur établissement, pour se dépenser avant tout [...] j'ai moi-même une prothèse tibiale, ils voient que j'ai un handicap, et ils me posent des questions, si je peux courir ou pas. Pour ceux qui ont pu suivre les épreuves des Jeux paralympiques, ça les booste et ça leur donne envie de bouger."
Tous les acteurs du forum s'accordent à le dire : c'est en montrant dès le plus jeune âge qu'il est possible de faire du sport, même en situation de handicap, que les mentalités peuvent changer. L'autre clé ? Le bouche-à- oreille.
C'est grâce au bouche-à-oreille que Pierre pratique chaque semaine le showdown, un dérivé du tennis de table pour déficients visuels : "C'est un ami de Strasbourg qui m'a parlé de ce sport, je me suis renseigné et j'ai vu qu'il y avait un club omnisport à Lyon qui le proposait". Ce club, c'est la Nouvelle Renaissance Lyonnaise dans le 8ème arrondissement. Comme chaque vendredi, c'est sur les tatamis de la Nouvelle Renaissance qu'Hicham Aboukebir s'entraîne avec quinze autres judokas. Atteint d'un handicap mental, le sportif âgé de 32 ans combat chaque semaine avec les "valides". Pour la compétition, Hicham concourt dans une catégorie "sport adapté" et ça lui réussit. Le lyonnais est vice champion de France en titre des moins de 100kg après avoir déjà été champion de France par le passé.
À la Nouvelle Renaissance, l'inclusion des personnes en situation de handicap est rendue possible grâce au label "sport inclusif" décerné par le Comité Paralympique français. À l'heure actuelle, la section judo et la section zumba accueille des personnes en situation de handicap, et l'idée est de l'ouvrir à d'autres disciplines.
Stéphane, l'entraîneur d'Hicham Aboukebir voit dans ce dispositif une réelle force, et a su s'adapter sans pour autant changer sa manière de faire : "Je les considère comme des gens valides. S'ils doivent se faire engueuler parce qu'ils font quelque chose de mal, je vais les engueuler. Bien sûr, il faut leur expliquer les choses plusieurs fois, de manière différentes [...] nous on est un club familial, le fait d'avoir mis les sport adapté avec nous, ça a encore plus fortifié ce contexte, tout le monde fait du judo ensemble, on partage des choses ensemble".
Au total, 24 clubs ont ce label "sport inclusif" aujourd'hui dans la métropole lyonnaise qui compte 2400 clubs. Le chemin est encore long, mais c'est une volonté de l'exécutif métropolitain de développer le dispositif, ce qu'assure Florestan Groult, en charge des sports : "La politique "sport santé adapté handicap" on l'a pense dans la durée, on la pense en dehors des Jeux Olympiques et Paralympiques. Maintenant, avec ceux jeux, ça nous a donné un coup d'accélérateur, et à nous d'en profiter pour continuer de construire".
Construire, pour permettre à tous de bénéficier de ce droit au sport. Il y a dix ans Michel Sorine, sportif amateur subit un coup d’arrêt : un accident de vélo le rend tétraplégique. Mais dès sa sortie d’hôpital, il veut continuer à faire du sport : « J’ai essayé de m’inscrire dans des salles de sport, avec un abonnement prohibitif, j’avais accès à une machine et encore, donc on s’est créé notre propre salle ». Avec des amis il crée alors la première salle de sport en France 100% dédiée aux personnes en situation de handicap. Quelques années plus tard, une centaine d’adhérents fréquentent la salle et une nouvelle salle va ouvrir à Grenoble.
Les Jeux ont tellement mis en valeur le sport et le handicap, que j’ai eu envie de faire quelque chose, pour prolonger le rêve
Le fondateur de la société Extra Sport (qui organise notamment la Sainté-Lyon, le Marathon International du Beaujolais), a lui-même été surpris de l’engouement autour des Jeux Paralympiques, qu’il se devait de mettre de repenser les courses qu’il organise : « [Les Jeux] ont tellement mis en valeur le sport et le handicap, que j’ai eu envie de faire quelque chose, prolonger le rêve […] donc cette année on a mis en place une équipe Paralight. Light parce qu’on veut mettre en lumière les handicaps psychiques et physiques ». Entre 10 et 20 coureurs en situation de handicap participeront à la Sainté-Lyon. Pour mettre ce genre d’initiative en place, Michel Sorine peut compter sur des sponsors et partenaires de longue date, car le défi est de taille : équiper, notamment des athlètes tétraplégiques avec des goélettes, trouver le financement, et surtout tout faire pour que d’une initiative, l’intégration des personnes en situation de handicap soit une réalité sur le long terme.
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