LE POINT DE VUE D'ANTOINE-MARIE IOZARD - Passant facilement d'une messe en latin à une soirée louange, la nouvelle générations à de quoi étonner les plus anciens ! Focus sur les rassemblements du week-end de Pentecôte …et sur ce qu'ils traduisent des jeunes catholiques. Un plaidoyer pour un "cessez le feu liturgique" d'Antoine-Marie Izoard, Directeur de la rédaction de Famille Chrétienne.
Je vous propose de l’appeler… Léa ! Lors du week-end de la Pentecôte, Léa a rejoint les rangs du pèlerinage de Chrétienté entre Paris et Chartres, marchant avec des milliers d’autres jeunes, et des moins jeunes. L’étudiante apprécie en effet la ferveur de la prière sur les chemins au milieu de « l’océan des blés », si bien décrit par Charles Péguy. Elle aime aussi les chants entonnés en chœurs vigoureux et les échanges lors des haltes au fil de la route. Ayant débarqué au milieu des « tradis » avec son équipe de guides-aînées, Léa découvre peu à peu la messe traditionnelle, sans lâcher pour autant son joyeux groupe paroissial de louange charismatique. En marchant vers Chartres et en entonnant des cantiques en latin, Léa s’est peut-être souvenue de cet autre chant en latin - « Confitemini Domino » - qu’elle avait appris lors d’un pèlerinage à Taizé avec les jeunes de son diocèse. Un temps, en effet, sa vie de prière était rythmée par les refrains dans de multiples langues, caractéristiques de cette communauté œcuménique installée sur une colline bourguignonne. Puis, lycéenne, elle a aussi vibré avec les groupes de pop louange découverts au Frat. Le rassemblement des jeunes Franciliens l’avait marquée, à la fois par sa joie manifeste et ses liturgies festives et soignées.
Durant le week-end de Pentecôte, comme Léa, des milliers de jeunes ont prié et chanté vers Chartres, au Frat, à Taizé, dans des rassemblements diocésains… En fait, Léa pourrait être ma fille. Et peut-être la vôtre. Son parcours de foi ne fait que commencer, mais dans sa quête de Dieu et son attachement radical au Christ, elle est une extraterrestre pour ses contemporains. Passe encore. Mais pour la génération de ses parents, et plus encore celle de ses grands-parents, Léa est aussi une énigme… liturgique. Car avec tous ceux qui grandissent dans la foi en passant sans difficulté d’une messe saint Pie V à une soirée de louange, Léa a de quoi désorienter.
Pendant ce temps, certains de leurs aînés poussent des cris d’orfraie à la vue de la moindre soutane, tandis que d’autres refusent catégoriquement de prendre la file lorsqu’un laïc distribue la communion. Certains s’évanouissent dès qu’un chant en latin est entonné ou que fume l’encensoir, tandis que d’autres discutent des heures de la validité d’une messe.
Ces jeunes-là, nos enfants, nous réclament de soigner nos liturgies et, surtout, de les mener au Christ. L’autel n’est pas un champ de bataille. La liturgie ne doit plus être une guerre de tranchées avec ses réserves d’Indiens, ses luttes idéologiques, ses arrière-pensées politiques ou de grandes réformes révolutionnaires. Il en va de notre témoignage de foi devant le monde et de l’unité des catholiques. Cette unité est un fruit de l’Esprit Saint, descendu sur les Apôtres au Cénacle. En réclamant le Paraclet, veillons, pour Léa et pour les autres, à ne pas tomber dans deux tentations récurrentes dénoncées par le pape François : celle de chercher la diversité sans l’unité, comme celle de chercher l’unité sans la diversité. Il est temps, de part et d’autre, de se parler et d’un cessez-le feu liturgique pour garder le feu de la Pentecôte !
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