Liège
Le 1er juillet 2018, la grande toile qui ornait le maître-autel de l’église paroissiale Sainte-Catherine, rue Neuvice à Liège, s’est effondrée sous son propre poids. Cet accident s’est en quelque sorte avéré providentiel, car il a permis une restauration que personne n’osait espérer auparavant, étant donné la taille et l’encrassement du tableau, le plus grand qui ait jamais été peint à Liège sous l’Ancien Régime. Voyons la genèse de ce tableau, son sujet et faisons connaissance avec son auteur, Théodore-Edmond Plumier (1671-1733), ultime surgeon de la grande école liégeoise du XVIIe siècle.
L’ancienne église Sainte-Catherine a disparu dans le bombardement du centre de Liège par les troupes françaises du général de Boufflers en juin 1691. Au maître-autel de cette église se trouvait un triptyque du Martyre de sainte Catherine, oeuvre majeure qui avait été réalisée, entre 1624 et 1630, par Gérard Douffet, le père fondateur de l’école liégeoise. La nouvelle église semble avoir été rapidement reconstruite puisque son maître-autel baroque date des environs de 1703. Celui-ci devra toutefois attendre plus de vingt ans avant de se voir orner d’un retable. C’est à nouveau le martyre de la sainte patronne de l’église qui a été représenté.
Ce n’est que grâce à sa restauration, entre novembre 2019 et juin 2022, que ce tableau est devenu lisible. Il était tellement crasseux que le sujet lui-même n’était pas tout à fait certain. Celui-ci évoque le moment où l’ange divin foudroie les roues qui devaient déchiqueter le corps de Catherine, vierge d’Alexandrie convertie au christianisme, et où les bourreaux sont décimés devant des assistants en effroi au pied d’un temple dédié à Apollon. La restauration a fait apparaître la signature de Théodore-Edmond Plumier et la date de 1726. Elle a permis de confirmer que cette grande toile de plus de 6 mètres de haut était un des chefs-d’œuvre de l’école liégeoise. C’est à ce titre qu’elle a été classée au titre de Trésor de la Communauté française.
Comme leurs prédécesseurs l’avaient fait dans les années 1620, les fabriciens de Sainte-Catherine des années 1720 se sont adressés à l’un des peintres locaux les plus prestigieux de leur temps. Pourtant, Théodore-Edmond Plumier reste relativement peu connu, malgré la trentaine de tableaux conservés portant sa signature et une date. Il aurait été l’élève d’Englebert Fisen, le dernier grand peintre maître du XVIIe siècle ; voilà qui confirmerait que Plumier se situe dans la lignée des grands maîtres locaux du siècle précédent. L’artiste se serait rendu ensuite à Paris puis à Rome. On le retrouve dans la capitale française, à la charnière des XVIIe et XVIIIe siècles, à la tête d’une manufacture de tapisseries située au faubourg Saint-Antoine.
Son plus ancien tableau connu est la Dernière Cène qui orne un autel latéral de l’église Saint-Barthélemy à Liège. Il porte la date de 1708, ce qui est déjà bien tardif - le peintre a trente-sept ans. On ne sait rien de sa production de jeunesse. Ses tableaux de maturité se ressentent encore de l’Italie, tandis que les portraits, dont il s’était fait une spécialité, semblent plutôt marqués par l’influence des grands maîtres français du genre.
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