La reine Victoria est morte il y a 120 ans. Synonyme de rigueur et d'austérité des mœurs, l'ère victorienne est une période phare de l'histoire de l'Angleterre. Son règne de plus de 63 ans n'a pas tellement modifié la condition féminine dans la société britannique du XIXe siècle. Victoria était pourtant bien moins conformiste qu'on ne le pense... Le spécialiste Neil Davie, professeur de civilisation britannique, dresse son portrait.
Quand on pense à la reine Victoria, on pense à l’ère victorienne. Une époque mondialement connue aujourd’hui, notamment grâce aux écrivains célèbres comme Dickens, Oscar Wilde, George Eliot ou les sœurs Brontë. Victoria, c’est d’abord un règne les plus longs de l’histoire de l’Angleterre, un record de longévité battu en 2015 par Elisabeth II. Si sa mort a tant marqué les esprits, c’est qu’alors "beaucoup n’avaient pas connu d’autre monarque", explique Niel Davie.
L’Angleterre a beaucoup changé en près de 64 ans de règne. Et l’ère victorienne, c’est aussi celle de la révolution industrielle et de l’urbanisation massive. "L’Angleterre des années 1830 est très différente de l’Angleterre au début du XXe siècle." Le pays a connu une formidable expansion coloniale - Victoria a été sacrée impératrice des Indes en 1876 - qui lui a donné une place de choix sur le plan économique. Mais la renommée de la reine Victoria est étonnante, finalement, si l’on considère que le Royaume-Uni est une monarchie constitutionnelle. Et que le pouvoir du souverain est assez relatif. "De toute évidence, la reine Victoria a essayé d’avoir une influence sur ses ministres..."
Quand, en 1837, Victoria monte sur le trône, c’est une toute jeune femme de 18 ans qui se trouve à la tête de l’une des plus grandes puissances du monde. Elle doit faire ses preuves, dans une société et à une époque où l’on considère "que les femmes n’ont pas les mêmes capacités intellectuelles que les hommes".
Une femme sur le trône d’Angleterre : cela a provoqué "beaucoup de débats dans l’Angleterre du XIXe siècle". À cette époque, il y avait certes une petite marge de manœuvre pour les femmes, mais la société était largement patriarcale - les femmes perdaient leurs propriétés à leur mariage jusque vers 1870, 1880. Curieusement, la place qu'a occupée Victoria n’a pas modifié celle des femmes dans la société anglaise du XIXe siècle.
La société victorienne est synonyme de rigueur, voire d’austérité dans les mœurs. À voir l’air sombre et sévère de la souveraine sur ses photographies, on pense volontiers que Victoria était quelqu’un de rigide, de très strict. Or, "c’était quelqu’un qui aimait rire, qui aimait les fous-rires - elle disait ce mot en français", précise Niel Davie. Victoria était "beaucoup moins figée" qu’on ne le croit.
Victoria a même eu des comportements surprenants pour l’époque, et qui on pu choquer. Après la mort de son mari elle s’est liée d’amitié avec un domestique écossais, John Brown. "Il y a plusieurs relations de ce type dans sa vie." Neil Davie évoque "un côté anti-conformiste", même s’il ne faut pas tomber dans l’excès inverse et la qualifier de rebelle.
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