Jusqu’au 18 décembre, 32 pays du monde s’affrontent à l’occasion de la grande et prestigieuse compétition qu’est la Coupe du monde de la Fifa. Si les différentes polémiques qui pèsent sur son organisation au Qatar risquent de faire (légèrement) baisser le nombre de téléspectateurs, il n’en reste pas moins l’un des événements les plus regardés au monde. Preuve que le football a conquis le monde, depuis sa création au Moyen Âge jusqu’à aujourd’hui.
Eh oui, c’est une chose peu connue, mais le football est aussi vieux que les rois de France ! Il est apparu en Grande-Bretagne et en Normandie dès le Moyen Âge. "Des jeux populaires de ballons ronds sont pratiqués, ils sont extrêmement ritualisés et se jouent durant le mardi gras", raconte Mickaël Correia, qui y voit déjà un "proto-football" avec deux camps qui s’opposent (deux paroisses ou deux villages). Ces jeux ont un rôle politique, car ils servent à "renforcer la cohésion sociale", à une époque où les paysans exploitent les terres ensembles, rappelle l’auteur de "Une histoire populaire du football", paru aux éditions La Découverte en 2018.
Mais ce nouveau loisir n’est pas vu d’un bon œil par les pouvoirs ecclésiastique et royal, qui essaient de l’interdire non sans difficulté. C’est finalement la privatisation des terres agricoles qui y mettra un coup d’arrêt en privant les paysans de terrains sur lesquelles jouer. Ce n’est qu’aux XVIIIe et XIXe siècles que le football refera son apparition dans les Public Schools, des écoles privées destinées à former l’élite. À l’aube de la révolution industrielle, les enseignants voient dans ce sport "un opportunisme pédagogique", explique le journaliste : "On a besoin de former cette jeunesse bourgeoise à être les futurs grands patrons des industries, et de leur inculquer de nouvelles valeurs comme l’esprit d’initiative, de compétition ou le virilisme."
Le football devient alors un sport aristocratique, au même titre que le tennis ou le cricket. Un nouveau basculement interviendra ensuite, lorsque les patrons vont vouloir à leur tour inculquer ces valeurs aux ouvriers afin de les occuper et de les détourner des pubs et de l’envie de se syndiquer. Mais "ça devient tellement populaire, que ça a contribué à créer une vraie culture chez les prolétaires", commente Mickaël Correia. Issus de l’exode rural, ces ouvriers y voient en effet un moyen de refaire communauté. Les premiers championnats en Angleterre émergent à la fin des années 1880 et rapidement les ouvriers qui s’entraînent beaucoup ont des revendications. Ils obtiennent quelques billets des patrons en compensation.
Le colonialisme britannique va contribuer dans un premier temps à diffuser ce sport rapidement, en l’inculquant "dans une optique de civiliser les indigènes et de disciplinariser les corps", explique le journaliste. Plus tard, ce seront les régimes totalitaires qui l’instrumentaliseront. "Ils comprennent la puissance de mobilisation de la population et vont s’en servir à des fins politiques." Mais cette propagande n’est pas sans revers puisque des réseaux de résistance se créent à l’intérieur même de certains clubs, comme le réseau Sport libre.
D’abord joué par les paysans, le football est donc passé dans les mains des grands patrons industriels avant d’être réapproprié par la classe ouvrière ; puis par les régimes totalitaires. Aujourd’hui et depuis l’industrialisation du football, ce sport est désormais dans l’ère du "foot business". Non seulement les joueurs sont payés des prix faramineux, mais les prix des places et des abonnements ont également augmenté, constate Mickaël Correia, ce qui empêche les classes plus modestes de se rendre au stade régulièrement.
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