Avant même sa sortie, ce mercredi 9 novembre sur Netflix, la nouvelle saison de la série The Crown a déjà créé de nombreux remous au Royaume-Uni. Les dix épisodes de cette cinquième saison abordent la délicate période de la détérioration des relations puis du divorce entre le Prince Charles et la Princesse Diana. Et l’image de l’actuel Charles III est sévèrement écornée par la série. Cette dernière devient alors un caillou dans la chaussure d’une monarchie fragilisée par la mort d’Élizabeth II.
Pour la première fois, la plateforme Netflix a fini par céder aux pressions en acceptant de préciser dans la bande-annonce de la saison 5, que "The Crown" était une fiction inspirée de faits réels. Il faut dire que la période abordée, la fin des année 90, particulièrement sensible pour les Windsor, est traitée de façon plutôt polémique. Premier ministre à l’époque, John Major a d’ailleurs dénoncé dans la presse britannique les "bêtises malveillantes" de cette série ainsi qu'un "tonneau d'absurdités colporté pour avoir un maximum d'impact dramatique". Le divorce, les tensions avec sa mère, l’adultère : l’image du Roi Charles III est sévèrement écornée, ce qui a provoqué l’ire de la famille Royale. Décryptage avec Marc Roche, journaliste, spécialiste de la monarchie britannique et auteur du livre : Les Borgia à Buckingham (Albin Michel).
Marc Roche : Il est très important de préciser qu'il s'agit d'un docu-fiction, c'est-à-dire basé sur des faits réels, mais qui sont interprétés de manière dramatique ou comique, mais qu'il ne s'agit pas du tout de la réalité. Le problème pour le Palais, c’est que les jeunes générations considèrent la série comme une vérité. Ils n'ont pas connu "l’annus horribilis" de 1990 à 1997. Ils n'ont pas connu la bataille entre Charles et Diana, la séparation, le divorce et surtout, cette saison va leur servir d'introduction à ce qui va être, sans doute, la saison la plus difficile pour le nouveau roi, à savoir la saison 6, qui portera sur la mort de Diana et sur sa campagne pour faire accepter Camilla, sa maîtresse, comme reine consort. Le danger pour la monarchie est réel. En effet, si la cote de popularité de Charles III a fortement augmenté depuis le décès de sa mère, elle reste fragile.
MR : La famille royale est très populaire auprès des générations plus âgées qui sont patriotes et légitimistes. Elle est aussi très populaire parce que c'est un roc dans la tourmente que connaît actuellement le Royaume-Uni. Sur la période abordée par la saison 5, la guerre entre Charles et Diana, la séparation, le divorce : tout a été dit, tout est dans le domaine public.
Charles III doit définir les grandes orientations de son règne et The Crown lui complique la tâche
Le problème réside plus dans le fait qu’aujourd’hui Charles III doit déterminer les grandes lignes de son règne afin de ne pas être vu comme un monarque de transition. Comment façonner ce règne lorsqu’on a 74 ans et qu’on fait face à un Premier ministre qui a tous les pouvoirs et qui ne partage pas vos opinions progressistes ? Le roi est très limité dans sa marge de manœuvre réelle. Il lui reste donc un pouvoir d'influence… qu'il doit définir. Et "The Crown" lui complique la tâche.
M.R : La série et dévastatrice pour l’ancien Prince de Galles. On le voit machiavélique, cruel envers Diana, manipulateur et odieux, alors que c'est lui qui est fautif de la séparation en raison de la reprise de sa liaison avec Camilla après la naissance de Harry en 1984.
Charles III a bien lancé son règne. Jusqu’ici, c’est un sans-faute. Mais tout peut capoter parce que la projection de son image par "The Crown" est très caricaturale et lui fait porter l'essentiel de la responsabilité de l'échec de son mariage et bien sûr, de la mort de Diana.
À LIRE > Notre dossier : Mort d'Elizabeth II, la fin d'une époque
Suivez l’actualité nationale et régionale chaque jour
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !