Le « peintre maudit » le plus célèbre du monde et ses derniers tableaux sont au cœur d’une exposition exceptionnelle, qui s’annonce comme l’un des plus grands événements culturels de ce trimestre. Du 3 octobre au 4 février, le Musée d’Orsay présente « Van Gogh, à Auvers-sur-Oise – Les derniers mois », une exposition riche qui s’intéresse à cette phase cruciale juste avant le suicide de l’artiste.
C’est une commune qui n’est connue que des amateurs d’art. Auvers-sur-Oise, un village situé à deux pas de Cergy, où Cézanne, Pissarro et donc Van Gogh ont posé leur chevalet. Aujourd’hui, ce village est au cœur d’une exposition consacrée au maître néerlandais, qui y passa les deux derniers mois de sa vie, les plus sombres mais aussi les plus prolifiques. Puisqu’entre le 20 mai et son geste fatal dont il meurt 30 heures plus tard, le 29 juillet 1890, Van Gogh y a peint pas moins de 74 tableaux et une cinquantaine de dessins. « Tout ça en 10 semaines, c’est un effort herculéen », s’exclame Wouter Van der Ween, directeur scientifique de l’institut Van Gogh et spécialiste mondial de la vie et de l’œuvre de ce peintre.
S’il a choisi de venir dans cette commune, ce n’est pas pour rien. C’est d’une part pour « mettre ses pieds dans les pas des plus grands artistes » passés par là avant lui, mais aussi parce que c’est dans ce gros bourg que se trouve le docteur Gachet, un spécialiste de la mélancolie (le nom que l’on donnait auparavant à la dépression). Un docteur qui a joué « un rôle absolument essentiel », d’après Wouter Van der Ween, car en plus de l’ausculter et de lui offrir éventuellement une thérapie - à une époque où la connaissance sur les troubles dépressifs est quasi nulle – le docteur Gachet a offert à Van Gogh « un foyer aimant et bienveillant ». Chose que n’avait pas Vincent Van Gogh puisqu’il avait choisi de « sacrifier sa vie de famille au profit de son art », comme le rappelle le spécialiste.
Le portrait du docteur Paul Gachet est d’ailleurs l’un des tableaux les plus célèbres de cette période. Mais il n’est pas le seul ! Dans l’exposition figure également L’Eglise d’Auvers-sur-Oise, une « démonstration de force » aux yeux de Wouter Van der Ween puisque l’église y est représentée à contre-jour, avec un bleu qui deviendra la marque de fabrique du peintre pendant ses dernières semaines. Enfin, l’exposition présente également un tableau plus sombre mais tout aussi célèbre qui est le Champ de blé aux corbeaux. Bien que souvent décrit à tort comme le dernier tableau de l’artiste, ce tableau est en effet « annonciateur de la fin », avec « un procédé optique incroyable, c’est-à-dire une vision panoramique du paysage » commente le directeur scientifique.
Autant de toiles qui sont parvenues jusqu’à nous grâce à « une gardienne extraordinaire » : Johanna Van Gogh, la belle-sœur de Vincent Van Gogh (son frère Léo étant décédé seulement quelques mois après le peintre). « Elle s’est retrouvée à 28 ans, avec un trésor inestimable qu’on lui conseille de brûler, relate Wouter Van der Ween. Dans ce monde misogyne, elle a réussi à s’imposer et à développer des stratégies de marchands d’art absolument époustouflantes ». Des stratégies qui ont permis de disperser intelligemment les œuvres de l’artiste et d’en garder la moitié dans sa famille. Et qui permettent d'avoir une exposition quasi-complète sur cette période.
Chaque semaine, Thierry Lyonnet donne la parole à un acteur de l'actualité culturelle. Écrivains, metteurs en scènes, peintres, etc., parlent de leur travail et de leurs œuvres.
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