Le ciel dans la tête est un récit initiatique, un voyage au bout de l’enfer pour un jeune congolais du Kivu. Un roman graphique magnifique édité par Denoël Graphic à retrouver dans la chronique BD de Stéphanie Gallet.
Attention chef d'œuvre, Le ciel dans la tête est un récit initiatique, un voyage au bout de l’enfer pour un jeune congolais du Kivu. Un roman graphique somptueux porté par des dessins qui dansent sur une ligne ténue entre poésie et réalisme politique.
Nivek a 12 ans et quand l’histoire commence il est au fond d’un trou. Petit travailleur exploité dans une mine de coltan, il a glissé et risque de mourir enseveli mais les autres enfants vont le sauver. Ici, ils ne sont que des esclaves dont la vie est bien moins précieuse que le minerai qu’il recherche. Pour échapper à la sentence de mort de ses bourreaux, qui ne supportent pas que son accident ait ralenti la cadence, il accepte de devenir kadogo, enfant soldat.
Les débuts de cette histoire sont très durs, j’ai failli arrêter mais Nivek n’est pas seul : il a un ami, Joseph. C’est déjà lui qui l’a sauvé lors de l’éboulement de la mine, c’est avec lui qu’il va s’enfuir loin des miliciens. Joseph sait vivre dans la forêt. Son père lui a appris à grimper dans les arbres, à nager, à reconnaître les plantes et tout cela, il va le transmettre à Nivek.
Ainsi il en va tout au long de cet album, des pages très dures, très documentées sur la migration de ces jeunes gens à travers l’Afrique pour rejoindre l’Europe, alternent avec des séquences plus oniriques. Elles tiennent parfois du conte et racontent une Afrique mystérieuse et magique. Mais très vite, Nivek doit reprendre la route et la réalité toujours plus cruelle revient.
Après la guerre, après la foret, il y aura le désert, l’esclavage en Lybie, la traversée de la Méditerranée et enfin l’Europe.
Heureusement sur cette route Nivek croisera des personnes qui lui feront confiance, son ami Joseph, les pygmées de la forêt, le vieux sorcier Delwa et puis la belle Aisha. Tous l’aideront à grandir. Tous lui apporteront consolation, car il n’est pas le tueur que les miliciens ont voulu faire de lui.
Cette histoire n’est pas une belle histoire, c’est une histoire terrible. En Septembre dernier on décomptait que 2500 personnes avaient trouvé la mort en Méditerranée depuis le 1er janvier 2023. Je n'ai pas trouvé de chiffres plus récents. Pour réaliser cet album, les auteurs se sont appuyés sur le travail de l’association Jambo qui accompagne de jeunes migrants.
Le ciel dans la tête raconte les rêves d’un gamin qui n’aspire qu’à vivre. L'histoire d'un enfant courageux qui pour arriver en Europe va affronter les pires épreuves et d'abord et avant tout l'infini cruauté des hommes. Il raconte aussi la profondeur des traumatismes vécus par ces enfants soldats. En les transformant en tueur, c'est une partie d'eux même qui a été tuée. Et les dessins représentant Nivek en position fœtale, comme pour retrouver le petit enfant innocent qu'il était, sont bouleversants.
Antonio Altariba signe le scénario au souffle épique du Ciel dans la tête. Une histoire très dure portée par la beauté et la douceur des dessins de Sergio Garcia Sanchez. Merci à eux de nous embarquer dans cette histoire terrible. Leur livre est un hommage au courage de ces enfants sacrifiés, à la bonté de ceux qui acceptent de les accompagner et en premier lieu, le Dr Mukwege celui qui répare les femmes et que notre héros croisera au début de sa route. C’est aussi un hymne à la beauté des paysages africains et à la culture ancestrale de ces peuples.
Le ciel dans la tête est publié chez Denoël graphic
Une sélection de bandes dessinées proposée par Stéphanie Gallet.
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