Annecy
Robert Badinter, avocat de l'abolition de la peine de mort, est décédé dans la nuit du 8 au 9 février, à l'âge de 95 ans. Retour sur son adolescence passée à Cognin, en Savoie, tandis que la Seconde Guerre Mondiale déchirait l'Hexagone.
L'ancien garde des Sceaux, initiateur de l'abolition de la peine de mort, Robert Badinter s'est éteint dans la nuit de jeudi à vendredi, à l'âge de 95 ans.
Ancien président du Conseil Constitutionnel, l'homme de justice est devenu, au fil du temps, une figure reconnue par tous, bien que longtemps critiqué par la droite, et incompris par une aile de la gauche. Son vibrant discours, de plus de deux heures, prononcé devant l'Assemblée Nationale, le 17 septembre 1981 est à l'origine de l'abolition de la peine capitale, le 9 octobre de la même année.
L'origine de son combat en faveur des droits de l'homme puise sa source dans son adolescence, traversée par la guerre. Février 1943, le père de Robert Badinter, juif originaire de Bessarabie, est arrêté à Lyon par la Gestapo. Déporté depuis le camp de Drancy, il meurt, peu après, au camp d'extermination de Sobibor, en Pologne.
Au printemps de la même année, Robert, sa mère et son frère Claude quittent Lyon et se réfugient à Cognin, ils trouvent alors refuge dans la maison d'un couple de commerçants. La petite famille vit ici les années 1943-44, partagée par l'angoisse d'être arrêtée, et le désir d'écrire un nouveau chapitre.
Robert est scolarisé au lycée Vaugelas, sous un nom d'emprunt, "Berthet", où il côtoie, notamment, Maurice Opinel, qui deviendra son ami.
Jusque dans les derniers mois de sa vie, il entretiendra un lien tout particulier avec cet établissement. "L'an dernier, il a reçu trois de nos élèves, chez lui, à Paris, pour échanger sur le thème du Concours National de la Résistance et de la Déportation qui était la Résistance et l'école" explique Claude Desbos, l'actuel proviseur du Lycée Vaugelas. "Robert Badinter était très attaché à notre établissement, il prenait régulièrement contact pour savoir comment il avançait".
Son portrait sera prochainement l'objet d'une fresque au pied de l'escalier d'honneur du lycée.
Robert Badinter reviendra à plusieurs reprises à Chambéry, où il avait participé à la liesse de la Libération, mais aussi à Cognin. "C'est lui même qui a souhaité témoigner en 1996, sa reconnaissance aux Cognerauds pour l'accueil qui avait été réservé à sa famille dans ses années difficiles" se souvient Claude Vallier, ancien maire de la ville qui connaissait bien l'ancien ministre de la justice. "Pour leur dire, tout simplement, vos parents, vos grands-parents (...) nous ont protégé, nous leur devons la vie".
Plus tard, en 2005, il participait aux côtés de la commune au rachat de la maison qu'il avait occupé, avec ses proches, afin d'en faire un lieu de mémoire pour les victimes de la guerre. Le 28 mai de cette année là, une plaque, fixée sur la façade de la bâtisse, est dévoilée, en sa présence. Là aussi, il prend la parole pour rappeler son attachement à la Savoie, mais aussi et surtout, aux droits de l'Homme.
"On était tous impressionnés face l'homme de culture" termine Claude Vallier. "Mais son humilité m'a frappé (...) je retiens cette image d'un homme en prise avec son temps à travers tous les textes de loi qu'il a fait aboutir."
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