Imran Khan, longtemps connu dans son pays comme capitaine de l’équipe nationale de cricket avant qu’il ne devienne homme politique, parviendra-t-il à revenir au pouvoir en s’appuyant sur la rue ?
En avril dernier, alors qu’il était premier ministre depuis les élections législatives de 2018, il a été renversé par une motion de censure au Parlement, une première dans l’histoire du Pakistan. La motion adoptée de justesse a permis l’accession à la primature de Shehbaz Sharif, membre d’une des grandes dynasties politiques du pays et frère d’un ancien premier ministre, Nawaz, lequel vit en exil à Londres après avoir été condamné par la justice pour corruption.
Depuis son éviction du printemps dernier, Imran Khan ne cesse de réclamer l’organisation d’élections législatives anticipée alors que le mandat du Parlement ne s’achève qu’en août de l’an prochain et surtout, il accuse ceux qui l’ont renversé d’être à la solde des États-Unis, ennemis de la souveraineté du pays selon lui. Une rhétorique anti-américaine récurrente dans la politique pakistanaise et qui trouve de larges échos dans l’opinion publique.
Mais les accusations d’Imran Khan ne visent pas que le premier ministre et ses alliés politiques. Elles ciblent un autre acteur central de la politique pakistanaise depuis l’indépendance du pays en 1947, à savoir l’armée. La rivalité du Pakistan avec l’Inde, autour du Cachemire notamment, mais aussi son immixtion dans la politique de son voisin afghan, expliquent en bonne part ce rôle de tuteur de l’armée sur la vie politique du pays. Les accusations d’Imran Khan contre l’armée peuvent sembler d’autant plus paradoxales que celle-ci avait au moins tacitement approuvé son arrivée au pouvoir en 2018. Mais durant son passage à la tête du gouvernement, les relations d’Imran Khan avec les généraux se sont détériorées. Notamment à propos de sa rhétorique anti-américaine et du refus du commandement de l’armée de le soutenir contre ses rivaux politiques.
Le 3 novembre dernier, Imran Khan a été blessé aux jambes par balles alors qu’il menait une longue marche de ses partisans entre la ville de Lahore et la capitale Islamabad, toujours pour obtenir la tenue d'élections anticipées. Une agression pour laquelle un homme a été arrêté qui a justifié son geste par le langage blasphématoire, selon lui, d’Imran Khan. S’appuyant sur un déambulateur, Imran Khan a fait sa réapparition publique samedi dernier lors d’un grand meeting à Rawalpindi durant lequel il a de nouveau exigé la tenue d’un scrutin.
Entretemps cependant, l’homme politique a perdu en coulisses une autre bataille, celle du choix du nouveau chef d’état-major des armées. Alors qu’il soutenait un général qui avait dirigé l’Inter-Services Intelligence, les redoutés renseignements militaires en charge notamment du dossier afghan, c’est un autre officier qui a été nommé par le premier ministre. Un choix qui, dans le jeu d’ombres de la politique pakistanaise, peut éventuellement peser aussi lourd que des manifestations.
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