Jean Pruvost profite du 25 novembre et de la Sainte-Catherine pour revenir sur l'histoire d'une tradition, celle des catherinettes. On a pour habitude de célébrer les femmes âgées de plus de 25 ans et non-mariées, une fête avec une longue histoire et un avenir incertain.
Aujourd’hui, c’est la Sainte- Catherine et il s’impose donc un mot et une tradition, celle des « catherinettes », un mot qui bénéficie d’une plus longue histoire qu’il n’y paraît… Tout d’abord s’impose bien entendu de dire joyeusement « bonne fête » à chaque Catherine qui nous écoute. Et ensuite, impossible bien sûr de ne pas s’intéresser à ce mot, « catherinette », qu’on ne trouvera pas dans nos dictionnaires du XVII e siècle. Au reste dans ces dictionnaires, Catherine s’orthographie alors sans h, et en 1787 l’abbé Féraud, suggère encore dans son propre
dictionnaire de l’écrire sans h et avec un accent aigu, ce qui laisse supposer une prononciation aujourd’hui disparue, « catérine ».
Il faut en fait attendre le Dictionnaire de Littré paru en 1873 pour que figure l’article « catherinette », mais avec une définition qui surprend : « Un des noms vulgaires de l’épurge », l’épurge étant une plante purgative. En fait celle-ci est à rapprocher de la « catherinaire », nom donné alors à une forme de tabac, le premier plant introduit en France ayant été offert à Catherine de Médicis. Il nous reste à consulter Pierre Larousse dans son Grand Dictionnaire universel du XIX e siècle achevé en 1876. Et là nouvelle surprise ! voici sa définition : « « Nom que l’on donnait autrefois dans les collèges de Paris aux thèses que l’on soutenait vers la fête de sainte Catherine, patronne des écoliers. » Diable ! Et de fait, nombre de thèses se soutiennent en novembre. Mais voici qu’il nous offre un deuxième sens : « Caterinette. Nom vulgaire des coccinelles. »
Mais alors quand les catherinettes vont-elles désigner des jeunes femmes célibataires ? Eh bien lisons le Trésor de la langue française achevé en 1994 : « Catherinette, jeune ouvrière de la mode fêtant la Sainte-Catherine, c’est-à-dire ayant atteint l’âge de vingt-cinq ans sans être mariée ». Et suit l’explication : « Catherinette. Dérive de (Sainte) Catherine d’Alexandrie, vierge et martyre, patronne des jeunes filles en particulier des ouvrières de la mode. »
Mais encore ? De fait, au début du IV e siècle, l’empereur païen Maximin aurait voulu contraindre Catherine à l’épouser, mais celle-ci refusa en répondant qu’elle était fiancée au Christ : c’est ainsi qu’elle devint légendairement la patronne des jeunes filles non encore mariées.
Sa fête, aujourd’hui désacralisée, a désormais lieu chaque 25 novembre, l’analogie avec les 25 ans étant souvent soulignée, sans oublier que le grec katharos, à l’origine du prénom, signifie « pur ». Rappelons que la Sainte Catherine fut l’occasion d’une tradition chez les modistes célibataires remettant en général à neuf à cette époque-là la coiffe de la statue de la Sainte, d’où coiffer sainte Catherine et l’emploi du diminutif catherinette. En vérité, quand cette coutume battit son plein à la frontière du XIX e et du XX e siècle, on en vint vite à porter des chapeaux extravagants. Il y avait par ailleurs un pendant masculin qui était Nicolas, avec donc saint Nicolas pour saint protecteur. Au fait de coiffer Catherinette correspondait celui de porter la crosse de Nicolas. C’est ainsi que le jour de la Sainte Catherine, les Catherine et Nicolas, employés des maisons de couture, étaient reçu à la mairie et bénéficiaient de petits cadeaux offerts par leur employeur en même temps qu’on leur faisait porter le chapeau préparé par leurs collègues. Tous les autres sens de « catherinette » ont disparu. En somme ils ont été coiffés au poteau. Chapeau !
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