Les chrétiens ont laissé tomber tous les interdits alimentaires, et ce dès les premiers temps du christianisme. Si la tradition veut parfois que l'on l'on mange lors des repas de fête, du foie gras, de la dinde ou des huîtres, le chrétien est invité à questionner ses choix alimentaires... Que dit la Bible de la dégustation des animaux ? Pourquoi une telle importance des végétaux dans la Genèse ? Sans aller jusqu’à proposer un réveillon végan, la théologienne Catherine Vialle, de l’université catholique de Lille, donne des clés pour se nourrir en chrétien.
Foie gras, chapon, huîtres : même si c’est la tradition d’en consommer aux repas de fête, le chrétien ne peut-il pas questionner ses choix alimentaires ? À la différence des juifs, qui s’inspirent eux aussi de l’Ancien Testament, les chrétiens ont laissé tomber tous les interdits alimentaires. Pour la théologienne Catherine Vialle cependant, ces derniers sont invités à "se poser des questions sur leur manière de vivre", ne serait-ce que pour essayer de vivre "du mieux possible sous le regard de Dieu"...
Mais vers quoi se tourner ? Il y a très peu de recettes culinaires dans la Bible. Cependant, elle n’exclut pas "le plaisir du goût". Dans la Genèse, Dieu crée des arbres "savoureux" et "beaux à regarder" (Gn 3, 6). Notons par ailleurs avec la théologienne, que le royaume de Dieu est souvent décrit "comme un banquet" et que Jésus lui-même "est souvent à table".
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Si l’on s’en tient au premier chapitre de la Genèse, qui est le premier livre de la Bible, Dieu crée, au sixième jour, "des animaux et des humains tous végétariens". Aussi la fameuse injonction "remplissez la terre et soumettez-la" (Gn 1, 28), "n’implique pas la violence", explique la théologienne, "ni de tuer des animaux pour les manger".
"Vous serez la crainte et la terreur de tous les animaux de la terre, de tous les oiseaux du ciel, de tout ce qui va et vient sur le sol, et de tous les poissons de la mer : ils sont livrés entre vos mains. Tout ce qui va et vient, tout ce qui vit sera votre nourriture ; comme je vous avais donné l’herbe verte, je vous donne tout cela." (Gn 9, 2-3)*
Par contre, à partir du Déluge, les choses changent. Quand Noé débarque de l’Arche avec ses animaux, il fait un sacrifice à Dieu pour rendre grâce. Et pour la théologienne, "le regard que Dieu jette sur le sacrifice est pour le moins ambivalent". Tout se passe comme si Dieu avait "fait le constat que l’être humain est porté au mal" et qu’il en vient à lui donner "un exutoire pour sa violence", il pourra donc manger des animaux. Plus tard, au livre du Lévitique, il est fortement question de sacrifice : les animaux doivent être offerts à Dieu avant d’être mangés, un acte religieux doit précéder la consommation d’êtres vivants. Cela montre en tout cas qu'il n'est "pas du tout anodin de prendre la vie d’un être vivant..."
L’abolition des interdits alimentaires a fait l’objet de nombreux débats chez les premiers chrétiens. Dans le Nouveau Testament, au chapitre 10 des Actes des Apôtres, une vision de Pierre a radicalement changé le rapport des chrétiens aux animaux. Faut-il regretter la fin des rituels autour de l’alimentation qui permettait de réguler et encourageait le respect du vivant ? Pour les chrétiens, un seul sacrifice compte : le seul, l'unique, celui du Christ.
Dès les premiers temps, le christianisme a fait le choix de laisser les croyants libres. "Le croyant est livre de faire ses propres choix et de discerner, il est libre dans son âme et conscience de réfléchir à ce qu’il fait", explique la théologienne. Libre donc, mais invité à se questionner... "Dans la mesure où on a la possibilité d'avoir accès à d'autres sources de protéines, est-il juste de manger de la viande à tous les repas ?" demande Catherine Vialle. D'ailleurs, le prophète Isaïe décrit à quoi ressemblerait le monde idéal : il décrit un monde où tous les êtres vivants vivent en harmonie les uns avec les autres...
"Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira. La vache et l’ourse auront même pâture, leurs petits auront même gîte. Le lion, comme le bœuf, mangera du fourrage. Le nourrisson s’amusera sur le nid du cobra ; sur le trou de la vipère, l’enfant étendra la main. Il n’y aura plus de mal ni de corruption sur toute ma montagne sainte ; car la connaissance du Seigneur remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer." (Is 11, 6-9)*
* Source : AELF
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