En France, un agriculteur se suicide chaque jour, selon la Mutualité sociale agricole. Un malaise paysan de moins en moins tabou dans une société où le poids démographique de la profession s’amenuise, sans que la force politico-médiatique du secteur ne soit atteinte. En plein Salon de l'Agriculture, retour sur le mal-être de nos chefs d'exploitation.
Le Salon International de l’Agriculture séduit en moyenne 500 000 visiteurs par an. Cette année encore, la plus grande foire agricole de France fait salle comble, preuve de l’attachement des Français à la profession du monde agricole. Pourtant, la réalité du métier, bien loin du défilé des ministres Portes de Versailles, suscite un malaise de plus en plus fréquent au cœur des mondes agricoles.
Il n’est pas rare d’évoquer l’expression “métier passion” au moment où il faut évoquer la profession d’agriculteur. Cependant, le malaise ressenti dans le secteur n'a jamais été aussi présent et le monde agricole peine à attirer les nouvelles générations. “Aujourd'hui, on montre le côté idyllique et performance. Mais ce n’est pas dans la réalité. La réalité est tout autre dans les campagnes”, déplore Marie-André Besson, coprésidente de l’association Solidarité Paysan qui vient en aide aux agriculteurs.
Cette aide, la filière en a bien besoin. “Heureusement qu’il existe le monde associatif”, souffle Marie André Besson. Procédure judiciaire, administrative, endettement, défaut de transmission, nouvelles normes environnementales, la liste des défis au cœur du monde agricole s’allonge presque de jour en jour.
Entre 2010 et 2020, on recense la fermeture d’environ 200 exploitations par semaine. Une conséquence évidente de la hausse des prix des terres agricoles, mais également d’une difficulté présente dans le quotidien des paysans : la difficulté de transmission. “Jamais la profession agricole a connu autant de troubles dans les processus de transmission. Il y a un décalage entre l’offre et la demande des structures en France”, explique François Purseigle, sociologue, spécialisé dans le monde agricole.
Confrontées aux grands industriels, les petites et moyennes exploitations s’enfoncent dans une crise profonde. “Les familles d’agriculteurs qui ne souhaitent plus forcément voir leurs enfants s’installer. Les mécanismes de transmission sont parfois encore trop inégalitaires”, soulève l’auteur de l’ouvrage “Une agriculture sans agriculteur”.
Le secteur de l’agriculture peine à attirer. Aujourd’hui en France, l’Insee décompte moins de 400 000 chefs d’exploitation, c’est quatre fois moins qu’en 1982. La filière perd une force démographique chaque année. Le monde agricole représente 1,5 % de la population active, contre 7,5 % il y a 40 ans. Cette force démographique en baisse ne se reflète pas sur les plateaux de télévision et dans les décisions politiques.
“Il demeure une force sociale et politique du côté des agriculteurs. C’est pour cela que les politiques aiment se promener dans les travées du salon de l’Agriculture. Ils sont dotés d’un maillage institutionnel d’organisations que nul autre profession n’a su édifier et construire”, décrypte François Purseigle.
Autant d’organisations syndicales, de fédérations et autres chambres d’agriculture qui permettent à la profession de se maintenir en tant que force politico-médiatique dans un pays où le futur de la profession est instable.
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