La compassion pourrait-elle être un baume versé sur les plaies, comme l’écrivait Etty Hillesum ?
Lors d’une épreuve vécue par un proche, on voudrait soulager la douleur de l’autre, le rejoindre dans sa souffrance pour l’aider à porter sa croix. Mais attention, la compassion, même si elle est innée, demande plusieurs compétences. L’envie seule d’aider l’autre ne suffit pas toujours.
Les origines de la compassion
L’origine de ce concept trouve ses sources dans le bouddhisme, qui prône la compassion comme une compétence permettant de faire face à la souffrance. La compassion joue un rôle majeur dans l’histoire de l’évolution de l’homme, comme l’explique Marine Paucsik, psychologue clinicienne et invitée d'Anne-Laure Drouard Chanel. Elle nous permet de prendre soin des individus, même les plus vulnérables.
La compassion garantit la sécurité physique, mais aussi l’affection, la tendresse et l’amour. Elle est aussi une passerelle sociale entre les individus, car elle permet un contact amical et profond avec autrui. C’est la compassion qui permet la communauté. La connexion à l’autre et l’inter-dépendance nourrit le sentiment d’appartenance à un groupe, qui est un besoin vital à l’homme.
Le concept est ancien puisqu’il est à l’origine même de l’humanité, mais connaît depuis récemment une nouvelle jeunesse. De nombreux thérapeutes travaillent et font travailler leurs patients sur cette vertu qui aide à l’accomplissement personnel : c’est en se tournant vers les autres que l’on parvient à se trouver soi-même.
Marine Paucsik définit la compassion tout d’abord comme une motivation qui nous pousse à écouter la souffrance de l’autre en ayant l’intention de l’apaiser. Contrairement à l’empathie, la compassion ne consiste pas seulement à imaginer cette souffrance. Elle implique un véritable engagement personnel pour tenter d’apporter du réconfort.
La compassion est mère de plusieurs qualités, parmi lesquelles la bienveillance, la gentillesse, l’empathie, le non-jugement. L’ensemble de ces qualités est nécessaire et elles doivent être réunies afin de compatir pleinement avec la tristesse ou les émotions difficiles vécues par l’autre. La compassion est innée, elle nous est donnée par notre environnement familial et notre éducation. Mais elle peut se développer.
Selon Marine Paucsik, pour donner de la compassion il faut se connecter à la souffrance d’autrui et mettre concrètement en place des moyens pour le soulager et l’aider à traverser ses émotions. Mais cela n’est possible que si on est prêt à cet engagement. Avant de donner de la compassion, il faut donc être à l’écoute de soi, et être capable d’auto-compassion afin de connaître ses propres limites afin de ne pas s’oublier soi-même. Le danger de la compassion portée exclusivement sur autrui : ne pas tenir dans la durée, puisque c’est en puisant dans nos propres ressources que l’on peut réconforter.
Recevoir la compassion, c’est accepter de recevoir de l’aide, se montrer vulnérable. Cet aspect-là n’est pas valorisé dans notre société où l’on redoute le jugement et l’inter-dépendance selon Marine Paucsik. Il faut faire preuve d’humilité pour donner et recevoir la compassion, mais avant tout d’une bonne connaissance de soi pour cerner nos besoins et nos ressources.
La compassion s’éduque, se travaille et se développe. Plusieurs compétences sont nécessaires pour entrer dans un processus de compassion : identifier les émotions de l’autre, les nôtres, accepter leur présence. Observer les gestes de l’autre, son regard, le ton de sa voix pour analyser son état d’esprit. Pour rassurer l’autre et lui donner un sentiment de sécurité, je dois d’abord m’apaiser moi-même.
Pour nous aider, plusieurs programmes se sont développés ces dernières années. La thérapie fondée sur la compassion par exemple, aide à développer l’auto-compassion, le fait de donner de la compassion et d’en recevoir. Elle permet le travail sur la respiration, sur l’apaisement et la tranquillité interne pour pouvoir se connecter à l’autre en toute sérénité, et dans la durée sans s’essouffler.
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