Alors que le froid s’installe et pour faire face à la crise énergétique, le gouvernement incite à limiter le chauffage à 19 degrés. Mais pour certains, c’est déjà un luxe. Avec la hausse des prix de l'énergie, de plus en plus de Français pourraient être touchés par la précarité énergétique cet hiver.
12 millions de Français sont concernés en France par la précarité énergétique. Un chiffre potentiellement sous-estimé, datant de l’année 2013. On compte aujourd'hui environ 5 millions de passoires énergétiques dans le pays. Les statistiques manquent aujourd’hui, regrettent des experts. Mais les associations s’attendent déjà au pire pour l’hiver qui vient. Avec la flambée des prix de l’énergie, des personnes qui n’avaient pas de problème auparavant pour se chauffer vont probablement en rencontrer.
"En fonction du moment où les copropriétés passent de nouveaux contrats avec les énergéticiens, on a des prix qui doublent ou triplent et donc ça veut dire parfois plusieurs centaines d’euros par an supplémentaires à sortir, insiste Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre. Pour ceux qui étaient déjà un peu ric-rac ça veut dire soit des impayés et donc des menaces de coupures d’électricité ou de réduction de puissance, soit des phénomènes de privation."
La précarité énergétique, c'est avoir des difficultés à se chauffer, avoir froid chez soi l’hiver, souvent chaud l’été. Le ressenti du froid varie évidemment en fonction de chaque personne. C'est toutefois un indicateur essentiel pour l'Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE). Il retient aussi le taux d’effort énergétique, le fait de dépenser plus de 8 % de ses revenus pour se chauffer.
Des indicateurs pour traduire des situations invivables. "Le froid, ce n'est pas juste une question de confort, souligne Manuel Domergue. Le fait d’être dans un logement où il fait 14 ou 15 degrés en permanence, ça a des effets importants sur des pathologies comme le rhume, la bronchiolite pour les enfants, les maladies cardiovasculaires, les AVC, les maladies respiratoires. Et puis, il y a une anxiété, un stress, une dépression plus forte et souvent un isolement social."
Pour endiguer le phénomène, l'État a mis en place de nombreux dispositifs. Parmi lesquels le bouclier tarifaire, le chèque énergie mais aussi le dispositif MaPrimeRénov qui permet aux particuliers de financer en partie des travaux de rénovation énergétique comme l’isolation ou le changement du système de chauffage.
Des aides qui ne fonctionnent pas toujours aussi bien que prévu. C’est le cas notamment de MaPrimeRénov. La Défenseure des droits a publié le mois dernier des recommandations après avoir été saisie de 500 réclamations. Certaines personnes se plaignent de n'avoir pas perçu l’aide prévue, alors que les travaux ont commencé chez eux ou de difficultés à accéder à leur dossier. La Défenseure des droits a donc demandé à l’Agence nationale de l'habitat (Anah) de réduire les délais de traitement, de régulariser les demandes et d’améliorer l’information des usagers.
"Il y a des moyens insuffisants pour pouvoir traiter un flux massif de demandes, commente Danyel Dubreuil, qui coordonne l’initiative "Rénovons !" au CLER Réseau pour la transition énergétique. Les outils ne sont pas aujourd’hui mis en condition pour faire bien leur travail. C'est une question de choix politique."
Il faut aussi selon lui améliorer l’accompagnement des usagers dans cette rénovation. Car les travaux sont coûteux, souvent longs. Certaines personnes ont aussi peur des arnaques, ne savent pas toujours vers qui se tourner. Une formation pour devenir "ensemblier solidaire" a donc vu le jour il y a un an, portée notamment par l'association "Stop à l'exclusion énergétique". "Quand vous êtes face à des travaux, vous avez besoin d’être aidé. D’abord savoir ce qu’il faut faire comme travaux, trouver les artisans, monter des demandes de financement… Tout ça, c’est du temps et de la compétence donc on a besoin du métier d’ensemblier solidaire pour faire à la fois de l’accompagnement social et technique", détaille Gilles Berhault, délégué général de l'association.
Il y a la question essentielle de la facture mais aussi de l’environnement. Le bâtiment représente aujourd’hui en France près de 40 % des émissions de gaz à effet de serre. "C'est impératif de baisser les émissions de gaz à effet de serre du secteur. Pour nous, cela passe par une baisse de la consommation d’énergie. Plus on va baisser celle des logements, plus on va baisser leur niveau d’émissions et aussi on a des effets sur la baisse de la facture", explique Danyel Dubreuil.
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