L'image de Donald Trump, victorieux et combatif, fait le tour du monde et marque un tournant dans cette campagne présidentielle de 2024. Historiquement, la violence politique est intrinsèque aux États-Unis. Anne-Lorraine Bujon, directrice de la rédaction de la revue Esprit et spécialiste de l'histoire politique américaine, revient sur le mandat de Trump, ponctué d'incidents violents et analyse la violence politique à laquelle sont confrontés les Américains.
Donald Trump, l'oreille ensanglantée et le poing levé, criant "fight" à son public, entre dans l'histoire des tentatives d'assassinat aux États-Unis. Cet incident majeur pourrait-il favoriser sa victoire en novembre face à un Joe Biden affaibli ?
Pour les inconditionnels de Trump, environ 30% des électeurs, la tentative d’assassinat renforce davantage leur soutien, malgré les controverses passées. Pour Anne-Lorraine Bujon, “ Au sein de cette base de disciples, Trump est comme une figure de gourou. Mais en face, il y a aussi tous les électeurs américains. Il reste un gros bloc centriste d'électeurs aux États-Unis auprès de qui les deux candidats étaient impopulaires ” , explique-t-elle.
Même si le coup de feu a érigé Trump en héros victorieux, de nombreux Américains n'oublient pas l'assaut du Capitole ni les émeutes qui ont secoué le pays après le meurtre de George Floyd “ Ce sont des gens qui trouvent que l'Amérique est trop polarisée, trop divisée, que les institutions sont paralysées. et qui rêvent de réconciliation” , souligne-t-elle.
En 2016, Donald Trump avait fait campagne sur la construction d'un mur pour empêcher des Mexicains de s'introduire aux États-Unis. Puis, son premier mandat avait été fragilisé par les émeutes à Charlottesville entre autres. Pour la spécialiste des Etats-Unis, “Donald Trump lui-même est une figure extraordinairement clivante. Il a une rhétorique très violente” , ajoute-t-elle.
“ Trump a incité la population blanche à se défendre. Lors de la convention républicaine, un couple de blancs a été mis en scène devant leur maison, armes à la main. Tout cela rappelait l'ambiance des années 60, après les émeutes raciales qui ont agité les États-Unis à cette époque ”, affirme Anne-Lorraine Bujon.
L’attaque sur Donald Trump rappelle l'histoire violente des États-Unis, marquée par l'assassinat de quatre présidents : Abraham Lincoln, James Garfield, William McKinley et John F. Kennedy. Cette tradition funeste inclut aussi des candidats présidentiels, comme Robert F. Kennedy en 1968, et George Wallace.
“ Cette violence politique est consubstantielle à l'histoire politique des États-Unis. Elle est souvent liée à la question raciale, selon moi. C'est-à-dire qu'il y a quand même cet héritage de l'esclavage, qui était un système éminemment violent, mais surtout de la ségrégation, qui a été la période post-guerre de sécession” , poursuit Anne-Lorraine Bujon.
Malgré les épisodes quotidiens de violences aux États-Unis, y compris ceux impliquant Donald Trump, le débat sur la régulation des armes à feu peine à progresser. Le Congrès reste profondément divisé, avec une majorité républicaine fermement opposée.
“ Le débat va forcément ressurgir, mais je doute qu’il débouchera sur des lois de régulation des armes à feu. La Cour suprême a pris des décisions, d'ailleurs, qui ne vont pas dans le sens de la restriction des armes à feu” , conclut Anne-Lorraine Bujon.
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