Agriculture : l'intelligence artificielle en plein développement dans l’élevage

C’est un capteur discret accroché au plafond de la stabulation qui abrite les vaches laitières d’Hubert Leriche, à Benoîtville dans la Manche. Depuis quatre mois, ce capteur mesure la température, l’humidité, le CO2 ou encore l’ammoniac pour évaluer l’atmosphère du bâtiment et anticiper les périodes de stress thermique vécues par les animaux. L’exploitation d’Hubert Leriche fait partie des 20 fermes pilotes dans lesquelles la coopérative Innoval teste de nouveaux outils d’intelligence artificielle. Lancée depuis deux ans, cette expérimentation a pour but de capter un maximum de données afin d’avoir des modèles les plus fiables possibles pour généraliser ces outils. 

Les capteurs d’ambiance, comme ceux installés chez Hubert Leriche, sont paramétrés pour remonter des données toutes les 10 minutes au conseiller d'Innoval. « Le principe n’est pas de regarder les données toutes les 10 minutes, mais de mettre en place des alertes pour prévenir quand ça ne va pas », explique Stéphane Saillé, directeur Innovation chez Innoval. Parmi les outils expérimentés par la coopérative, il y a également des capteurs pour évaluer l’abreuvement des vaches, la maîtrise de la consommation en eau étant aussi un enjeu de l’agriculture aujourd’hui.

Un secteur agricole déjà fortement imprégné par le numérique

L’utilisation d’outils connectés dans les fermes n’est pas récente. Hubert Leriche utilise des capteurs sur ses vaches depuis plusieurs années, pour les vêlages, l’insémination ou encore pour surveiller la qualité du lait, mais ces nouveaux objets vont encore plus loin. « Avec Innoval, on collecte des millions de données tous les jours. On fait 10 000 actes d'insémination, on s'occupe de 1 200 000 vaches en France, on a 1 500 salariés qui sont en permanence dans les fermes. Ça représente des masses de données très importantes qu’on ne peut plus traiter avec un simple tableau Excel. Il n'y a que des algorithmes suffisamment puissants qui, aujourd'hui, peuvent traiter toutes ces données », explique Yann Lecointre, directeur général d’Innoval. Conscient du potentiel de l’IA, Innoval est devenu, en 2023, l’actionnaire majoritaire de la société ITK spécialisée depuis 20 ans dans l’intelligence artificielle appliquée à l’agriculture.

On ne peut plus traiter toutes les données avec un simple tableau Excel

L’IA : un outil au service du bien-être de l’éleveur ?

Pour Yann Lecointre, l’intelligence artificielle améliore la productivité et donc le bien-être de l’éleveur. « Avec de bons indicateurs, on va toujours pouvoir aller plus loin dans l’amélioration de la performance, ce qui représente des revenus supplémentaires et assure la pérennité de l’exploitation, et tout ça avec une charge mentale beaucoup plus légère pour l'éleveur puisqu'il va recevoir des alertes au lieu d'être obligé d'aller sur place. »

Un meilleur confort de travail que constate Hubert Leriche :  « L’éleveur n’est pas 24h sur 24 dans l’élevage, ou bien il est présent mais il effectue d’autres travaux. Avec ces outils, on met un surveillant à demeure ». Mais l'intelligence artificielle ne va-t-elle par remplacer l'œil de l'éleveur ? « Cela ne remplace pas l’interprétation de l’éleveur, l’information est relayée sur notre ordinateur et c’est à nous de prendre la bonne décision », précise Hubert Leriche.

Un changement en termes de qualité de vie des éleveurs, mais aussi de reconnaissance sociétale : « Des fermes bien menées qui sont capables de montrer qu'elles dégagent moins de carbone, qu’elles respectent des critères de bien-être animal, cela va aussi permettre d'améliorer la reconnaissance sociétale des exploitations agricoles », ajoute Yann Lecointre, directeur général d'Innoval. L'intelligence artificielle n'a donc pas fini de faire évoluer le métier d'agriculteur.