LA CHRONIQUE DE JOSEPH THOUVENEL - "Un grand médecin est d'abord un guérisseur qui d'autre part a appris la médecine" affirmait Maurice Druon. Boutade ou réalité ? Sans conteste réalité.
L'étymologie du mot médecin nous le confirme, né au XIVème siècle de l'ancien verbe « médeciner », qui signifie soigner, c'est-à-dire « s'occuper de ». Comment s'occuper d'une personne sans s'y intéresser, sans bienveillance et humanité? Avant la technique, il y a ou il devrait y avoir l'humanité vis-à-vis du souffrant.
La première justification de la médecine, le premier devoir du praticien est d'accueillir, sauvegarder, accompagner la vie de la conception jusqu'à sa fin naturelle. Ce n'est pas exercer un métier comme les autres que de prendre soin du corps et de l'esprit de ses semblables. C'est plonger au cœur du mystère de la vie et de la mort, de la souffrance et de la joie, de la force et de la faiblesse.
Il importe qu'ils prennent conscience qu'ils sont les auxiliaires de la création et non les plombiers de notre carcasse
Les professionnels de santé sont les gardiens de cette chose étrange et mystérieuse appelée la vie. Il importe qu'ils prennent conscience qu'ils sont les auxiliaires de la création et non les plombiers de notre carcasse. Il n'est de bon médecin sans éthique, il n'est de bonne politique sanitaire sans morale, celle qui fait distinguer le bien du mal, l'eugénisme du soin génétique, le chemin de la vie, de la route de la mort.
Le grand basculement de la médecine française a sans doute eu lieu de façon imperceptible, mais effective quand dans la formation des médecins « les humanités » ont été mises en retrait pour se focaliser sur les mathématiques et la technique. Non pas que ceux-ci ne soient nécessaires, mais ils sont l'utile complément du guérisseur, c'est-à-dire de celui qui protège. Restreindre cette dimension humaine, c'est ouvrir la porte au règne de la gestion comptable, du tableau Excel, des statistiques sans âme et du dieu Hammon.
Si veiller à ne pas dilapider l'argent public et chiffrer les coûts sont nécessaires, il est au préalable indispensable de respecter le texte et l'esprit du serment d'Hippocrate « être fidèle aux lois de l'honneur et de la probité », « respecter toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté ».
Que penser de cette société qui dans les divagations de la période covid, alla jusqu'à interdire aux familles d'accompagner leurs proches dans leurs derniers instants terrestres ! Où était le respect des personnes et de leur volonté, dans la fidélité aux lois de l'honneur ? Cruelle démonstration d'une médecine plus gérée par d'inquiétants bureaucrates, « que par ceux qui se doivent de diriger le régime des malades à leur avantage, suivant leur force et leur jugement s'abstenant de tout mal et de toute injustice », pour reprendre le texte d'origine du serment d'Hippocrate.
Et pourtant qu'elle peut être belle notre médecine, née de l'enseignement chrétien. Accueillir les humbles, miséricordieux envers les affligés, c'est ce souffle qui inspira la création des ordres hospitaliers et des premiers hôpitaux qui firent la réputation de notre pays. Puissions-nous retrouver ce souffle.
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