10 ans après la mort de Stéphane Hessel, le 27 février 2013, ses mots empreints de sagesse et d’altruisme résonnent encore. Résistant, déporté, diplomate, cofondateur de l’organisation des Nations Unies, il a participé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits humains. Son essai "Indignez-vous !" en 2010, a été vendu à plus de 4 millions d'exemplaires. RCF vous propose de réentendre la voix d'un homme qui a su dire non au nazisme et aux violations des droits de l'homme. Et qui nous invite à nous indigner encore quand la justice et l'humanisme sont menacés.
Il était de ceux qui rayonnent et suscitent l’admiration. Mais aussi de ceux qui gardent une grande humilité. Quand on lui demandait ce qu’il pensait du qualificatif "sage" qu’on lui attribuait souvent, Stéphane Hessel répondait avec humour : "C’est très exagéré car je ne suis pas du tout ça, je suis aussi dissipé. Si on parle de sagesse c’est parce que j’ai beaucoup vieilli et que je ne suis plus un ambitieux qui veut conquérir une place. Ce qui maintenant m’importe le plus est d’essayer de communiquer ce que j’ai appris dans cette longue vie et de le rendre perceptible à des gens très jeunes qui sont en train d’aborder un monde difficile."
Des choses à transmettre, Stéphane Hessel en avait beaucoup. À commencer par son témoignage. Lui l’Allemand, naturalisé français en 1937, dont la vie a basculé en 1939. Quand il a été mobilisé contre son pays d’origine - mais sans cas de conscience, car "c’était une Allemagne que je répudiais", disait-il - avant de rejoindre la résistance en 1941 de l’autre côté de la Manche.
Renvoyé en France en mars 1944 pour préparer le débarquement, Stéphane Hessel a été dénoncé et arrêté par la Gestapo en juillet. La torture qu'il a subie pendant un mois, il en parlait avec une philosophie étonnante : "Si on vit un moment douloureux et que l’on sort sans avoir parlé, sans avoir trahi, c’est une satisfaction. J’ai la chance extraordinaire de ne pas avoir parlé sous la torture !"
Stéphane Hessel a ensuite été déporté dans les camps de concentration de Buchenwald et Dora. Par quatre fois, il s’est échappé et a évité la pendaison. Des victoires personnelles qui l’obligèrent à témoigner. "C’est ma responsabilité, affirmait-il, quand on a réussi à être le vainqueur dans une situation aussi dramatique, il faut essayer d’utiliser cette victoire pour transmettre à ceux avec lesquels on va être en contact, la nécessité de résister de façon responsable.
La résistance reste une position à prendre dans le monde chaque fois que quelque chose vous indigne, vous scandalise
Résister, voilà un mot qui gardait encore tout son sens pour le militant, même des années après la fin de la Seconde Guerre mondiale. "La résistance reste une position à prendre dans le monde chaque fois que quelque chose vous indigne, vous scandalise", disait-il.
La déformation de la politique, de la finance et de l’économie mais aussi les nationalismes ou les déviations de la démocratie... Autant de causes pour lesquelles Stéphane Hessel croyait qu'il fallait lutter. Mais il n'a cessé d'encourager à résister face à "la précarisation de la Terre". "Nous sommes engagés dans un processus qui, si on n’y met pas un terme en résistant, peut aller assez vite vers l’impossibilité pour l’espèce humaine de continuer à vivre sur cette planète."
Ma vie, je voudrais la clôturer avec la satisfaction d’avoir eu l’extraordinaire chance de vivre
Lucide, Stéphane Hessel semblait pouvoir prédire l’avenir. Notamment lorsqu’il évoquait les flux de migrations à venir. Une question qu’il connaissait bien puisque l’intégration des personnes réfugiées et immigrées faisait partie de ses nombreux combats en tant que diplomate. En 2008, lors de son interview sur RCF, il disait : "Ces afflux [de réfugiés], il faut les considérer comme des événements naturels. Ils ne sont d’ailleurs encore que les débuts de flux migratoires dans le monde entier qui vont devenir plus importants au fur et à mesure qu’avec le réchauffement de la planète, nous risquons d’avoir des régions entière du monde où il sera difficile de vivre."
C'est aussi en sage clairvoyant, que le cofondateur des Nations unies se tenait devant la mort. "Il me semble que la naissance nous fait sortir d’un sommeil et que la mort nous replonge dans ce sommeil, disait-il, l’essentiel est que cette vie soit restée un beau rêve... Ma vie, je voudrais la clôturer avec la satisfaction d’avoir eu l’extraordinaire chance de vivre."
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