Christophe Henning, chaque jeudi, nous recommande une perle de la littérature dans la Matinale. Cette semaine, il nous présente "Comme un roman" de Daniel Pennac, aux éditions Folio.
Je vais vous faire une confidence : cette semaine, ce que j’ai eu entre les mains ne m’a pas convaincu – ça arrive - et ces derniers jours, je n’ai pas assez lu pour vous dégoter un livre coup de cœur à recommander à nos chers auditeurs.
Et je me suis souvenu des "droits du lecteur" que Daniel Pennac avait inscrit en quatrième de couverture de son livre "Comme un roman", publié, tenez-vous bien, en 1992.
Un essai sur la lecture toujours d’actualité, qui montre avec brio que la lecture, ça se transmet, n’oublions pas que le romancier a été prof de français avant de connaître le succès. Et donc, au fil des pages, Pennac distille "les droits du lecteur" qu’il rassemble en dix préceptes. Et le premier des droits du lecteur, décrète-t-il, c’est le droit… de ne pas lire. Je n’en userai pas, ce serait risqué de n’avoir rien à vous dire la semaine prochaine.
Ce sont surtout des recommandations, des droits édictés pour décomplexer les lecteurs, notamment les jeunes lecteurs, et les professeurs de lettres n’ont pas manqué de confier à leurs élèves ces quelques prescriptions comme, droit numéro 2, "le droit de sauter des pages" ou encore, droit numéro 3, "le droit de ne pas finir un livre." Bon d’accord, dit comme cela, ça peut paraître un peu réducteur, voire négatif. En même temps, lire sous la contrainte n’est pas très efficace : "On ne force pas une curiosité, on l’éveille," a écrit le professeur Pennac.
La suite du "décalogue" littéraire est plus enthousiaste : le lecteur a le droit de relire un livre, il a le droit de lire n’importe quoi, il peut lire n’importe où. En fait, tout est permis au lecteur, qui a le droit de grappiller, survoler des pages, commencer par la fin, revenir en arrière. Et pourquoi pas lire à haute voix, propose même l’auteur de la saga Malaussène, dont les plus anciens fans de Daniel Pennac se souviennent. Il édicte encore "le droit au bovarysme," que nous pouvons comprendre comme souhaité que le rêve, la fiction, devienne réalité.
Des lycéens ont imaginé ajouter des droits comme "le droit de réécrire l’histoire" ou encore "le droit de s’endormir en lisant" et pourquoi pas "le droit de rire en lisant…" Et vous-même, quel droit revendiquez-vous ? Reste un dernier droit évoqué par Daniel Pennac et dont je n’userai qu’à la fin de cette chronique, "le droit de se taire." En effet, nous en faisons tous l’expérience : il nous arrive d’être dans le livre, nous côtoyons les personnages, ils nous agacent, nous séduisent, nous fascinent, nous hypnotisent… au point qu’il est impossible d’en parler à qui que ce soit : ils ne comprendraient pas.
Il n’y a rien de plus inutile que lire et pourtant tellement essentiel… C’est encore Pennac qui nous donne une piste : "La vertu paradoxale de la lecture est de nous abstraire du monde pour lui trouver un sens." C’est vrai, les livres nous racontent le passé et inventent l’avenir, nous parlent des guerres et des conquêtes amoureuses, des drames, des rois, des reines et des misérables…
Et pourquoi pas relire le Comte de Monte-Cristo avant de découvrir la version ciné, Ou la saga des Malaussène avec La petite marchande de prose s’attaquer à Moby Dick avec les droits décomplexés que nous accorde Daniel Pennac, à savoir, passer des pages ou grappiller… Il n’y a guère qu’avec les polars qu’on ne peut pas vraiment s’amuser à piocher l’une ou l’autre page : il risque de nous manquer des indices pour résoudre l’affaire. En attendant, lisez donc, ce que vous voulez, quand vous voulez… Sans oublier une dernière leçon de Monsieur Pennac : "Le temps de lire, comme le temps d’aimer, dilate le temps de vivre." Allez, j’exerce mon droit de me taire…
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