Avant la réouverture de Notre Dame de Paris les 7 et 8 décembre. RCF vous propose de remonter le temps et de redécouvrir les grandes étapes de la vie de la cathédrale depuis sa construction jusqu’à l’incendie de 2019. Notre guide est Bruno Seillier, metteur en scène, auteur de plusieurs spectacles sur Notre Dame.
Dernière étape de la longue histoire de Notre-Dame de Paris. Après sa naissance, après la question du pouvoir royal, la Révolution française, la rénovation de Viollet-le-Duc. Bruno Seillier on aborde une période plus contemporaine. Bizarrement, Notre-Dame de Paris n'est entrée au patrimoine mondial de l'UNESCO qu'en 1991.
Effectivement, ça paraît assez tardif, Notre Dame est classée au titre du patrimoine en France dès 1863. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a la volonté de la part de l'UNESCO de prendre aussi en ligne de compte l'ensemble d'un périmètre urbain pas seulement un monument seul. Donc c'est à l'occasion de la volonté de protéger les rives de la Seine que la protection est étendue à Notre-Dame, ou qu'elle permet aussi la protection des rives de la Seine.
L'UNESCO évoque à l’époque "un chef-d'œuvre architectural et une référence de l'architecture gothique". Finalement, Notre-Dame a toujours été, cette référence.
Oui, avec d'autres, elle partage à mon avis ce trône avec d'autres cathédrales comme Chartres, Sens, Beauvais, Amiens, Reims. Elles ont toutes une particularité en fonction de la période de leur édification. Mais c'est vrai que Notre-Dame de Paris est l'une des premières et une de celles qui va présenter de façon la plus réussie les différents ingrédients faisant la spécificité de l'art gothique. C'est la mère des cathédrales. Donc c'est effectivement ça que l’UNESCO a voulu saluer.
En 2013, Notre-Dame fête ses 850 ans, mais elle a subi les outrages du temps, depuis la rénovation de Viollet-le-Duc. Quel est l'état à ce moment-là, de la cathédrale ?
Pour l'an 2000, il y a eu tout un nettoyage, un sablage de la façade. Mais cette façade couleur ambre, cette pierre de l'île de France qui est si belle, cache un petit peu l'état véritable de la cathédrale. Les désordres sont nombreux, régulièrement, des pierres tombent, des pinacles. Les pierres qui entourent certaines barrettes métalliques des vitraux ont aussi éclaté par le gel, par les intempéries, par les attaques acides dues à la pollution. À partir de 2013, des diagnostics profonds sont réalisés et on prend conscience que Notre-Dame est en péril et donc des grands chantiers vont être préparés.
Et en 2018, débute donc le grand chantier de la rénovation de Notre-Dame de Paris. Qu'est-ce qui était prévu ?
Au départ, la volonté de restaurer la flèche de Viollet-le-Duc, très encrassée. Les sculptures aussi de la flèche, notamment le collège apostolique. Les douze apôtres ont d’ailleurs été déposés très peu de temps avant l'incendie, le 11 avril 2019. Les arcs-boutants menacent aussi avec les pinacles, rajoutés par Viollet-le-Duc au sommet des arcs. Il faut s'intéresser à beaucoup de points. Donc c'est un vaste chantier qui débute. On ne se doute pas qu'il va être interrompu par un événement dramatique.
L'incendie se déclenche le 19 avril 2019. Il va rester dans toutes les mémoires. On se souvient du combat héroïque des sapeurs-pompiers de Paris pour sauver la cathédrale. Au final, qu'est-ce que l'on a pu conserver ? Qu'est-ce que l'on a réellement perdu dans ce sinistre ?
Ce qu'on a perdu, forcément, c'est la partie la plus visible. La flèche de Viollet-le-Duc qui couronnait Notre-Dame. C'est aussi la charpente du Moyen Age, la forêt, comme on l'appelait, composée de 1300 chênes. Ce qui représente 21 hectares de forêt. Tout le toit en plomb a disparu. Une partie des voûtes du transept se sont effondrées, notamment la croisée du transept, qui est la croisée entre la nef, le cœur et le transept. Cette voûte s'est effondrée avec une partie de la flèche sur le maître-autel de 1989, celui qui avait été consacré par Mgr Lustiger.
C'est miraculeux qu'autant de choses aient été préservées.
Tout cela apparaît énorme, et pourtant, Notre Dame est debout.
Ce qui a été sauvé, c'est l'essentiel. D'abord, elle, la cathédrale, et puis les reliques de la Passion, le maître-autel au fond, du cœur, la Pietà, du XVIIIe, la statue de la Vierge au pilier, auprès de laquelle s'est convertie Claudel. Les poutres en s'effondrant sont tombées à quelques centimètres d'elle, mais elle est restée là, debout, elle a été sauvée.
L'orgue a été encrassé mais il est intact. Les roses aussi n'ont pas souffert malgré la chaleur. Elles ont tenu bon. Les vitraux, les stèles du cœur XVIIIe sont sauves. C'est en fait miraculeux qu'autant de choses aient été préservées. Quand on voit la chaleur de l'incendie, sa durée et son étendue.
Il y a une autre chaleur dont on va parler, c'est l'élan de générosité tout de suite après l'incendie. 340 000 donateurs dans le monde, 846 millions d'euros récoltés pour financer la rénovation. Ça ne, c'était jamais vu.
J'ai eu la chance de me déplacer aux Etats-Unis peu de temps auparavant, en 2017, pour rencontrer justement des donateurs de Notre-Dame. L'amour des Américains que j'ai rencontrés pour la cathédrale est incroyable. Effectivement, ce mouvement de générosité, des petites gens aux grandes fortunes est inédit. Notre Dame est au patrimoine mondial UNESCO, mais elle est d'abord un patrimoine mondial des cœurs et de la foi. C'est stupéfiant de voir la rapidité pour réunir la somme permettant de réaliser le chantier de reconstruction. C'est quelque chose qui, je pense, n'avait jamais été fait dans l'histoire de l'humanité.
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