Avant la réouverture de Notre-Dame de Paris, cette semaine dans le dossier de la rédaction, RCF revient sur les grandes étapes de la vie de la cathédrale avec comme invité Bruno Seillier. Il est metteur en scène directeur artistique auteur en autre de la scénographie "d’Eternelle Notre Dame". Ce matin gros plan sur une période sombre de l'histoire de l'édifice : la Révolution française.
Après la construction et le pouvoir royal, nous penchons sur une période difficile pour la cathédrale : la Révolution française. Pourquoi Bruno Seillier Notre Dame a-t-elle été autant prise pour cible durant cette période ?
Au début de la Révolution, tout se passe bien. La cathédrale est encore utilisée. Un veni creator y est chanté à l'ouverture des états généraux. Et puis à nouveau, à une nouvelle messe, à l'occasion du 4 février 1790, lorsque le roi Louis XVI promet de suivre la Constitution. Mais petit à petit, les choses vont se gâter. L'aspect anti-catholique de la Révolution s'affirme. Et à partir de 1793, les destructions organisées, voulues, planifiées commencent et vont frapper Notre-Dame pendant plusieurs années.
Quelles sont les dégradations commises à l'époque ?
Les choses les plus visibles, ce sont toutes les statues, notamment de la façade. Les tympans sont martelés, la grande galerie des rois est complètement mise à terre, les rois décapités. Pendant un certain temps, les statues restent sur le parvis. Ça devient même des latrines et pour des raisons d’hygiène, on les évacue pour les enterrer. Les cloches sont toutes descendues, à l'exception d'une seule. La France est en guerre, sur de multiples fronts. Elle a besoin de boulets, elle a besoin de balles. Et donc toutes les cloches notamment celles de Notre-Dame, sont fondues. Les objets liturgiques sont pillés, les reliquaires fondus. Tout ce qui rappelle la monarchie, les fleurs de lys, les emblèmes royaux, est brisé. Notre-Dame n'est pas atteinte dans ses fondations, mais dans tout son décorum, son habillage est abîmé. Le danger commence.
A partir de 1793, les destructions organisées, planifiées commencent et vont frapper Notre-Dame pendant plusieurs années.
Le danger commence. Notre-Dame de Paris a même été un entrepôt, un entrepôt de vin…
Notre Dame va être désacralisée le 10 novembre 1793. La cathédrale abrite la fête de la Raison. Et effectivement, on va même jusqu'à entreposer le vin à destination des armées dans la nef et les bas-côtés. Notre-Dame de Paris devient un gigantesque cellier.
Pourtant, les révolutionnaires vont en faire le temple de la Raison.Dans l'esprit de l'époque, on conserve l’idée que c’est un lieu qui n'est pas comme les autres ?
Robespierre, avec la Convention, s'est dirigé rapidement vers un régime athée, totalement laïc. Mais Robespierre a quand même senti qu'il fallait quand même quelque chose. On ne détruit bien que ce qu'on remplace. Et donc il a imaginé le culte à l'être suprême et cette fête de la Raison. Alors ça ne va pas mordre, mais on va effectivement essayer, comme le coucou, d’installer ce nouveau culte dans les lieux de l'ancienne religion. C'est donc tout naturellement que Notre-Dame va abriter quelques cérémonies. Mais ça ne va pas prendre dans le temps.
Il faut attendre 1802 pour que Notre-Dame de Paris soit restituée au culte catholique.
Napoléon Bonaparte cherche un lieu pour son sacre. Il a hésité entre plusieurs et puis finalement, il opte pour Notre-Dame. On va alors construire, des baldaquins, tout un décor avec un grand nombre de draperies aussi, de drapeaux, d'estrades, pour cette fameuse cérémonie du sacre qui sera immortalisée par David. Il faut savoir que lors du Concordat, cette paix religieuse voulue par Bonaparte pour éteindre la guerre en Vendée et dans d'autres départements français. L'archevêque de Paris est le premier évêque concordataire nommé. Cela montre bien que Notre-Dame est bien la mère des cathédrales et que pour rebâtir la paix civile, la paix religieuse, on commence par Paris. Et donc le culte catholique revient effectivement à Notre-Dame.
Napoléon Ier ne choisit donc pas Notre-Dame, pas par hasard ?
Oui, c'est une volonté de retisser le fil des siècles qui avait été interrompu par la Révolution française. Il y a ce but de réinstaurer une légitimité, et donc réinstaurer une nouvelle dynastie. Mais il veut installer sa légitimité, et donc il se place dans la suite des siècles. C'est cette manière pour lui aussi de ramener la paix, et de rassembler le peuple français.
Et dans ce moment, Notre-Dame de Paris reste quand même dans un état lamentable.
Le sacre de Napoléon cache la misère, mais il manque des vitraux, beaucoup d'endroits sont altérés. Notre-Dame attend encore une restauration qui ne vient pas. Il faudra avancer un petit peu plus dans le XIXe siècle pour que des grandes plumes, des grandes voix s’élèvent pour sauver la cathédrale.
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