Tentative d'assassinat contre Trump : "Cette violence est consubstantielle à l'histoire politique des Etats-Unis" selon Anne-Lorraine Bujon

Un article rédigé par Manon Muller - RCF, le 15 juillet 2024 - Modifié le 15 juillet 2024
L'Invité de la MatinaleTentative d'assassinat contre Trump : "Cette violence est consubstantielle à l'histoire politique des Etats-Unis" selon Anne-Lorraine Bujon, directrice de la revue Esprit

L'image de Donald Trump, victorieux et combatif, fait le tour du monde et marque un tournant dans cette campagne présidentielle de 2024. Historiquement, la violence politique est intrinsèque aux États-Unis.  Anne-Lorraine Bujon, directrice de la rédaction de la revue Esprit et spécialiste de l'histoire politique américaine, revient sur le mandat de Trump, ponctué d'incidents violents et analyse la violence politique à laquelle sont confrontés les Américains.

"Donald Trump est une figure extraordinairement clivante. Il a une rhétorique très violente" selon Anne-Lorraine Bujon ©RCF"Donald Trump est une figure extraordinairement clivante. Il a une rhétorique très violente" selon Anne-Lorraine Bujon ©RCF

Donald Trump, l'oreille ensanglantée et le poing levé, criant "fight" à son public, entre dans l'histoire des tentatives d'assassinat aux États-Unis. Cet incident majeur pourrait-il favoriser sa victoire en novembre face à un Joe Biden affaibli ? 

Quelles conséquences sur la campagne présidentielle ?

Pour les inconditionnels de Trump, environ 30% des électeurs, la tentative d’assassinat renforce davantage leur soutien, malgré les controverses passées. Pour Anne-Lorraine Bujon, “ Au sein de cette base de disciples, Trump est comme une figure de gourou. Mais en face, il y a aussi tous les électeurs américains. Il reste un gros bloc centriste d'électeurs aux États-Unis auprès de qui les deux candidats étaient impopulaires ” , explique-t-elle. 

Même si le coup de feu a érigé Trump en héros victorieux, de nombreux Américains n'oublient pas l'assaut du Capitole ni les émeutes qui ont secoué le pays après le meurtre de George Floyd “ Ce sont des gens qui trouvent que l'Amérique est trop polarisée, trop divisée, que les institutions sont paralysées. et qui rêvent de réconciliation” , souligne-t-elle. 

Trump a-t-il attisé cette violence ? 

En 2016, Donald Trump avait fait campagne sur la construction d'un mur pour empêcher des Mexicains de s'introduire aux États-Unis. Puis, son premier mandat avait été fragilisé par les émeutes à Charlottesville entre autres. Pour la spécialiste des Etats-Unis, “Donald Trump lui-même est une figure extraordinairement clivante. Il a une rhétorique très violente” , ajoute-t-elle. 

“ Trump a incité la population blanche à se défendre. Lors de la convention républicaine, un couple de blancs a été mis en scène devant leur maison, armes à la main. Tout cela rappelait l'ambiance des années 60, après les émeutes raciales qui ont agité les États-Unis à cette époque ”, affirme Anne-Lorraine Bujon. 

La violence politique, une vieille tradition aux Etats-Unis ? 

L’attaque sur Donald Trump rappelle l'histoire violente des États-Unis, marquée par l'assassinat de quatre présidents : Abraham Lincoln, James Garfield, William McKinley et John F. Kennedy. Cette tradition funeste inclut aussi des candidats présidentiels, comme Robert F. Kennedy en 1968, et George Wallace. 

“ Cette violence politique est consubstantielle à l'histoire politique des États-Unis. Elle est souvent liée à la question raciale, selon moi. C'est-à-dire qu'il y a quand même cet héritage de l'esclavage, qui était un système éminemment violent, mais surtout de la ségrégation, qui a été la période post-guerre de sécession” , poursuit Anne-Lorraine Bujon. 

Cet événement peut-il réveiller le débat sur les armes à feu ? 

Malgré les épisodes quotidiens de violences aux États-Unis, y compris ceux impliquant Donald Trump, le débat sur la régulation des armes à feu peine à progresser. Le Congrès reste profondément divisé, avec une majorité républicaine fermement opposée. 

“ Le débat va forcément ressurgir, mais je doute qu’il débouchera sur des lois de régulation des armes à feu. La Cour suprême a pris des décisions, d'ailleurs, qui ne vont pas dans le sens de la restriction des armes à feu” , conclut Anne-Lorraine Bujon. 

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