L'accompagnement médical et humain des personnes en fin de vie a connu ces dernières décennies une évolution considérable. Ce temps si singulier que vivent malades et personnes âgées est marqué bien souvent par la peur, la solitude ou la souffrance. Mais si ces personnes sont accompagnées dignement, par les médecins ou les bénévoles, les relations vécues se révèlent d'une qualité humaine exceptionnelle.
La fin de vie fait l'objet de vifs débats depuis plusieurs décennies en France. Certaines associations et écoles de pensée souhaitent légaliser l'euthanasie ou le suicide assisté et des projets de loi en ce sens reviennent régulièrement à l'agenda des parlementaires.
Dans le même temps, les soins palliatifs ont trouvé une réelle place au sein des établissements hospitaliers depuis leur émergence en France dans les années 90 grâce à l'engagement de plusieurs médecins comme Marie-Christine Grach au Centre de cancérologie François Baclesse de Caen. Comme le Dr Thierry Gandon, elle étudié cette « nouvelle démarche de soins » en Angleterre et au Canada. « Nouvelle », car, comme l’explique le praticien hospitalier au Centre Hospitalier Aunay-Bayeux, « dans notre cursus de formation initiale la personne et la vie n’étaient des sujets forcément abordés ».
Une démarche de soin qui aborde la personne dans sa globalité
Trop souvent, la question des soins palliatifs est résumée à celle de la gestion de la douleur : des soins pour bien nourrir. « Il y a deux mots importants de ce concept, souligne le Dr Grach qui a créé et dirigé le service de soins palliatifs au Centre François Baclesse à Caen, et en premier lieu celui de soins, de prendre soin. » Si la réponse à un besoin du corps humain est fondamentale, elle ne résume pas tout de la mission du médecin. « Mais il y a aussi toute la dimension de l’accompagnement de la personne », ajoute-t-elle. La pris en charge de la personne est globale : physique, psychique et spirituelle.
« C’est une démarche de soin qui engage les professionnels, mais aussi l’entourage, les bénévoles et même la société et qui nous invite à tout un cheminement personnel qui va nous chercher très profondément », précise le Dr Thierry Gandon. Ce que confirme Henri Le Pargneux, bénévole accompagnant à l’ASPEC, l’association des soins palliatifs en Calvados. « On a un positionnement très singulier, ni médecin, ni famille, ni ami, explique-t-il, nous passons. » L’accompagnant va à la rencontre des patients, sans rendez-vous. La proposition de rencontre est acceptée ou plus rarement refusée. Si cette proposition d’écoute « ne sert à rien » au sens prosaïque du terme, cet échange est fondamental car « la qualité de présence » permet au patient « d’emmener l’accompagnant là où il veut aller ».
Des progrès énormes ont eu lieu ces trente dernières années concernant le symptôme douleur
La démarche de soins palliatifs est là pour être à l’écoute de trois peurs fondamentales. « Il y a la peur de souffrir, précise Thierry Gandon, celle d’être abandonné et enfin de ne pas être respecté dans ce qui fait sens dans son histoire. » Si la médecine répond aujourd’hui à l’enjeu de la douleur « dans 95% des cas » précise les deux médecins, la question de la souffrance est plus complexe. Les 5% corresponde à ce qu’on nomme « la douleur rebelle ». « On peut souffrir de solitude tout en étant entouré » précise Henri Le Pargneux. Et parfois la douleur supportable pour choisir la vie varie d’une personne à l’autre. Enfin, dans certains cas, la douleur physique est mélangée à d’autres symptômes comme l’angoisse de mort. C’est la souffrance globale.
La démarche de soins palliatifs implique d’accepter la complexité des situations. Dans un contexte de pression forte – en temps disponible et en budget – l’approche des soins palliatifs est parfois difficile à tenir pour l’hôpital. Et pourtant, les médecins qui y sont engagés, comme les bénévoles des associations comme l’ASPEC ou JAL’mav, témoignent l’immense richesse des moments vécus. « Le chrono du patient rencontré n’est le même que le vôtre et il faut donc ce côté de lenteur qui permet d’ailleurs de mieux écouter », souligne Henri Le Pargneux. Et d’ajouter : « C’est contre-intuitif, mais les moments vécus en soins palliatifs donnent la pêche car la qualité de relation est tellement forte. »
La fin de vie fait débat. Se concentrer sur l'accompagnement des personnes en soins palliatifs permet d'ancrer dans l'espérance le regard porté sur cette question complexe. Mgr Jacques Habert, évêque de Bayeux et Lisieux et Eric de Bonnechose, pasteur de l'EPUF à Evreux et ancien aumônier d'hôpital, ont accepté de dialoguer et de partager leurs points de vue sur cette question. Des points de vue parfois divergents.
Chaque semaine, une question de société est abordée avec un regard chrétien en compagnie d'un spécialiste. De la fin de vie à la laïcité, en passant par la place du silence ou de l'image dans notre société, nous prenons le temps de saisir la complexité du monde.
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