
L’évangile de ce dimanche met en scène Jésus prêchant dans une synagogue de Nazareth. L'auteur de ce texte est l'évangéliste Luc, qui n'a pas connu Jésus mais le reconnaît comme le libérateur. Luc fait de ce moment le début de la vie publique de Jésus. Fait notable : il ne dit pas que Jésus lit le Livre d'Isaïe ouvert devant lui. Et s'il était lui-même la Parole de Dieu ?
Évangile du dimanche 23 janvier (Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21)
Beaucoup ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, d’après ce que nous ont transmis ceux qui, dès le commencement, furent témoins oculaires et serviteurs de la Parole. C’est pourquoi j’ai décidé, moi aussi, après avoir recueilli avec précision des informations concernant tout ce qui s’est passé depuis le début, d’écrire pour toi, excellent Théophile, un exposé suivi, afin que tu te rendes bien compte de la solidité des enseignements que tu as entendus...
Lorsque Jésus, dans la puissance de l’Esprit, revint en Galilée, sa renommée se répandit dans toute la région. Il enseignait dans les synagogues, et tout le monde faisait son éloge. Il vint à Nazareth, où il avait été élevé. Selon son habitude, il entra dans la synagogue le jour du sabbat, et il se leva pour faire la lecture.
On lui remit le livre du prophète Isaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur. Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit.
Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. »
Source : AELF
On pense que Jésus a été crucifié le 7 avril de l’année 30. Puis il y a eu la résurrection. "Mais on n’a pas écrit tout de suite les évangiles parce qu’on était à peu près persuadés que la fin du monde était pour bientôt et que donc le Christ allait revenir," explique Gérard Billon, prêtre du diocèse de Luçon, bibliste et ancien président de l’Alliance biblique française. Petit à petit, les tout premiers chrétiens ont compris que le retour du Christ serait pour une date inconnue. "Il fallait donc s’installer dans l’attente du retour du Christ et mettre par écrit le témoignage de ceux qui l’avaient connu."
Luc n’a pas rencontré personnellement Jésus. Il a écrit son évangile vers les années 70, 80 de notre ère à partir de nombreux témoignages qu’il a lui-même recueillis. "Luc est un excellent historien, pour Gérard Billon, mais un historien selon l’Antiquité." Lorsqu’il dit qu’il va écrire "un exposé suivi", on peut comprendre que son récit ne sera pas tant "chronologique" que "théologique".
Qui est le fameux Théophile à qui s’adresse Luc ? On peut supposer qu’il s’agit de son commanditaire. "Mais en même temps il a un nom si symbolique [Théophile veut dire ami de Dieu, ndlr] que finalement, Théophile : c’est vous et c’est moi !" Luc s’adresse à des personnes déjà catéchisées, qu'il veut "conforter" dans leur foi. "L’évangile n’est pas là forcément pour donner la foi, il est là pour conformer la foi."
Luc écrit que Jésus enseigne dans la synagogue. Une précision qui a son importance, soulève Gérard Billon. "La synagogue, c’est le lieu premier de l’écoute de la parole de Dieu, l’écoute des paroles de la vie." Pour le bibliste, "la parole de Dieu doit perturber, doit toucher quelque chose de profond en nous : parfois elle juge, parfois elle console, elle redonne l’espérance, elle conforte la foi elle nous invite à aimer…"
Dans la synagogue, Jésus lit un passage du Livre du prophète Isaïe, où il est question d'onction et de consécration. "Le mot messie n'est pas donné ici, maintenant, nous pouvons, nous chrétiens, dire que le prophète Isaïe parlait de quelqu'un qui est le Messie, c'est-à-dire l'envoyé, le fils de David." Celui qui a été choisi par Dieu pour une mission de libération.
"Aujourd'hui" est un mot important de l'évangile de Luc. Il apparaît au moment de l'annonce aux bergers de la nuit de Noël, chez Zachée à Jéricho et au moment de la Passion, avec le bon larron. "Jésus est l'aujourd'hui de Dieu, le passé, le présent et le futur se concentrent dans la personne de Jésus. Et ça, c'est un trait caractéristique de l'évangile de Luc."
Luc, qui est "un très grand écrivain", nous dit Gérard Billon, ne mentionne pas explicitement d'acte de lecture au sujet de Jésus. "Luc, en supprimant l'acte de lecture, nous dit que Jésus est le texte lui-même, la véritable texte de Dieu, la Parole de Dieu. Il est la libération, il est celui qui ouvre nos yeux."
Peu de nos contemporains connaissent les Évangiles. Ils n'y sont pas hostiles mais ils n'ont plus d'occasion d'y avoir accès. C'est partant de ce constat que, avec l'éclairage d'un bibliste, Béatrice Soltner propose chaque semaine un texte d'Évangile pour qu'il soit entendu (ou réentendu), pour en savourer la nouveauté et faire l'expérience que - si incroyable que ce soit à l'heure de l'instantanéité - cette parole écrite il y a plus de 2.000 ans nous rejoint toujours au plus profond.
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