Lors de la Semaine sainte et au moment de la fête de Pâques, on célèbre la mort puis la résurrection de Jésus. Les chrétiens sont invités à redécouvrir sans cesse qui est le Christ, le fils de Dieu. Si l'on ne peut passer à côté du Jésus de l'histoire et des découvertes scientifiques à son sujet, il semble que ni les croyants ni les scientifiques ne viendront à bout de l'énigme de l'identité de Jésus.
Où en est-on sur l'identité de Jésus ? Depuis un siècle, les connaissances se sont considérablement enrichies. Le dominicain Renaud Silly, qui a dirigé la publication du "Dictionnaire Jésus" (éd. Bouquins, 2021), de L'École biblique de Jérusalem, nous propose une double approche, scientifique et spirituelle, sur l'identité de Jésus.
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Dans les évangiles, Jésus lui-même pose l’énigme de son identité. "Pour vous, qui suis-je ?" (Mt 16, 15) demande-t-il à ses disciples. "Lorsque des gens prétendent savoir qui il est, ce sont des démons", relève Frère Renaud Silly, qui a dirigé la publication du "Dictionnaire Jésus". "Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu", dit en effet le démon dans l’évangile de Luc (Lc 4, 33-35). Et "quand les gens sont trop assurés de ce qu’ils savent sur lui, Jésus n’est pas trop d’accord", observe le dominicain. Ainsi, saint Pierre a beau affirmer : "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant !" (Mt 16, 16), il déclare finalement : "Je ne connais pas cet homme." (Mt 26, 72). L’identité de Jésus est "un mystère de foi" qui "résiste à des définitions trop faciles ou trop immédiates".
Pourquoi Jésus est-il une énigme ? Sa personnalité doit-elle rester un mystère ? Jésus ne cherche pas à "nous brouiller les pistes", assure Renaud Silly. Pour savoir qui est Jésus, il faut "entrer dans un chemin de conversion qui est celui du disciple". Il faut donc "vivre avec lui, écouter sa parole, se laisser sculpter par l’enseignement du Seigneur pour progressivement entrer dans l’intelligence de qui il est…"
C’est à partir du XVIIIe siècle avec l’émergence de l’histoire comme "discipline reine", raconte Renaud Silly, que l’on a entrepris de reconstituer les données historiques sur Jésus. Un genre d’études historiques est même apparu, celui des "vies de Jésus". "Toutes sortes de théologiens et de philologues se sont penchés sur l’itinéraire probable, la biographie du Christ", raconte Frère Silly. On a ainsi présenté Jésus tantôt comme "un révolutionnaire exalté", un "maître de sagesse" ou encore un "apocalypticien conséquent".
On doit à Albert Schweitzer d’avoir proposé, au début du XXe siècle, une voie nouvelle. Ce célèbre médecin était aussi "un exégète remarquable", souligne Renaud Silly. "Il a profondément renouvelé l'approche scientifique de Jésus au début du XXe siècle." Par ailleurs, en un siècle, la connaissance sur la vie au temps de Jésus "a fait des progrès gigantesques". C’est donc tout l’enjeu du "Dictionnaire Jésus" de faire le point, après un siècle de découvertes, sur l’identité de Jésus.
Nous ne pouvons aller à la divinité de Jésus que par l’humanité de Jésus
Étudier la Bible et la confronter à l’histoire, y célébrer le mystère de la foi chrétienne : c’est dans ce dialogue entre science et foi que les dominicains de l’École biblique et archéologique de Jérusalem accomplissent leur vocation. On dit que Jésus est le fils de Dieu : c’est en s’approchant des textes que l’on peut comprendre cette expression. Ainsi l’évangéliste Matthieu donne-t-il, au chapitre 22, les tous premiers indices sur la nature à la fois divine et humaine de Jésus. Jésus qui est « antérieur à David comme Dieu et descendant de David comme homme".
Jésus leur réplique : « Comment donc David, inspiré par l’Esprit, peut-il l’appeler “Seigneur”, en disant : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : “Siège à ma droite jusqu’à ce que j’aie placé tes ennemis sous tes pieds” ? Si donc David l’appelle Seigneur, comment peut-il être son fils ? » Personne n’était capable de lui répondre un mot et, à partir de ce jour-là, nul n’osa plus l’interroger.
(Mt 22, 43-46)
Quant à l’expression : "fils de l’homme", qu’est-ce que ça veut dire ? « Nous sommes devant un aspect très historique de la personne de Jésus puisque le terme "fils de l’homme" n’apparaît jamais dans la première littérature chrétienne. » Il n’y a que Jésus qui la prononce et même les apôtres ne le comprenaient pas très bien ! Renaud Silly admet qu’elle "n’est pas très facile à comprendre". Le dominicain propose toutefois cette interprétation : Jésus s’approprie sa propre humanité. "Chez lui l’humanité est totalement assumée, du coup elle est complète. Elle est le moyen par lequel il se révèle aux hommes, par lequel il va mettre en œuvre toutes les vertus, par lequel il va révéler la doctrine du Père. Bref, nous ne pouvons aller à la divinité de Jésus que par l’humanité de Jésus." L’humanité telle que la présente Jésus est "une humanité splendide, graciée, éblouissante, transfigurée".
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