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Faut-il aller vite pour avoir le maximum d'impact ? Par Guillaume d'Aboville

Un article rédigé par Guillaume d'Aboville - RCF, le 26 novembre 2024 - Modifié le 26 novembre 2024
Loin des yeux, près du cœurFaut-il aller vite pour avoir le maximum d'impact ?

LA CHRONIQUE DES ENFANTS DU MÉKONG - Quand on parle d'impact, on pense souvent vitesse, instantanéité, résultat immédiat. Ce matin, Guillaume d'Aboville nous invite à repenser nos préjugés, en redécouvrant la force du temps long, la puissance de la fidélité discrète. Pour cela, direction Cebu, aux Philippines, là où la misère côtoie l'espérance. En vingt ans, une décharge est devenue un foyer de vie, d'entraide et d'avenir pour des centaines d'enfants. 

Guillaume d’Aboville © DRGuillaume d’Aboville © DR

Faut-il aller vite pour avoir le maximum d’impact ?

Cela semble être le langage de notre époque. Pourtant, aller vite ne doit pas nous faire oublier la puissance du temps long et de la fidélité. Permettez-moi de vous raconter une belle histoire à ce sujet : Près de la ville de Cebu, aux Philippines, s’étend l’énorme décharge d’Inayawan. Surnommée la "ville des ordures", des milliers de familles de chiffonniers y vivent dans des conditions plus que précaires. Il y a 20 ans, Ate Helen, une Philippine dévouée aux pauvres, interpelle Enfants du Mékong : des jeunes mamans de cette décharge se trouvent déchirées entre garder leurs jeunes enfants ou aller travailler pour gagner les quelques pesos nécessaires à la survie de leur famille.

Avec elle, nous créons Batang Mekong, une petite halte-garderie au cœur de la décharge. C’est une maison toute simple, en bambou, où résonnent les cris de joie d’une vingtaine d’enfants. Deux ou trois bénévoles s’y relaient pour proposer des animations, des repas équilibrés, une sieste et une toilette. Cela peut sembler un détail pour nous, mais pour eux, cela signifie énormément !

Une petite maison qui redonne vie au lieu

Cette petite maison, au cœur de l’enfer, redonne vie au lieu. Année après année, nous bâtissons une deuxième halte-garderie, puis une troisième, et ainsi de suite. Batang Mékong vient d’ouvrir sa neuvième halte-garderie, devenant un véritable lieu de vie pour les femmes d’Inayawan. Le sourire et la détermination d’Ate Helen sont contagieux : elle est inarrêtable, et nous faisons de notre mieux pour la suivre. Les enfants sont parrainés pour pouvoir aller à l’école, et des cours de soutien sont mis en place. Elle ajoute des camps d’été pour occuper les jeunes et les détourner de l’oisiveté. Des services communautaires sont aussi organisés pour nettoyer peu à peu les lieux d’habitation, accompagnés de temps d’échange pour les parents.

En 20 ans, cet enfer est devenu un espace communautaire. Depuis deux ans, la décharge a été déplacée. La verdure reprend ses droits sur les vieilles ordures, et notre joie est immense. Plus de 700 enfants ont été accueillis dans ces garderies et vont aujourd’hui à l’école. Le service des pauvres privilégie la fécondité. La fécondité, c’est le fruit de la fidélité à une action ordinaire qui devient extraordinaire. Cela prend parfois un an, dix ans, une vie, ou une génération entière. Et souvent, cela se fait dans le silence d’une action bienfaisante. Alors oui, pour servir la génération de demain, il faut parfois consacrer une vie entière.

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