Depuis quelques années, les Ehpad font l’objet de plusieurs débats relatifs à la gestion de leurs financements, des cas de maltraitance des résidents ou de négligence. Comment rétablir la confiance ? Une émission Je pense donc j’agis présentée par Melchior Gormand.
Depuis la sortie du livre de Victor Castanet "Les Fossoyeurs" chez Fayard, les Ehpad en France sont au cœur d'une série de controverses et de crises de confiance. Les témoignages de familles, les enquêtes journalistiques et les rapports d'organismes de contrôle ont mis en lumière des dysfonctionnements majeurs : maltraitance, manque de personnel, conditions de vie déplorables ou des gestions financières douteuses. Des révélations qui ont suscité une profonde inquiétude et une perte de confiance envers ces institutions, pourtant essentielles pour la prise en charge de nos aînés.
Le 3 octobre 2023, une femme a déposé plainte pour les mauvais traitements qu'aurait subi sa grand-mère de 96 ans dans un Ehpad privé du groupe Emera. Le parquet de Bordeaux a ouvert une enquête pour "violences habituelles sur personne vulnérable". Des affaires comme celle-ci, qui accusent les Ehpad, se sont multipliées ces dernières années et ont aggravé la défiance que les gens ont envers ces établissements et leur personnel : "les casseroles que traînent les Ehpad ne font pas de bonnes pubs aux établissements", explique Serge Guérin, sociologue, spécialiste de la vieillesse et auteur du livre "Et si les vieux aussi sauvaient la planète ?", chez Michalon.
Dans plus de 30 % des établissements, il n’y a pas de médecin.
Les problématiques qui touchent le domaine des Ehpad sont aussi dues aux mauvaises gestions économiques : "ma mère est en établissement et c’est n'importe quoi. Ça coûte déjà cher et en plus, on reçoit des factures pour des choses qu’on n'a pas faites. Le directeur ne sait même pas s'il y a un kiné dans le service", déplore Yves, un auditeur fidèle de l’émission Je pense donc j'agis. Ces complications peuvent être liées à la crise de personnel que connaissent les Ehpad : "dans plus de 30 % des établissements, il n’y a pas de médecins et seul 25 % des soignants veulent continuer à travailler dans des Ehpad", relate Jingyue Xing-Bongioanni, maîtresse de Conférence en sociologie à l'Université de Lille, membre du Clersé et chercheuse affiliée au CEET.
Les affaires sur les Ehpad ont affecté le personnel soignant.
Bien que 17% des jeunes seraient intéressés par ce domaine, le sociologue Serge Guérin explique que miser sur un renouvellement des effectifs peut être ambitieux : "les affaires sur les Ehpad ont affecté le personnel soignant". Des tendances aggravées par les crises : "durant le Covid, il y a eu un aggravement du turn-over, en particulier chez les médecins", affirme Jingyue Xing-Bongioanni. Enfin, les postes médicaux en Ehpad ne sont pas valorisants, en particulier dans le monde médical : "il y a une hiérarchie implicite des meilleurs postes et spécialités. Chirurgien c’est bien, soignant en Ehpad, moins", analyse la maîtresse de Conférence.
"Je suis en Ehpad avec ma femme et tous les soignants sont compétents et gentils, je pense qu’il faut valoriser ces métiers", explique Pierre, auditeur qui appelle au soutien du personnel soignant. Les métiers relatifs aux Ehpad portent de belles valeurs : "le personnel de ces établissements ne fait pas ça pour l’argent, il y a un aspect humain, altruiste et une vraie envie de se rendre utile", confie Jingyue Xing-Bongioanni. Enfin, ces métiers ne ferment pas toutes les portes : "ce n’est pas rare de monter les échelons jusqu’à devenir directeur", explique Serge Guérin.
Vous avez déjà vécu des manifestations pour les Ehpad ?
Que fait le gouvernement ? L’État est conscient des difficultés des Ehpad, notamment en matière budgétaire, avec un fond de 650 millions d’euros débloqués sur la période 2024 pour soutenir entre autres ces établissements. Cependant, cette aide ne suffira peut-être pas à stabiliser la situation. "Il faut un soutien de l’État au niveau départemental, pour mettre en valeur les métiers des Ehpad", affirme Serge Guérin. La revitalisation de ce domaine passe aussi par une volonté populaire : “c’est au citoyens de faire comprendre aux pouvoirs publics que c’est un sujet important”, rappelle Serge Guérin. "Vous avez déjà vécu des manifestations pour les Ehpad ?", interpelle le sociologue.
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