Face aux fédérations sportives jugées trop opaques, une commission d’enquête parlementaire a été créé il y a trois mois. Mais ce travail ébranle le sport français, pas habitué à ce que la politique s’immisce dans ses affaires. Vincent Chaudel, co-fondateur de l’Observatoire du Sport Business analyse les raisons de leur méfiance.
Lancée il y a trois mois par la députée écologiste Sabrina Sebaihi (Hauts-de-Seine), la commission d’enquête parlementaire censée soulever le dysfonctionnement des fédérations, irrite au sein des instances sportives. La semaine dernière, le nouveau président du comité olympique (CNOSF), David Lappartient, l’a d’ailleurs fait savoir dans une lettre adressée à la députée à l’origine de cette commission. Dans ces lignes révélées par Le Monde, celui qui est également membre du CIO se dit « étonné » de la description du monde sportif comme « un milieu terriblement opaque » et dénonce des « accusations outrancières ».
Une lettre qui montre l’inquiétude de certaines fédérations. « Evidement que ça dérange. Toute organisation à qui on souhaiterait imposer une transformation aurait un mécanisme de blocage ou de réflexe de défense », affirme Vincent Chaudel. D’autant plus dans le monde du sport, qui s’est créé « avec une volonté de tenir à distance le politique », ajoute le spécialiste.
Le problème du milieu sportif, c’est qu’il est « un monde d’entre-soi », présente Vincent Chaudel. Même si les dirigeants des fédérations sont élus, ils ne le sont que par une poignée de membres. Ce qui signifie selon l’économiste du sport qu’il y a la « possibilité de discuter et d’influencer les votes. Donc si on laisse vivre le monde du sport en vase-clos, il ne se réformera jamais », estime-t-il.
Mais hormis « imposer une règle démocratique », les parlementaires ne pourront pas aller beaucoup plus loin, selon Vincent Chaudel. La faute au « double lien de subordination » qui pèse sur les fédérations, soumises d’une part à l’Etat mais aussi à des confédérations internationales qui pourraient leur reprocher telle ou telle décision.
L’autre problème qui se pose pour les fédérations, c’est la question du timing. En pleine coupe du monde de rugby et à seulement quelques mois des Jeux Olympiques, la réorganisation des instances sportives est mal venue. « C’est nécessaire de le faire, mais ça aurait dû être fait plus tôt, ça nous aurait permis d’être plus confortable à l’arrivée des grands évènements qu’on accueille », affirme Vincent Chaudel.
Quoiqu’il en soit, ces problèmes ne doivent pas faire oublier l’utilité de cette commission qui « permet de libérer la parole, ou de mettre sur la place publique des sujets qui existent mais sur lequel on avait tendance à jeter un voile pudique », insiste le spécialiste, qui ajoute : « le monde du sport ne peut pas vivre en dehors de la société ». Il ne faut pas s’attendre malgré tout à une révolution mais à des évolutions à des rythmes différents selon les fédérations.
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