LE MOT DE LA SEMAINE - La tempête Herminia ravage l'Ouest de la France métropolitaine depuis dimanche 26 janvier au soir. Aujourd'hui, Jean Pruvost revient sur le mot "intempéries", qui a des répercussions bien réelles sur le pays.
Le vent, la pluie intense, la tempête, tout cela fait partie de ce que l’on regroupe sous ce nom aujourd’hui généralement mis au pluriel,
« les intempéries », un mot dont les origines et l’histoire méritent d’être éclairées. Penchons nous tout d’abord sur son berceau étymologique.
Il suffit de consulter la première édition du Dictionnaire de l’Académie française, publiée en 1694, et le Dictionnaire de la langue française d’Émile Littré, publié en 1873, pour bénéficier à chaque fois d’un renvoi à un autre mot, et on devine qu’il s’agit du mot « tempéré ». Tout commence en effet ici par le verbe latin « temperare » qui s’assimilait au fait de « garder la mesure », de « modérer l’excès de quelque chose », de l’« adoucir ». Il venait lui-même de « tempus », désignant un « temps favorable », et c’est avec ces significations que le verbe « tempérer » est entré en français au milieu du XII e siècle, et son participe passé, « tempéré », au XIII e siècle. signifiant naturellement « modéré ». Ainsi, dès la première édition du Dictionnaire de l’Académie on lira qu’on peut « tempérer le froid par le chaud, tempérer l’aigre par le doux » et, s’agissant du corps, « tempérer une ardeur d’entrailles par des tisanes rafraîchissantes ». Et le participe passé ayant comme il est joliment dit « les significations de son verbe », viennent les « climats tempérés », ces derniers étant ceux « où il ne fait ni trop chaud ni trop froid ».
« Intempéries » est attesté en langue française en 1534, issu en droite ligne du latin « intemperies », excès, dérèglement, avec au reste un adjectif devenu archaïque, « intempéré », que l’on retrouve doté d’un exemple plaisant dans la première édition du Dictionnaire de l’Académie, exemple où je me sens clairement visé : « C’est un homme intempéré en toutes choses, il est très intempéré dans son boire et son manger. » Bon… je ne le suis pas dans « le boire », mais mon épouse vous dira que je le suis hélas dans le « manger » ! Mais revenons à l’intempérie, alors au singulier, ainsi précisée : « On souffre beaucoup de l’intempérie de l’air », suivi d’un exemple physiologique : « les corps se ressentent de l’intempérie des saisons », ou encore « cet homme est malade d’une intempérie d’entrailles ». Je vous rassure, ce n’est pas mon cas… Il faudra attendre l’édition de 1835 pour qu’apparaisse le pluriel qui va devenir ensuite omniprésent avec cet exemple : « Être exposé à toutes les intempéries de l’air, ou simplement, à toutes les intempéries. » Arrière nos entrailles, et on ne fera plus maintenant allusion qu’aux « dérèglements dans les conditions atmosphériques », en précisant dans tous les dictionnaires, que le mot se dit surtout au pluriel.
En évitant de penser à un fromage d’appellation bien proche. Que sont en effet les « intempéries » ? Un « caprice des cieux » bien sûr... « Ô temps, suspends tes caprices… » aurait pu dire
Lamartine ! On formule en tout cas ce vœu climatique.
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