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Covid, dengue, Ebola... Les maladies du changement climatique

Un article rédigé par Frédéric Mounier, Odile Riffaud - RCF, le 18 janvier 2024 - Modifié le 21 janvier 2024
Où va la vie ? La bioéthique en podcastChangement climatique, nouvelles maladies 1/3

 

Covid, dengue, maladie de Lyme, Ebola : depuis vingt ans, il y a de plus en plus de maladies infectieuses émergentes. Un phénomène planétaire lié au réchauffement climatique, qui bouleverse nos économies et met en danger nos vies. Or, tout part de virus transmis lors de contacts entre l'homme et l'animal sauvage... 

 

La déforestation augmente la densité d'animaux sauvages et multiplie leurs contacts avec l'être humain ©UnsplashLa déforestation augmente la densité d'animaux sauvages et multiplie leurs contacts avec l'être humain ©Unsplash

 

Le SRAS en 2003, H1N1 en 2009, Ebola en Afrique de l’Ouest entre 2013 et 2014, Zika en 2015 en Amérique latine et le Covid 2019... Depuis une vingtaine d'années, le nombre de maladies infectieuses émergentes est en augmentation. Directement lié à la crise écologique et au réchauffement climatique, ce phénomène nous oblige à revoir nos modes de vie.

 

De plus en plus d’êtres humains

Qu’est-ce qu’une maladie infectieuse émergente ? Ce sont des zoonoses, ces maladies ou infections qui se transmettent des animaux vertébrés à l’être humain. Il s’agit de "virus qui vivent chez l’animal et qui, en franchissant ce que l’on appelle la barrière d’espèce, deviennent contagieux pour l’Homme et éventuellement se transmettent d’Homme à Homme".

Une des causes, c’est l’augmentation de la densité de population sur la planète. Comme le dit Arnaud Fontanet, "elle a été multipliée par quatre au XXe siècle". Nous sommes aussi de plus en plus urbains : "une fois que les pathogènes sont arrivés en zone urbaine, leur dissémination est grandement facilitée" dans les villes. Ainsi, le moustique Aedes aegypti s’est "urbanisé", décrit Arnaud Fontanet. "Il est devenu exclusivement anthropophile et s’est installé là où les hommes vivent, dans les bidonvilles des grandes mégalopoles de pays tropicaux, et il transmet la fièvre jaune, la dengue, le Chikungunya…"

 

Faut-il voyager moins ?

Nous sommes également de plus en plus mobiles. "Est-on prêt à renoncer à cette mobilité incroyable ?" questionne le Pr Robert Barouki. "On dit que par génération, la distance parcourue par un être humain a été multipliée par dix à chaque génération."

Cette extrême mobilité accroît un phénomène de globalisation des maladies. On ne peut plus classer des problèmes de santé comme étant propres au Nord ou au Sud. On parle aujourd’hui d’un phénomène de "santé globale", dans lequel ne sont plus réservées au pays du Nord les maladies cardiovasculaires, cancers et autres maladies neurodégénératives. Le Sud n’est plus exclusivement le lieu des maladies tropicales.

Dans un contexte de réchauffement climatique, les virus qui voyagent se déploient à la faveur des températures. Ainsi, ceux que transportent le moustique tigre, de l'espèce Aedes albopictus, arrivé dans le sud de la France il y a 20 ans. "Le réchauffement des températures contribue au développement de l'espèce", prévient Arnaud Fontanet. Comme l'explique Isabelle Roussel, professeur émérite de climatologie à l’université de Lille, "la température est à la source de phénomènes et de changements de variations profondes".

 

La déforestation augmente la densité d’animaux sauvages dans les forêts restantes

 

"Laisser les animaux sauvages où ils sont"

Tout commence donc quand l’être humain entre en contact avec des animaux sauvages. Ce qui se fait quand l’humain chasse ou quand il abat des forêts. "La déforestation augmente la densité d’animaux sauvages dans les forêts restantes, précise Arnaud Fontanet, ce qui fait que quand les hommes pénètrent dans ces forêts, ils sont plus à risque d’être en contact avec des animaux sauvages." 

Ou, lorsque l’espace dédié à l’élevage s’étend sur le territoire d’animaux sauvages, les virus se transmettent aux espèces domestiques puis à l’humain. "Les opportunités de franchissement de la barrière existent et c’est contre ça qu’il faudrait lutter, estime l'épidémiologiste, je pense qu’il faut laisser les animaux sauvages où ils sont !"

Pour prévenir les maladies infectieuses émergentes il faudrait par exemple fermer les marchés d’animaux sauvages en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est. Pour Arnaud Fontanet, "on ferait un pas énorme dans la prévention de la maladie", mais c’est à un marché colossal que l’on s’attaque…

 

→ À LIRE : L'homme et l'animal : la prise de conscience d'une interdépendance

 

Un bouleversement total

On l'a vu avec la pandémie de Covid, prendre en charge et freiner les maladies infectieuses émergentes a un lourd impact sur l’économie. "La pandémie de Covid a coûté 12.500 milliards de dollars, 300 milliards d’euros France", rappelle l’épidémiologiste de l’Institut Pasteur.

En plus d'un fort impact économique, l'exercice de la médecine est bousculé. Puisque ces maladies sont liées à l’environnement, les médecins ne sont plus les seuls agents de la prévention. "C’est aussi un changement qui affecte beaucoup la manière dont on prend en compte ces maladies environnementales qui dépend des attitudes, des comportements", analyse Isabelle Roussel, professeur émérite de climatologie à l’université de Lille. Quant aux individus, surgit dans leur psychisme un sentiment d’extrême vulnérabilité.

La multiplication des maladies infectieuses émergentes nous oblige à modifier notre propre perception de l’être humain. "Par rapport à une vision peut-être très individualiste, séparée de l’être humain, soulève le philosophe Éric Charmettant, on entre dans une dimension relationnelle très forte." Il nous faut désormais penser l’humain comme étroitement dépendant de son environnement, ce qui ajoute en complexité. Penser l’individu comme un holobionte, par exemple, permet de l’appréhender comme étant habité d’organismes : de type le microbiote…

 

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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