Ces derniers mois, la vieillesse est au cœur des débats politiques et sociétaux. Entre la réforme des retraites, la convention citoyenne sur la fin de vie et le scandale des Ehpads l’an dernier, le troisième âge est en train de devenir l’une des préoccupations de notre pays, en proie au vieillissement de sa population. Dans ce contexte, il devient essentiel de réenvisager notre rapport à la vieillesse et d’en faire un sujet pour toutes les générations.
70 ans après le baby-boom, l’heure est désormais au "papy-boom". Les quelque 850.000 enfants qui naissaient chaque année entre 1946 et 1950 ont désormais des cheveux blancs. Dans le même temps, la fécondité a baissé et la population ne se renouvelle plus autant. Yann Lasnier, délégué général des Petits frères des pauvres le sait bien et le répète souvent aux jeunes en service civique : "Il faut créer les conditions pour que les jeunes s’habituent à vivre dans une société d’aînés... parce que la jeunesse ne sera pas majoritaire dans ce pays".
Pourquoi parler des jeunes alors que c’est la vieillesse qui nous intéresse ici ? Eh bien parce qu’il y a toujours eu un "pacte tacite entre les générations", d’après Yann Lasnier. Et face à la démographie actuelle, "nous avons à bâtir des nouvelles formes de solidarité intergénérationnelles", insiste-t-il. D’autant plus avec les changements de mentalités. En effet, les retraités actuels avaient entre 15 et 20 ans lors de mai 68 et certains d’entre eux ont donc « un rapport à la liberté totalement différent », estime Yann Lasnier.
Nombre de retraités ou personnes en passe de le devenir plaident désormais pour plus d’autonomie. D’après une enquête IFOP de 2019, 85% des Français souhaitent vieillir à domicile. "C’est très bien le virage domiciliaire, réagit Yann Lasnier, mais si les aides à domicile restent dans des statuts aussi mauvais, si la crise des vocations perdure et si les domiciles ne sont pas adaptés, eh bien le virage domiciliaire sera un mirage domiciliaire".
Et cette question d’articulation entre l’autonomie souhaitée et la solidarité entre les générations est justement l’une des questions majeures en matière d’éthique. "Ces questions-là sont à prendre en compte dans un corps social mais il est extrêmement fragilisé", constate le Père Bruno Saintôt, jésuite, directeur du département d’éthique biomédicale du Centre Sèvres. Heureusement "tout n’est pas fichu" d’après lui, car "certaines personnes ouvrent la voie vers de nouveaux modèles de cohabitation intergénérationnelle notamment".
S’il n’est pas encore question de "guerre de générations" comme on l’entend parfois, le délégué général des Petits Frères des Pauvres prévient : "Si nous n’y prenons pas garde elle existera demain." Pour palier cela, il appelle à sensibiliser les jeunes à la lutte contre l’âgisme, c’est-à-dire la discrimination et l’invisibilisation liées à l’âge, dont sont victimes notamment certaines personnalités publiques. Et Yann Lasnier d’espérer que la loi grand âge et autonomie qui "a été l’arlésienne du premier quinquennat" d’Emmanuel Macron revienne enfin au cœur des discussions dans le but, dit-il, de "bâtir de nouvelles formes de solidarités intergénérationnelles".
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