C’est le film de Justine Triet, "Anatomie d’une chute" qui a reçu la Palme d'or à Cannes. Ce film était le coup de cœur que l'on attend chaque année sur la Croisette. Un vrai grand film de cinéma, à la croisée des genres.
Le beau temps s’est enfin installé après des premiers jours extrêmement pluvieux. Il faudra un jour que les experts se penchent sur l’impact de la météo sur l’humeur des festivaliers et la réception des films ! Ce qui est sûr c’est que chaque année on attend le coup de cœur qui va enflammer le festival. Et il est arrivé sur le tapis rouge en même temps que le soleil, dimanche dernier ! C’est le film de Justine Triet, "Anatomie d’une chute". Un vrai grand film de cinéma, à la croisée des genres.
"Anatomie d’une chute", c'est à la fois une enquête policière, un film de procès et une quasi-psychanalyse familiale, porté par une actrice exceptionnelle, Sandra Hüller, qui mériterait largement le prix d’interprétation féminine. À l’écran, son couple est disséqué sous nos yeux pour tenter de comprendre comment son mari Samuel est mort. Son corps est retrouvé au pied de leur chalet, par leur fils Daniel, au retour d’une promenade. S’agit-il d’un meurtre, d’un suicide, d’un accident ? C’est tout l’enjeu du film. Répondre à cette question passe bien sûr par une réponse judiciaire nécessaire mais le film nous emmène bien plus loin, dans la quête d’une vérité humaine tellement plus vaste et complexe. Le jeune Daniel, mal-voyant et au prénom de prophète, nous ouvre le chemin. Un chemin qui passe par son intériorité la plus profonde. C’est captivant et bouleversant !
Sur les plus de vingt films que j'ai visionné, trois m’ont particulièrement marquée. D'abord, et par ordre chronologique : "Monster", le nouveau film de Kore-eda, qui était déjà en compétition l’année dernière avec "Les Bonnes étoiles", qui avait reçu le Prix du Jury œcuménique. Hirokazu Kore-eda revient ici avec un film un peu déstabilisant au début où on est un peu perdus. Il est construit à la façon de "Rashōmon", en trois points de vue successifs autour des mêmes faits, vécus par une mère célibataire qui accuse un professeur de violences sur son fils - ce même professeur qui suspecte un cas de harcèlement entre deux élèves - puis le point de vue des deux jeunes garçons traversés par une attirance mutuelle. Comme toujours chez Kore-eda on frôle la perfection dans la manière de filmer l’enfance et dans la construction scénaristique à tiroirs. Avec une scène finale lumineuse et très ouverte.
Autre coup de cœur, "Les Herbes sèches", de Nuri Bilge Ceylan, chef de file du cinéma turc. Lui aussi habitué du festival et déjà palme d’Or en 2014 pour "Wintersleep". L’histoire se passe comme toujours dans les sublimes paysages reculés de l’Anatolie. Dans un petit village enneigé, un triangle central de personnages pris dans les filets de la vie, de l’amour, des jalousies, des fantasmes et des frustrations. Entre un professeur désenchanté qui rêve d’une mutation, son co-locataire et collègue, et une jeune femme qu’ils rencontrent, revenue vivre chez ses parents après un grave accident. Chez Nuri Bilge Ceylan, il y a toujours une large place laissée aux dialogues pour explorer toute l’ambivalence des sentiments humains. C’est puissant et profond et la photographie est somptueuse.
Enfin, "Les Feuilles mortes", d'un autre habitué du festival, Aki Kaurismäki, déjà primé aussi du jury œcuménique pour "L'Homme sans passé". Il faut être sensible à l’esthétique froide et minimaliste du réalisateur finlandais, et à son humour noir et grinçant. Ça me met à distance de mes émotions. Mais en quelques plans, sur fond de guerre en Ukraine, omniprésente par la radio, il dépeint de façon cruelle la précarité économique et la solitude moderne, tout en cherchant par où la lumière et l’espérance va pouvoir se frayer un passage.
Quatre films qui seront peut-être eu palmarès final ce samedi. Avec des sorties dans les salles françaises prévues entre le 2 juin et le 20 septembre.
Le mercredi c'est le jour où sortent les nouveaux films au cinéma. C'est aussi le jour pour écouter, à 8h45, La Chronique cinéma de Valérie de Marnhac !
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