La situation des personnes divorcées remariées ou vivant maritalement au sein de l'Église suscite de très vives réactions parmi les catholiques. Jusqu'en 2016, ces personnes ne pouvaient ni communier ni recevoir l'absolution. Depuis Amoris Laetitia, les choses ont changé. Le pape François souhaite que les divorcés remariés soient accueillis et accompagnés au cas par cas. Qu'en est-il vraiment dans les paroisses ? À entendre les nombreux témoignages des auditeurs de RCF, il reste encore du chemin à parcourir.
"Mon exclusion des sacrements m’a permis de comprendre que l’Église n’est pas propriétaire du Christ et des évangiles", témoigne Patrick, auditeur de RCF. Comme lui de nombreuses personnes disent ne pas comprendre le magistère de l’Église. "Pendant 15 ans, je n’ai pas pu reprendre la communion et me confesser, raconte Thierry, on a toujours vécu dans la foi et nous continuerons toujours mais ce que je dénonce dans ce principe actuel de l’Église c’est que malheureusement notre Église se cache la réalité…" Mariée à une femme divorcée, Thierry a essuyé le refus d’un prêtre de lui donner l’absolution. "Il ne m’a pas laissé le temps de lui dire que nous vivons comme frère et sœur. Ça a été une très mauvaise expérience."
Ne pas pouvoir communier et se voir refuser le sacrement de réconciliation donne le sentiment d’être rejeté de l’Église. "Quand j’ai voulu me confesser dans une paroisse à Limoges, quand j’ai parlé à ce prêtre, on aurait dit qu’il avait entendu le Diable, que je n’avais pas à être là dans ce confessionnal et qu’il ne pouvait rien pour moi", raconte Paule, auditrice de RCF dans le Limousin. Pour Nathalie, d'Orléans, il y a une forme d’hypocrisie, admet-elle. "Lorsque je me suis confessée auprès d’un prêtre, il a refusé de me donner l’absolution, mais par contre j’avais une enveloppe il l’a acceptée… Il a quand même pris l’argent d’une pécheresse !"
Les personnes divorcées remariées ou vivant maritalement ne pouvaient "jusqu’à maintenant" ni communier ni recevoir l’absolution. En fait, ce sont toutes les "personnes en situation irrégulière" qui sont concernées : les couples vivant maritalement sans être mariés comme les couples ne respectant pas les engagements du mariage - c'est surtout l'adultère qui est visé. Ceux-ci n’ont accès, selon le magistère, ni aux sacrements du pardon, de l’eucharistie, ni au sacrement des malades - sauf in articulo mortis, c’est-à-dire juste avant de mourir.
Des dispositions du droit canon qui s’inspirent des paroles du Christ dans l’évangile : "Celui qui renvoie sa femme et en épouse une autre devient adultère envers elle. Si une femme qui a renvoyé son mari en épouse un autre, elle devient adultère." (Mc 10, 11-12) Ou encore : "Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas !" (Mt 19, 6) Comme le note le jésuite Patrick Langue, "l’évangile est beaucoup plus radical qu’on le laisse penser !"
Comment donc l’Église peut-elle rejoindre les personnes divorcées ? La question est d’autant plus cruciale qu’en France, par exemple, un couple sur deux se sépare après neuf ans de mariage. Et 8% des familles sont des familles recomposées.
En 2016, le pape François a écrit Amoris Laetitia, "La Joie de l’Amour", suite aux synodes de 2014 et 2015 consacrés à la famille. Une exhortation apostolique qui était très attendue, en particulier sur cette situation des divorcés remariés. Plus de cinq ans après, où en est-on ? Pour certains le texte ne va pas assez loin, pour d’autres il porte atteinte à la ligne que l’Église catholique a toujours tenue. Ce texte, qui parle d’un "discernement personnel et pastoral approprié" a toutefois ouvert des perspectives nouvelles.
Le pape François a voulu "dépasser la logique du droit canon qui enferme dans la même condamnation ceux qui ont provoqué un divorce, ceux qui l’ont subi, ceux qui se remarient pour donner un beau-père ou une belle-mère à leurs enfants…" explique Patrick Langue, auteur de "Divorcés remariés : de l'exclusion à l'intégration" (éd. Fidélité, 2021). "Il y a désormais un chemin spirituel, au cas par cas... Si quelqu’un vient se confesser et me dit je suis divorcé, je ne vais pas lui dire je ne vous donne pas l’absolution, je vais dire : le pape François a ouvert un chemin, vous pouvez désormais être accueilli et puis rentrer dans un accompagnement personnel."
Désormais, les divorcés remariés doivent être accueillis et accompagner individuellement au sein des paroisses. Ils sont invités à suivre un parcours spirituel "comparable au catéchuménat", exprime le jésuite. "Et cela peut aller, dans un certain nombre de cas, jusqu’au sacrement du pardon et au retour à la communion… dans la discrétion - de manière à ce qu’il n’y ait pas de scandale." La ligne que tente de tenir l'Église se situe entre la "miséricorde pour ceux qui ont échoué dans leur vie conjugale" et la "très grande exigence pour valoriser et maintenir le mariage chrétien". Le jésuite l’assure, "les deux ne sont pas opposés"...
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
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