Marseille
Il est rabbin dans les quartiers nord depuis 25 ans. On l’a vu dans les lycées, aux rencontres méditerranéennes ou encore à Notre Dame de la Garde aux côtés de prêtres, imams et même des supporters de l’OM. Infatigable défenseur du dialogue entre les religions, il prône un message de paix et de fraternité dans un contexte international explosif. Rencontre avec Haïm Bendao dans l'émission M comme Midi au micro de Sophie Lecomte.
L'événement est presque passé inaperçu le 24 octobre dernier: un rabbin, un prêtre et un imam qui se serrent dans les bras sous le regard bienveillant de la Bonne Mère et des supporters de l’OM. Des images fortes qui disent la paix et la fraternité là où les mots peinent à le faire.
Le rabbin c’est Haïm Bendao. Modeste, il ne veut pas ramener la couverture à lui et précise que l’idée vient de Rachid Zeroual, le leader des South Winners, le groupe des supporters de l’OM.
Difficile à croire mais Haïm Bendao n’est pas marseillais d’origine mais de cœur, il l’est indéniablement. Il habite la cité phocéenne depuis 25 ans.
“J’ai grandi dans le 93 et on ne peut pas jouer un rôle. Le politiquement correct ça ne passe pas, l’accolade avec l’imam vient du fond du coeur, je ne l’aurais, peut-être, pas fait avec un autre (...). Les gens d’en haut ne comprennent pas toujours le peuple d’en-bas et le peuple d’en bas a des codes que les gens d’en haut n’ont pas (...). Si je m’entends bien avec Rachid et avec l’imam, c’est du sincère, c’est la force des gens des quartiers !” lance-t-il.
Pour autant, est-ce que son quotidien a changé depuis le 7 octobre et les attaques du Hamas sur Israël ? “J’ai trouvé un accueil aussi chaleureux que d’habitude, avec, peut-être, quelques frictions dans le dialogue en sachant que c’est un sujet explosif où on est dans l’émotion” explique le rabbin des quartiers Nord. “On ne peut pas être détaché en tant que juif de ce qui se passe là-bas, pareil pour mes confrères musulmans (...) il ne faut pas se servir de ce qui se passe là-bas pour créer des camps, ici, avec des polémiques ou de la haine (...). On a fait une conférence de presse à la mosquée des bleuets avec l’imam avec qui je travaille depuis des années. Pour l’imam c’est un choix fort de sa part d’avoir dit oui “ poursuit-il.
On ne peut pas être détaché en tant que juif de ce qui se passe là-bas, pareil pour mes confrères musulmans.
C’est foncièrement un homme de paix, Haïm Bendao, il aime créer du lien et des ponts entre les gens pour instaurer un dialogue du cœur. Humblement, il reconnaît: “je n’irai pas jusqu’à régler ce qui se passe là-bas mais je n’ai pas à importer ce qui se passe là-bas, ici”.
Il intervient souvent dans les écoles avec un prêtre et un imam. Il se désespère parfois de voir certains jeunes qui ne savent pas ce qu’est un juif mais à la fin de l’intervention, beaucoup viennent le voir et lui lancent: “en fait, vous êtes comme nous !”. Pour le rabbin, il est vital d'intervenir auprès de la jeunesse.
Quant à l’augmentation des actes antisémites, il ne les nie pas mais voit aussi beaucoup d’actes “pro-sémites”, comme il dit. Il décrit ces actes positifs qu’on ne recense pas, comme un gars de son quartier qui vient l'aider à changer une roue…
En septembre dernier, Haïm a eu la joie de participer aux rencontres méditerranéennes. Il a dit oui tout de suite et décrit sa participation comme un honneur. Quant au pape François, il n’a pas pu le rencontrer mais confie: “quel grand homme ! J’ai beaucoup aimé son homélie, il m’a épaté quand il a expliqué l'idolâtrie de nos jours, l’argent, le pouvoir, le fait de ne pas accepter ses torts… Il ne fait pas de cadeau ni à lui, ni aux gens qu’il a en face”.
En cette fête de Hanoucca, Haïm Bendao,"fait son travail", comme il dit, il ne changera pas le monde mais il tente de changer ce qu’il peut autour de lui, comme un bougie qui s’agite et illumine les ténèbres. Les chrétiens aiment bien l’expression “artisan de paix”, Haïm Bendao est l'un de ceux-là.
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