Marseille
Du vendredi 28 au dimanche 30 avril, le pape François effectue son 41e voyage apostolique en Hongrie. C'est la première fois qu'un pape se rend à deux reprises dans un même pays. Si l'enjeu est de se rapprocher physiquement de l'Ukraine, il y a aussi ce malentendu avec les catholiques hongrois à résoudre.
Le pape François se rend de nouveau en Hongrie et cette fois c'est bien pour rencontrer les catholiques. Quand, en septembre 2021, il avait fait le déplacement, c'était pour assister au 52e congrès eucharistique mondial. Ce qui avait été mal compris et mal perçu par les catholiques du pays.
C'est la première fois que le pape se rend deux reprises dans un pays. Or, "la première visite avait été très mal comprise et très mal perçue, rapporte Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de la revue Conflits, parce que le pape était venu pour un congrès eucharistique et non pas pour les Hongrois." Les catholiques de Hongrie n'avaient pas caché leur déception, "ils avaient vécu ça comme quelque chose d'injuste". Le pape se rend donc auprès des catholiques du pays pour résoudre ce malentendu.
D'ailleurs le souverain pontife est attaché à la Hongrie et ne s’en cache pas. "Ce sera l'occasion de retrouver une Église et un peuple qui me sont si chers", a-t-il déclaré. Lorsqu’il était archevêque de Buenos Aires, il s’est lié d’amitié avec les religieuses du monastère de religieuses, où résidaient des sœurs hongroises de Mary Ward, congrégation importante en Hongrie, ayant fui la révolution de 1956.
Ce déplacement du pape en Hongrie, pays frontalier de l'Ukraine, est aussi un moyen de se rapprocher de l'Ukraine. "Ce sera un voyage au centre de l'Europe, sur laquelle les vents glacés de la guerre continuent de souffler", a annoncé le pape François après la prière du Regina Cæli, ce dimanche 23 avril. Comme le note Jean-Baptiste Noé, "le pape n'aura jamais été aussi près de la frontière !"
Il a été plusieurs fois question que le chef de l’Église catholique se rende en Ukraine. En août 2022, l’ambassadeur d’Ukraine au Vatican l’avait d'ailleurs invité. Mais "si le pape se rend en Ukraine, selon Jean-Baptiste Noé, ça veut dire qu’il prend position officiellement pour les Ukrainiens, ce qui met à mal le rôle qu’il essaie d’avoir de médiateur". Toutefois, à la veille de son départ, le pape doit rencontrer ce jeudi le premier ministre ukrainien. "C'est un geste fort qui montre un changement dans la diplomatie vaticane", estime l'auteur du livre "Le déclin d'un monde - Géopolitique des affrontements et des rivalités en 2023" (éd. L'Artilleur, 2022).
Viktor Orban s'appuie sur une très forte popularité, il a été réélu à quatre reprises
La première fois que le pape s'était rendu en Hongrie, le dialogue avec Viktor Orban avait été "un peu houleux", se souvient Jean-Baptiste Noé. Entre le chef de l'Église catholique et le premier ministre hongrois "la tension est de notoriété publique", annonce la Conférence des évêques de France. En cause : "des visions diamétralement opposées de l’accueil des migrants".
En septembre 2021, quand il était venu à Budapest, le pape François avait rendu hommage à une nation "attachée à ses racines". Il avait appelé les Hongrois à "être ancrés et ouverts, enracinés et respectueux". Un appel à l'ouverture dans un pays dont le premier ministre est connu pour ses positions anti-immigration. Et qui bénéficie du soutien de sa population. "Viktor Orban s'appuie sur une très forte popularité, précise en effet Jean-Baptiste Noé, il a été réélu à quatre reprises."
Lors de la visite de Viktor Orban au Vatican, en avril 2022, le pape l'a remercié pour sa politique d’accueil : plus de 35.000 Ukrainiens ont obtenu le statut de réfugié d’après le Haut-Commissariat aux réfugiés de l'ONU. François ira à leur rencontre ce samedi 29 avril, dans l’église Sainte-Élisabeth de Hongrie, du nom de cette célèbre princesse qui, au XIIIe siècle, a consacré sa vie au service des pauvres et des victimes des guerres.
Il y a ce défi pour l'Église catholique de réévangéliser une nouvelle génération
En Hongrie, "le christianisme est mentionné dans la Constitution", rappelle Jean-Baptiste Noé et "les fêtes chrétiennes sont importantes". Dans ce pays indépendant depuis 1991, et qui se cherche une identité, le christianisme est amené à jouer un rôle important. Il peut aider le pays "à se comprendre comme un État indépendant", observe l'historien. D'ailleurs, les arrestations de prélats entre 1949 et 1989 ont contribué à "réaffirmer l'identité hongroise autour de la figure de ces résistants". Le protestant Viktor Orban a fait partie de ces mouvements de jeunesse contre le communisme. Mais si la Hongrie compte 39% de catholiques, elle est "comme tous les pays européens marquée par le recul de la foi", note Jean-Baptiste Noé. "Il y a ce défi pour l'Église catholique de réévangéliser une nouvelle génération"...
Après la Hongrie, le pape François se rendra en août prochain à Lisbonne pour les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). Il est déjà très attendu à Marseille en septembre 2023 pour les Rencontres méditerranéennes. Le Vatican avait annoncé que ce ne serait pas un voyage en France mais en Méditerranée : il se pourrait toutefois qu'il célèbre une grande messe au stade Vélodrome et un temps de prière à Notre-Dame-de-la-Garde. Une initiative pour éviter de froisser les catholiques de France ?
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