Plusieurs sondages l'ont montré, mêmes les catholiques ont du mal à croire à la résurrection du Christ. Sa Passion sur la croix et sa victoire sur la mort représentent un mystère. Le Samedi saint, c'est précisément "le jour où l'on ne comprend pas", décrit le dominicain Jean-Jacques Pérennès. Directeur de l'École biblique et archéologique de Jérusalem, il nous aide à entrer dans ce mystère pascal au cœur de la foi chrétienne.
C’est parfois un peu facile de parler de "mystère" au sujet de la mort et de la résurrection du Christ. On est tentés de l’utiliser comme "un mot un peu fourre-tout" pour finalement dire que l’on n’y comprend pas grand-chose. Pourtant, la mort du Christ et sa résurrection, "il y a une urgence que ça ait du sens", souligne Jean-Jacques Pérennès. Directeur de l’École biblique et archéologique française (Ébaf) de Jérusalem, il se réfère toujours aux textes pour aborder ce mystère. Haut lieu d’études bibliques, l’Ébaf a une longue tradition de fréquentation des Écritures saintes. C’est à elle que l’on doit la Bible de Jérusalem.
Parler de la mort et de la résurrection de Jésus c’est immédiatement aborder des "réalités humaines extrêmement fortes, difficiles, lourdes", prévient Jean-Jacques Pérennès. Le dominicain le confie lui-même : "J’entre dans ce thème avec beaucoup d’inquiétude." Et de prudence pour ne pas tomber dans le piège des formules toutes faites et le danger des "discours religieux qui vient obturer en quelque sorte l’absence de sens". "Le mystère ce n’est ne pas aller trop vite dans des paroles passe-partout mais avoir un infini respect pour le cheminement, pour ce qui est à vivre."
Pour vivre la fête de Pâques, sans doute faut-il d’abord accepter de ne pas avoir toutes les réponses. "Apprenez à aimer vos questions parce que vous n’êtes peut-être pas encore capables d’entrer dans les réponses", dit Rainer Maria Rilke. De plus, Jésus a "un infini respect", nous dit Jean-Jacques Pérennès "pour le questionnement, le non-sens, la détresse..." On le voit bien quand il est avec les disciples d’Emmaüs, "il les accompagne dans leurs interrogations et leur chagrin".
Lorsque nous parlons de la résurrection, nous devons avoir un infini respect pour les hommes et les femmes qui ne savent pas, qui disent : Je ne sais plus où j’en suis, tout ça n'a pas de sens
Entre le Vendredi saint et le dimanche de Pâques, il y a le silence du Samedi saint. Il y a un cheminement à vivre avant d’aller vers la joie de Pâques. Le Samedi saint, c’est le jour où l’on prend le temps de considérer "l’absurdité" et "le tragique de l’histoire", nous dit Jean-Jacques Pérennès. "Ce tragique de l’histoire est assumé par Jésus dans une Passion qui n’est pas une petite affaire", prévient le dominicain. La douleur physique, la souffrance de ses proches, l’immense solitude de l’être : c’est un condensé de toutes les souffrances humaines qu’endure le Christ. Pour Jean-Jacques Pérennès il ne faut pas aller "vers l’affirmation de la résurrection" sans avoir eu "le courage de mesurer à quel point c’est dramatique".
Le Samedi saint, ce n’est pas un jour où il ne se passe rien, tout au contraire. C’est le jour "où l’on ne comprend pas". "Lorsque nous parlons de la résurrection, nous ne devons pas en parler de façon légère et facile. Nous devons avoir un infini respect pour les hommes et les femmes qui ne savent pas, qui disent : Je ne sais plus où j’en suis, tout ça n'a pas de sens." Le directeur de l’École biblique l’avoue lui-même : "Moi, chaque année je suis ému aux larmes lorsque dans l’office des ténèbres, cette homélie de saint Épiphane… "
Dieu est mort dans la chair… et le séjour des morts s’est mis à trembler. C’est le premier homme qu’il va chercher, comme la brebis perdue. Il veut aussi visiter ceux qui demeurent dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort… Je te l’ordonne : Éveille-toi, ô toi qui dors, je ne t’ai pas créé pour que tu demeures captif du séjour des morts. Relève-toi d’entre les morts : moi, je suis la vie des morts. Lève-toi, œuvre de mes mains ; lève-toi, mon semblable qui as été créé à mon image. Éveille-toi, sortons d’ici. Car tu es en moi, et moi en toi, nous sommes une seule personne indivisible.
Homélie de saint Épiphane
Que nous apprennent les textes du mystère de la mort et de la résurrection du Christ ? Sa naissance, celle d’un Dieu qui s’incarne en homme, "est véritablement le premier élément qui peut nous permettre de comprendre un peu ce mystère, explique Jean-Jacques Pérennès, il nous a rejoint par la chair." Et "le seul fait que Dieu le fasse homme le rend vulnérable. Au fond, ce qui est intéressant c’est peut-être moins la mort que la vulnérabilité de Dieu..."
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Il en est de même pour le baptême du Christ, que rapportent les évangiles. Pourquoi Jésus a-t-il été baptisé, lui qui est sans péché ? Cette volonté de passer par le rite du baptême "c’est une manière de souligner qu’il doit lui aussi faire cette traversée" de la condition humaine.
Tu serais mort pour l’éternité s’il n’était né dans le temps. Tu n’aurais jamais été libéré de la chair du péché s’il n’avait pris la ressemblance du péché. Tu serais victime d’une misère sans fin s’il ne t’avait fait cette miséricorde. Tu n’aurais pas retrouvé la vie s’il n’avait pas rejoint ta mort. Tu aurais succombé s’il n’était allé à ton secours. Tu aurais péri s’il n’était pas venu.
Saint Augustin
Très vite dans les évangiles de Matthieu, Marc et Luc, Jésus opère des guérisons. "Ce qui est très frappant avec Jésus c’est que sa parole fait ce qu’elle dit, explique Jean-Jacques Pérennès, sa parole rejoint les gens dans ce qui en eux est le plus vulnérable, le plus fragile, le plus blessé." Ces guérisons nous enjoignent à lire les évangiles et se laisser toucher par sa parole.
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