Il est l'un des pédopsychiatres les plus connus de France, grâce à ses nombreuses apparitions télévisuelles et aussi ses nombreux livres. Mais en écoutant Marcel Rufo, on se dit que c'est aussi son style qui séduit, une façon de dire des paroles fortes, parfois directes, qui ne heurtent pas car elles sont dites avec bienveillance. D'ailleurs c'est un peu son leitmotiv au sujet des enfants : "Grondez-les, avec bienveillance"...
Un enfant, c'est "un transgresseur qui passe son temps à essayer de rompre les contrats", selon Marcel Rufo, qui plaide pour l'autorité. Il croit aussi "beaucoup à l'intégration d'enfants porteurs de handicap", qui "fait des générations plus intelligentes que celles qu'on a été" et permet aux enfants "de sentir que la différence est équivalente en qualité relationnelle".
Marcel Rufo plaide aussi pour "un débat de vérité vis-à-vis de l'enfant". Avec un couple sur deux qui divorce, et ce chiffre terrible qui est que "un couple de trentenaires n'a que 30% de chances d'être encore ensemble au bout de trois ans", sans doute faudra-t-il admettre que "l'enfant est en souffrance". "L'autorité est proche de la vérité, de la loyauté, de la politesse, de la galanterie, c'est quand même un joli truc !"
Comment en est-il venu à consacrer sa vie aux enfants et aux adolescents ? Fallait-il que la sienne d'enfance ait été si belle ou au contraire si terrible ? En réalité lui-même se "pose encore la question" ! Né en 1944, enfant unique, il a grandi à Toulon, où ses parents étaient marchands de fruits et légumes. Dans son milieu il est devenu un symbole de réussite sociale. "Je devais réussir", confie-t-il, tout en admettant que cela aurait très "lourd" si ça n'avait pas été le cas.
Sa réussite professionnelle, il la doit à ses "patrons", ces grands spécialistes qu'il admirait. Comme Henri Gastaut, inventeur de l'électroencéphalographie, qui l'a attiré vers la neurologie ; le Pr René Bernard, qui l'a conduit vers la pédopsychiatrie ; et enfin Arthur Tatossian psychiatre et "phénoménologue génial", qui a pris Marcel Rufo "sous son aile". Mais c'est aussi le décès de l'un de ses petits patients, Michel, qui a fait basculer Marcel Rufo de l'oncologie vers la pédopsychiatrie. C'était trop insoutenable pour lui de voir mourir des enfants.
"Nous sommes la première génération à voir dans l'enfant une personne à part entière et nous ne pouvons plus ignorer que l'enfance est la matière même dont nous, adultes, sommes tissés."
Marcel Rufo, "Dictionnaire amoureux de l'enfance et de l'adolescence" (éd. Plon)
Lui qui aurait aimé être journaliste sportif - parce qu'à Toulon, le rugby, c'est quelque chose ! - choisirait sans hésiter pédopsychiatre, si c'était à refaire. Parce que dans ce métier, "on apprend toujours." La preuve, ce n'est que tout récemment que l'on sait que l'enfant est... une personne ! "L'enfant est une découverte du XXe siècle", écrit-il, c'est fini l'enfant-bouche-à-nourrir-et-à-évacuer-des-matières !"
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