
LE POINT DE VUE DE CLOTILDE BOSSOLLET - Depuis quelques semaines, l’actualité remonte les faits de violences physiques et sexuelles qui ont été perpétrés dans un établissement catholique et dont l’actuel chef de gouvernement aurait été au courant sans qu’il ait agit en conséquence. Clotilde Brossollet revient ce matin sur la médiatisation et la politisation de l’affaire Bétharram.
Il ne fait aucun doute que la médiatisation de l’affaire Bétharram est due en grande partie à des motivations politiques. La grande enquête publiée le 5 février dernier l’est par Médiapart, le journal en ligne d’investigation qui n’a jamais renié ses affinités avec la gauche. Et l’enquête porte sur les sévices subis par les élèves de cet établissement scolaire, mais aussi sur l’attitude de l’actuel premier ministre dans la gestion de cette affaire sordide. Un des titres de cette enquête est d’une franchise éclatante : « Viols sur mineurs à Bétharram : les mensonges de Bayrou pour défendre une institution catholique ». La France Insoumise, s’est emparée du sujet, pour déstabiliser le Premier ministre qui s’est défendu, plutôt maladroitement, lors des questions au gouvernement. Il faut dire que les derniers échecs des motions de censure de LFI ont fait grandir la frustration. L’ambition de son leader, Jean-Luc Mélenchon, est bien l’instabilité gouvernementale en vue d’une présidentielle anticipée. L’occasion est trop belle pour ne pas transformer Bétharram en une crise politique. Manuel Bompart parle de « scandale d’État » tandis que Paul Vannier obtient la création d’une commission d’enquête parlementaire. Même le PS enfourche le cheval de bataille quand Olivier Faure appelle à la démission de François Bayrou.
Il ne faut pas être naïf, il y a une instrumentalisation politique de cette affaire, que le porte-parole des victimes, Alain Esquerre, ne nie pas. Mais cette instrumentalisation et ses conséquences devraient nous interroger. Jusqu’à l’enquête de Médiapart, personne n’avait entendu parler de Bétharram, à l’exception des lecteurs de La Vie, hebdomadaire qui avait publié un long article sur le sujet en septembre 2024. Pourtant, depuis un an, une enquête policière était ouverte dans la plus grande des discrétions, par le Parquet de Pau. On parle de plus de cent plaintes pour viols et agressions sexuelles ! L’ampleur de l’affaire aurait tout de même pu alerter la presse nationale. D’autant que deux autres affaires avaient déjà concerné l’établissement dans les années 1990 et qu’une vingtaine de victimes ont déjà indemnisées par la Commission de Reconnaissance et de Réparation de l’Église catholique. Et, étonnamment, le Parquet de Pau ouvre, deux semaines après, les articles de Médiapart, une information judiciaire, suite à la garde à vue de trois hommes deux jours plus tôt. Sans l’emballement médiatique et politique, on est en droit de se demander si l’action de la justice aurait été si prompte. Il est frappant tout de même que, là encore, il se dit que tout le monde savait. Pourtant la parole des victimes n’est prise au sérieux qu’une fois que toutes les personnes mises en causes sont mortes, à l’exception de trois, dont deux sont couvertes par la prescription.
Le secrétaire général de l’enseignement catholique a raison quand il dit que « toute la société doit protéger les enfants », que « toute la société est responsable ». De telles affaires montrent à quel point les violences, en particulier, sexuelles faites aux enfants, restent minorées voire tues. Pourtant chaque année 16 000 enfants subissent ce type de violence, ce qui représente 2 à 5 enfants par classe. Nos enfants ont donc chacun côtoyé au moins une vingtaine de victimes durant leur scolarité. La question n’est donc pas tant celle de savoir si François Bayrou savait mais de savoir ce que chacun d’entre nous fait.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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