
LE POINT DE VUE DE STEPHANE VERNAY - Le lundi 31 mars, avait lieu le jugement de l'affaire dite des assistants parlementaires du Front national qui a formidablement fait parler de lui, allant jusqu'à provoquer des réactions de soutien d'Etats ennemis de la France mais amis de Marine Le Pen, comme la Russie, la Hongrie ou les Etats-Unis. Une affaire qui anticipe les élections présidentielles et qui change leur configuration.
Marine Le Pen n'est pas en prison et reste même présumée innocente des charges retenues contre elle jusqu'à épuisement des recours dans le long feuilleton judiciaire qui reste à venir. Les 25 personnes condamnées en première instance le 31 mars avaient 10 jours pour interjeter appel de la décision du tribunal, soit jusqu'au jeudi 10 avril inclus. Treize, sur les 25, ont fait appel de la décision les concernant à l'issue de ce délai, dont Marine Le Pen, qui sera rejugée en appel début 2006. C'est à ce moment là, et à ce moment là seulement, que l'on saura si oui ou non Marine Le Pen pourra se présenter à l'élection présidentielle de 2027.
Cette "affaire Le Pen" intéresse presque plus. Regardez les "grandes mobilisations" organisées autour de cette affaire : celles tenues en faveur de Marine Le Pen le dimanche qui a suivi sa condamnation ont fait un flop ; et celles organisées ce samedi, pour défendre la justice et la démocratie, ont fait un flop encore plus grand. Je peux vous assurer également qu'à Bruxelles, où je me suis rendu la semaine dernière, les eurodéputés n'avaient que les frasques des droits de douane de Donald Trump en tête, et plus les millions d'euros d'argent public européen que le Rassemblement national est accusé d'avoir détourné.
Pour être tout à fait franc avec vous, je dirais que chez nous aussi, on est passé très vite à autre chose. Et cet autre chose, en politique, s'appelle la préparation de l'élection présidentielle.
Les nombreux sondages d'opinion effectués après l'annonce du verdict du 31 mars disent à peu près tous la même chose : près d'un Français sur trois se dit prêt à voter RN à la présidentielle de 2027 quoi qu'il arrive. Que ce soit pour Marine Le Pen ou pour Jordan Bardella si la championne du parti était empêchée de se présenter.
Près de 35% des votes exprimés, c'est énorme. Et ça nous dit deux choses. Un, que les sympathisants du Rassemblement national continueront à soutenir le Rassemblement national quoi qu'il advienne, détournement de fonds publics ou pas, il ne changeront pas. Et deux, obtenir 35% des voix au premier tour de la présidentielle, c'est énorme. C'est l'assurance d'avoir son candidat qualifié pour le second tour. Mais ça ne suffit pas pour remporter l'élection. Si deux Français sur trois ne veulent pas de vous à l'Elysée, ça veut dire que le gagnant de 2027 sera à nouveau l'autre. L'autre candidat qualifié au deuxième tour face au candidat du Rassemblement national.
Alors ça, les Français et les Françaises ne l'ont peut-être pas perçu, mais je peux vous garantir que les états-majors de tous les partis politiques l'ont bien compris. Et ça change tout. Parce que cette configuration confirme que chaque camp va impérativement devoir se présenter uni à l'élection de 2027.
Si droite, gauche ou centre ont plus d'un candidat pour les représenter, vous pouvez être à peu près sûr qu'ils ne décrocheront pas leur place en finale. Et qu'ils perdront la présidentielle. Les partis le savent et je peux vous garantir qu'on n'a pas fini d'en parler. La question est au cœur des élections internes qui se jouent en ce moment chez Les Républicains, chez Les Ecologistes comme chez Les Socialistes. Elle va littéralement déchirer le bloc central et la gauche dans les mois qui viennent. Et ce n'est pas le résultat du jugement en appel de Marine Le Pen, en 2026, qui changera quoi que ce soit à cette affaire.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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