Mannequin devenue photographe de mode puis photographe de guerre, Lee Miller est aujourd’hui célébrée. Ses photos sont présentées actuellement aux Rencontres photographiques d’Arles mais aussi dans une très belle exposition à Paris sur les femmes photographes de guerre...
Le qualificatif s’impose, sans aucun doute. Elle s’appelle Lee Miller. Elle est née aux États-Unis en 1907. Elle est décédée, 70 ans plus tard, en Angleterre. Cette femme, très belle, a été d’abord mannequin, puis photographe de mode, elle participe au mouvement surréaliste, devient reporter de guerre dans l’Europe dévastée de 1944-1945, et ses dernières années seront consacrées à créer des recettes de cuisine dans sa maison du sud de l’Angleterre.
Lee Miller est aujourd’hui célébrée. Ses photos sont présentées actuellement aux Rencontres photographiques d’Arles mais aussi dans une très belle exposition à Paris sur les femmes photographes de guerre dont j’ai eu l’occasion de parler dans cette chronique au mois de mai dernier. La biographie écrite par son fils, Anthony Penrose, vient d’être rééditée ainsi que les textes de ses reportages de guerre. Un film biographique va bientôt lui être consacré.
Elle avait une volonté et un culot incroyables. Vers 1930, à Paris, elle sonne à la porte du célèbre photographe Man Ray avec qui elle veut apprendre le métier et lui dit : bonjour je suis votre nouvelle assistante. Il se récrie : mais je ne veux pas d’assistante ! Et pourtant elle deviendra bien son assistante. Bon, il n’était certainement pas facile de résister à une femme d’une telle beauté.
Il fallait aussi beaucoup de culot en 1944 pour convaincre le magazine Vogue, où elle réalisait des photos de mode et des reportages mondains, de l’envoyer couvrir les derniers combats de la seconde guerre mondiale en France et en Allemagne. Quand un responsable militaire lui a demandé comment elle voulait travailler, étant une des rares femmes parmi beaucoup d’hommes, elle répondit : "Just treat me like one of the boys" ("Traitez-moi comme l’un des garçons").
Son travail publié dans Vogue est très impressionnant. Beaucoup de photos de femmes, le lectorat étant féminin. Notamment des femmes tondues à Rennes, la fille du maire de Leipzig, suicidée avec toute sa famille, deux Allemandes sur un banc au milieu des ruines de Cologne... Et puis des images terribles prises dans les camps de Buchenwald et de Dachau où elle a été une des premières parmi les journalistes à entrer. Elle en fut marquée au point d’interdire à son fils d’avoir un ami allemand.
Elle a été victime d’un abus sexuel durant sa jeune enfance et souffert, pour cette raison d’une maladie vénérienne pendant plusieurs années. Cela peut expliquer pour une part l’instabilité dans laquelle elle a ensuite vécu. À la fin de la guerre, elle a subi une très grave dépression, sans doute un syndrome post-traumatique. Elle n’a dès lors plus été sollicitée comme photographe. Cela ne se serait peut-être pas passé de la même manière pour un homme aussi talentueux qu’elle. Sa fin de vie a été assez triste même si elle était très aimée par son mari, l’écrivain et peintre surréaliste Roland Penrose.
Je parlais au début de cette chronique des rencontres d’Arles. Elle y fut invitée en 1976. Mais c’était pour rendre hommage à Man Ray, pas pour son propre travail. L’injustice est aujourd’hui réparée.
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