Les arrêts de travail, sont-ils devenus un fléau en France ? C’est l’avis du patronat qui réclame plus d’équité et qui tempête contre la complaisance de certains médecins. Une clameur qui trouve des bonnes oreilles à Bercy qui voit dans l’augmentation des arrêts-maladies un gouffre financier et donc un levier pour faire des économies. Les salariés sont appelés à la responsabilisation et les médecins, principalement des généralistes, jugés comme des prescripteurs à la chaîne sont rappelés à l’ordre. C’est un chantier important qui s’ouvre alors que beaucoup de praticiens dénoncent un “flicage”. C’est surtout un nouveau témoignage des mutations en cours dans notre rapport au travail.
Le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a ouvert les hostilités en parlant “d’arrêt-maladie de complaisance”. En cause : l’augmentation de l’absentéisme en France. Entre 2021 et 2022, les dépenses liées aux indemnités journalières des arrêts-maladies ont augmenté de 7,9 % selon Bercy, pour atteindre les 15 milliards d’euros. Chiffre qui pourrait grimper à 23 milliards d’euros d’ici la fin du quinquennat s’inquiète le ministère de l'Économie. Sur la décennie écoulée : le nombre d'arrêts-maladies est passé de 6,4 millions à 8,8 millions, soit une hausse de 37,5 %.
Nouvelle preuve de l’évolution du rapport au travail en France depuis le Covid, les jeunes sont les plus touchés par cet absentéisme. Selon le datascope de l’assureur Axa qui tient un observatoire de l’absentéisme : le taux a progressé de plus de 50 % chez les moins de 30 ans entre 2019 et 2022. Un constat que vérifient sur le terrain les médecins généralistes.
Ces derniers sont vent debout contre les mots utilisés par le patron du Medef. “Complaisance, cela signifie très clairement que les médecins sont des escrocs et que les patients abusent” s’emporte le docteur Jérôme Marty, président de l'Union Française pour une Médecine Libre. Sauf que l’assurance-maladie a emboîté le pas à Geoffroy Roux de Bézieux puisqu'elle surveille 15 000 praticiens de près. 5 000 sont ciblés pour recevoir des entretiens afin de questionner leurs habitudes de prescription. Et au moins un millier de médecins, considérés comme des gros prescripteurs d’arrêt-maladie, ont reçu un courrier pour leur annoncer une mise sous objectifs, soit un contrôle du nombre d'arrêts maladie prescrit. Un délit statistique selon la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF).
Outre le Medef, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), entend ainsi responsabiliser les salariés. Son secrétaire général, Jean-Eudes du Mesnil, réclame plus d'équité entre le public et le privé concernant les jours de carence, en établissant des jours de carence d’ordre public en interdisant toutes dérogations. La Cour des comptes assure que le jour de carence réintroduis dans la fonction publique en 2018 a permis de faire baisser les arrêts de travail de courte durée de 23 %.
Enfin, un autre axe de travail, qui fait consensus, est la lutte contre les fraudes : à savoir la délivrance de faux certificats sur les réseaux sociaux ou sur certaines applications comme Snapchat moyennant quelques dizaines d’euros. Et puis Gabriel Attal le ministre du budget veut aussi lutter contre les arrêts de travail délivrés en téléconsultation, mais il s’était heurté en septembre dernier au Conseil constitutionnel. Il y a fort à parier que le gouvernement tentera de nouveau d'encadrer les arrêts maladies en téléconsultation à l’automne prochain, lors de la prochaine loi finance.
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