On parle de plus en plus du surtourisme, c'est-à-dire de la saturation des sites touristiques. Des taux de fréquentation qui inquiètent certains, notamment pour ses impacts sur l'environnement, et qui interrogent : pourquoi faut-il aller là et pas ailleurs ? Qu'est-ce qui se joue à travers le voyage touristique ?
Les calanques de Marseille, l'île de Porquerolles dans le Var, les aiguilles de Bavella en Corse... Désormais en pleine saison, des quotas viennent réguler la fréquentation touristique de certains sites. Comment est-on passé d'un plaisir réservé aux élites de la société britannique au tourisme de masse puis au phénomène du surtourisme ? Réponses de Jean- Didier Urbain, anthropologue et auteur de "L'envie du monde" (éd. Bréal, 2011).
L'artiste Martin Parr en a fait l'une de ses spécialités : photographier les touristes. Cette espèce très particulière de voyageurs devenus les rois du selfie ! À voir le tourisme de masse aujourd'hui on est très loin de la fin du XVIIIe siècle, quand seuls les jeunes gens de la bonne société britannique effectuaient leur "tour" d'Europe. Une façon de voyager sans nécessité ni contrainte professionnelle qui trouve ses prémices au XVIe siècle.
→ À LIRE : "Surtourisme", la saturation des lieux touristiques est-elle inévitable ?
"Le voyage est un genre : le tourisme est une espèce de voyage bien particulière." Pendant des siècles voyager était "une cruelle expérience, voire une expérience mortelle, dictée par la nécessité". Pour beaucoup de personnes aujourd'hui dans le monde c'est encore le cas. Mais les flux de populations se croisent et se caractérisent. "Le tourisme vise l'édification personnelle du voyageur, son rapport au monde, l'amélioration de son rapport au monde, l'extension de sa connaissance." Avec cette idée que l'on est "bien avec le monde parce qu'on le connaît toujours davantage". Comme dit le sociologue, c'est l'histoire "de la rencontre du voyage et du plaisir".
Peut-être qu'au bout de tout voyage on cherche le lieu où rester...
Pourquoi est-ce que tout à coup un lieu attire les touristes alors que d'autres se voient désertés, voire évités ? Certes il y a des indétrônables comme Venise. Mais si vous prenez le lac de Côme, avant George Clooney on y était plus au calme en été ! La puissance des imaginaires... Et pour Jean-Didier Urbain, il y a quelque chose qui se joue au-delà du simple fait de voyager. Comme un rêve de s'installer mais qui ne dit pas son nom. "Peut-être qu'au bout de tout voyage on cherche le lieu où rester..."
Chaque année 30 à 35 millions d'individus se regroupent sur les plages, soit sur 4% de la surface de notre territoire : comment expliquer cela ? "La société, à travers le tourisme, nous dit aussi bien ses désirs que ses phobies." Aller à la plage, voir la mer, s'exposer au soleil : pour le sociologue c'est trouver ce dont on manque tout au long de l'année. Sur les plages, quoi qu'on en dise "il y a très peu de conflits" et les gens reviennent chaque année.
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