Dans l’évangile de ce dimanche, Jésus dénonce l’hypocrisie de ceux qui misent sur leur apparence mais dont les actes ne sont pas cohérents avec ce qu’ils disent. Explications de Jean Massonnet, prêtre du diocèse de Lyon, bibliste.
Évangile du dimanche 5 novembre (Mt 23, 1-12)
Alors Jésus s’adressa aux foules et à ses disciples, et il déclara : « Les scribes et les pharisiens enseignent dans la chaire de Moïse. Donc, tout ce qu’ils peuvent vous dire, faites-le et observez-le. Mais n’agissez pas d’après leurs actes, car ils disent et ne font pas. Ils attachent de pesants fardeaux, difficiles à porter, et ils en chargent les épaules des gens ; mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigt.
Toutes leurs actions, ils les font pour être remarqués des gens : ils élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges ; ils aiment les places d’honneur dans les dîners, les sièges d’honneur dans les synagogues et les salutations sur les places publiques ; ils aiment recevoir des gens le titre de Rabbi.
Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères. Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux. Ne vous faites pas non plus donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Qui s’élèvera sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. »
Source : AELF
L’Évangile de Matthieu est divisé en trois parties. Il y a d’abord une section narrative, qui décrit les actions et les discours de Jésus (chapitres 19 à 23), s’en suit dans les deux chapitres suivants un discours eschatologique. Et enfin le récit de la Paisson et la résurrection. On est ici dans la fin de la partie narrative. Ce passage est précédé de plusieurs controverses : sur l’impôt dû à César, sur la résurrection des morts et sur le plus grand commandement.
Dans l'évangile de ce dimanche, Jésus se montre très sévère contre les scribes et les pharisiens. Et "ça va s’aggraver", prévient le bibliste. S'en suivra en effet une série d'invectives de la part de Jésus, qui répète sept fois : "Malheureux êtes-vous..." Des mots durs qui résonnent comme une malédiction. Mais, précise Jean Massonnet, dans la Bible, on ne parle pas de malédictions, plutôt "d'avertissements" pour dire : "Attention à ce qui va vous arriver si vous ne vous convertissez pas !"
Pourquoi Jésus se montre-t-il sévère avec les pharisiens ? Il faut avoir en tête qu'en réalité, Jésus était proche des pharisiens, qui croyaient à la vie éternelle. "Avec les pharisiens, qui sont porteurs de la tradition que reçoit le peuple aujourd’hui, explique le Père Massonnet, et que reconnaît Jésus, ça nous met dans un accord extrêmement profond avec le fond même de la tradition juive."
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Le mot n’est jamais prononcé, mais c’est bien l'hypocrisie qui est au centre de ce que Jésus dénonce. "Il dénonce une sorte de simulation, précise le bibliste, on cache quelque chose, on n’est pas vrai, on n’est pas cohérent avec ce que l’on dit, avec ce que l’on impose..." Finalement, ce que Jésus dénonce, c'est d'avoir "un comportement qui ne correspond pas du tout à ce que devrait être une véritable relation d’accueil de la parole de Dieu".
Il est aussi question d'apparence, de se donner à voir soi-même, d'être centré sur soi. "Cette tendance-là elle est enracinée en nous, ce désir d’apparaître", convient le Père Massonnet. Si le désir de reconnaissance est "légitime", il ne doit pas, prévient le bibliste, "se transformer en un repli sur soi-même". Ce que le pape François nomme "auto-référentialité".
Mais « il y a une autre hypocrisie : la confrontation avec nous-mêmes, c’est-à-dire quand je crois être autre chose que ce que je suis, je crois ne pas avoir besoin de guérison, de ne pas avoir besoin de soutien; je crois que je ne suis pas fait d’argile, que j’ai un trésor “à moi” ». Et cela « est le chemin, est la voie vers la vanité, l’orgueil, l’auto-référentialité de ceux qui, ne se sentant pas d’argile, cherchent le salut, la plénitude d’eux-mêmes ». Il ne faut jamais oublier, donc, que c’est « la puissance de Dieu qui nous sauve ».
Pape François, le 16/07/2017
Chercher à se hisser au-dessus des autres, et par là même se couper d'eux, c'est risquer de se perdre. "C’est en accueillant les autres, en étant ouvert à tous que je me retrouver moi-même", commente Jean Massonnet.
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