Les agriculteurs poursuivent aujourd’hui leur mobilisation à travers toute la France. Opposés à la signature par l’Union européenne d’un accord de libre-échange avec les pays du Mercosur, leur mouvement coïncide avec les deux jours du sommet du G20 au Brésil, soulignant leur opposition à cet accord commercial. Pour analyser ces mobilisations paysannes, Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA.
Emmanuel Macron a affirmé lundi que la France n’était pas isolée, estimant que plusieurs pays européens partagent son opposition à la version actuelle de l’accord. Du côté des agriculteurs, les motifs de mécontentement vont bien au-delà : des normes trop nombreuses, une concurrence déloyale, des revenus insuffisants et un manque de considération. Ces revendications font écho à celles formulées l’an dernier.
Le 16 janvier 2024 a marqué le début d’une mobilisation massive des agriculteurs en France. Ils dénoncent notamment la baisse de leurs revenus, l’augmentation des charges et les effets des accords de libre-échange. Bien que le gouvernement ait pris des engagements il y a un an, la colère des agriculteurs demeure intacte. Pour Luc Smessaert, seules des "mesurettes" ont été mises en place, comme le remboursement partiel du coût du carburant agricole (GNR).
La loi d’orientation agricole a été suspendue, et les débats au Sénat ne reprendront qu’à la fin janvier. Cette loi, attendue depuis deux ans et demi, aurait pu répondre à certaines de nos attentes.
Les réformes essentielles sont à l’arrêt à cause de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin dernier, déplore Luc Smessaert. "La loi d’orientation agricole a été suspendue, et les débats au Sénat ne reprendront qu’à la fin janvier. Cette loi, attendue depuis deux ans et demi, aurait pu répondre à certaines de nos attentes." Quant à la loi de finances, elle aussi suspendue, elle contient des mesures clés pour réduire les charges d’exploitation et réviser le calcul des retraites, en prenant en compte les 25 meilleures années. Luc Smessaert redoute qu’une éventuelle motion de censure bloque encore ces avancées. Les syndicats des Jeunes Agriculteurs et de la FNSEA appellent donc le gouvernement à transformer ses promesses en actions concrètes.
La perspective d’une signature de l’accord Mercosur a ravivé la colère des syndicats agricoles. Selon Luc Smessaert, cet accord favorise un modèle d’agriculture industrielle dominé par des multinationales, bien différent du modèle français. "On parle d’exploitations de dizaines de milliers d’hectares, gérées par des firmes qui achètent la totalité des aliments pour le bétail. Ici, nous nourrissons nos bovins à 100 % avec ce que nous produisons sur nos exploitations." Le vice-président de la FNSEA craint que la baisse des droits de douane et l’insuffisance des contrôles permettent l’importation de viandes aux hormones.
Ce n’est pas dans les favelas qu’on va consommer du comté ou boire du vin français
Les bénéfices de l’accord seraient principalement captés par les élites économiques du Brésil et de l’Argentine, explique l'agriculteur. "Ce n’est pas dans les favelas qu’on va consommer du comté ou boire du vin français." Luc Smessaert redoute un effet domino qui pourrait déstabiliser le marché agricole français et entraîner la fermeture de nombreuses exploitations dans les zones rurales. Il met en garde contre une éventuelle signature de l’accord par la France, qui sacrifierait l’agriculture au profit d’autres secteurs stratégiques, comme l’automobile ou les métaux rares.
Luc Smessaert appelle à une mobilisation des alliés européens pour contrer l’accord Mercosur. "Nous travaillons activement à Bruxelles pour promouvoir une Europe plus unie, qui ne soit pas une passoire commerciale." Il insiste sur la nécessité de renouer des relations stratégiques avec l’Allemagne, dont le syndicat agricole majoritaire (DBV) s’oppose également à l’accord. "Aujourd’hui, la France a perdu du poids à Bruxelles. Nous devons redevenir une puissance forte en Europe, capable de peser sur les décisions et de proposer des politiques courageuses."
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