Entre insalubrité, cafards et taux d’occupation record, les conditions de détention en France virent parfois au cauchemar. Des associations ont décidé de s’emparer de cet enjeu pour protéger les droits des détenus, soit en attaquant l'État en justice, soit en proposant des alternatives à la prison.
La France compte aujourd’hui 72 000 détenus, pour 60 000 places opérationnelles en prison. Une équation qui semble quasi-impossible à résoudre alors même que le nombre de personnes envoyées en centres pénitentiaires à augmenté de 4,7 % par rapport à 2021.
Dominique Simonnot s’étonne de ce réflexe bien français qui est de systématiquement envoyer des petits délinquants au sein des maisons d’arrêt. "Nos voisins allemands ont 15 000 détenus de moins pour 15 millions d’habitants de plus", alerte la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté qui souhaiterait que les magistrats pensent aux alternatives existantes.
Face à la situation et à une surpopulation carcérale de 240 % dans la maison d’arrêt de Gradignan près de Bordeaux, l’association de défense des détenus et le syndicat des avocats de France ont attaqué l’Etat en justice. Selon elles, la loi, pourtant très claire, n’est pas respectée. "La détention, ce n’est que la restriction d’aller et venir. En détention en principe, on doit avoir les mêmes conditions de vie qu’à l’extérieur", explique l’avocate Juliette Chapelle.
En d’autres termes, les détenus doivent avoir "une cellule propre, des toilettes qui fonctionnent, avoir accès à un médecin, un dentiste, un travail, ce qui n'est aujourd’hui pas le cas", témoigne celle qui est aussi présidente de l’association A3D qui protège le droit des détenus en France.
Si certaines associations attaquent l’Etat en justice, d’autres – comme Emmaüs France – agissent pour désengorger des prisons surpeuplées. Des fermes, basées sur le placement à l’extérieur, accueillent des détenus tout au long de l’année. Celles-ci remplissent un double objectif selon l’association : vider les prisons surpeuplées et responsabiliser les détenus en les réinsérant peu à peu dans la société.
"Cette idée est venue d’une structure qui s’appelle la ferme de Moyembrie, créée dans les années 1980, à l’initiative de particuliers visiteurs de prisons. Ils ont donc acheté une ferme et ont commencé à accueillir des personnes sortantes de prisons", raconte Marion Moulin, responsable nationale de Groupes Justice et Prison chez Emmaüs France.
Suite à cela, depuis 2016, l’association a déjà créé cinq fermes qui sont des ateliers chantiers d’insertion, sur une activité de maraîchage et d’agriculture biologique. De plus, ces fermes "proposent aux personnes un hébergement – des structures de petites tailles pour un cadre de vie familial – et également un accompagnement socioprofessionnel renforcé pour préparer leur réinsertion", détaille Marion Moulin. Si l’association a forcément eu des mauvaises expériences, ces placements à l’extérieur sont jugés comme de véritables réussites. "Aujourd’hui, on a un taux de réincarcération de moins de 10 % des personnes que l’on accueille", conclu la responsable nationale Justice et Prison d'Emmaüs France.
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